Faut-il encore revenir sur le fait que la Suède est devenue le nouvel Eldorado du Rock, du Metal, de l’AOR, et finalement, de pratiquement tous les sous-genres que nous affectionnons depuis les années 80 ? Oui, non pour l’effort de mémoire, mais pour en souligner l’importance, et surtout, l’évidence, qui s’impose de mois en mois et d’années en années au travers d’albums impeccables, parfois enregistrés par des formations si jeunes qu’elles n’en ont que quelques mois d’existence. Sur un plateau, je vous apporte un nouvel élément de démonstration, un tableau d’or et d’argent, qui porte sans efforts sous ses reflets le premier LP d’un quatuor qui va se faire remarquer, spécialement au regard des amoureux de la mélodie et des amateurs d’harmonies travaillées sur fond de Rock domestiqué. Domestiqué, mais pas castré et la précision est d’importance. Pas forcément viril sur le fond et la forme, mais pas non plus du genre à se frotter à vos mollets pour réclamer les câlins qu’il pense avoir mérité. Le nom de cette charmante petite bête qu’on a déjà envie d’adopter ?
WILDNESS. Mais pas la sauvagerie d’un comportement agressif, non, plutôt celle des grands espaces suédois qui se bronzent au soleil de la west coast américaine des eighties, tout en respectant leur propre héritage, né des exactions de guides de montagne de l’orée des années 2000 qui connaissaient bien les pistes noires à éviter. Que dire sur ce quatuor que leur musique n’osera vous dévoiler ? Leurs noms peut-être (Gabriel Lindmark – chant, Adam Holmström & Pontus Sköld – guitares et Erik Modin – batterie/chœurs), qui n’évoqueront pas grand-chose, mais qui ont stimulé les signataires allemands d’AOR Heaven, qui aurait pu et dû se disputer les faveurs scandinaves avec leurs homologues de Frontiers, tant les morceaux de ce premier éponyme n’auraient pas fait tâche dans leur écurie.
Des références, celles de KISS, DOKKEN, DEF LEPPARD, ACCEPT, MEGADETH, DANGER DANGER, RIOT, EXTREME, HUEY LEWIS AND THE NEWS, PANTERA, PHIL COLLINS, FM, EUROPE, DREAM THEATER, QUEENSRYCHE, ANNIHILATOR, H.E.A.T, ECLIPSE, W.E.T., TALISMAN, TOTO, WINGER, SAVATAGE, EUROPE, RED DAWN, NO SWEAT, RESCUE, VAN ZANT, et dont les plus puissantes sont certainement là pour ne pas sombrer dans la mièvrerie de révérence un peu trop FM, mais qui balisent bien le terrain propice aux rencontres romantiques tout comme aux ballades sauvages dans une nature pas si hostile que ça. Un son aux antipodes du climat local, chaud et rond, accueillant et pas forcément dérangeant, mais surtout, deux qualités notables, celle de compositions intelligemment élaborées, et celle d’une interprétation engagée et passionnée, qui nous séduisent d’entrée. Multipliant les hits, et faisant suite à une poignée de singles parus en signes avant-coureurs (« Collide » en 2015 et « Turning The Pages » en 2016), Wildness est une démonstration de simplicité faite musique, aussi tendre qu’elle n’est hargneuse, et qui nous démontre s’il en était besoin que ces malins suédois sont vraiment prophètes en leur style. Ils ont su depuis longtemps capturer l’essence d’un Hard Rock mélodique à outrance, payant son tribut aux origines des BON JOVI, des BRIGHTON ROCK, mais aussi des STYX, JOURNEY, SHY, MAGNUM, DOMAIN, et autres influences majeures du créneau, tout en y ajoutant leur patte nordique consistant à soigner des couplets pour transcender des refrains qu’on retient jusqu’au petit matin. Et une fois de plus, ce LP en est bourré, de sa première minute à sa fin annoncée. Qu’on regrette d’ailleurs, même si elle intervient cinquante-cinq minutes après son entame d’airain.
On retrouve évidemment sur l’album les deux singles déjà publiés, qu’on réécoute avec une joie affichée, ceux qui justement nous ont attiré dans le giron d’un quatuor à la simplicité assumée. « Collide », nous avait convaincu du potentiel mélodique d’une formation typique, de ses chœurs enflammés et de son refrain qu’un Ted Poley aurait pu faire sien sur son album solo, ou en compagnie de DANGER DANGER. « Turning The Pages », placé en final rappelle les envolées lyriques et les aventures homériques du SURVIVOR le plus musclé, sans pour autant se départir de cette flamboyance typiquement européenne, qui a tendance à laisser quelques aspérités traîner pour ne pas rendre sa musique trop policée. Un refrain qui trépide, des voix qui s’entremêlent d’un débit rapide, le mariage est parfait, et l’union consommée, à tel point qu’il est possible en se basant sur ces deux seules interventions de démontrer les capacités d’un quatuor décidément très convaincant dans le ton. Mais sur onze morceaux, onze valent le détour, et l’ensemble dégage un sentiment de best-of du genre et du combo lui-même, comme s’il avait fallu prouver ses capacités sans nous laisser le temps de respirer. Pourtant, Wildness est aéré, très. On y retrouve parfois des guitares sentant bon le Gary MOORE des mid eighties, des arrangements de clavier symptomatiques des bandes FM US de la même décennie adorée, quelques effets bien placés et dignes d’une B.O bien troussée, et surtout, un engagement de tous les instants qui empêche le projet de sombrer dans un classicisme trop formel qui aurait pu le plomber. Une paire de guitaristes plus que capables, un singer/frontman au timbre velouté et chaud, et une rythmique solide mais fluide qui assure une assise au reste du groupe, qui se permet dès lors à peu près tout. Bilan ? Une réussite totale, qui aurait trusté les ondes il y a quelques décennies, lorsque l’amour d’une musique radiophonique bien faite prédominait sur la recherche de prise de risque avortée.
Les moments de calme et de douceur sont bien sur présents, romantisme oblige, mais ne versent jamais dans la mièvrerie d’une déclaration d’amour flétrie, ce que prouve sans conteste « Your Last Romance » et « The Flame », qui réinventent l’art de l’intervention en solo dramatique sur fond de claviers caressés. Dans une veine que les ECLIPSE et BAD HABIT connaissent par cœur, les WILDNESS ne se font certes pas passer pour les sauvages qu’ils ne sont pas, même si quelques accès de puissance groovy leur permettent de se rapprocher d’un Hard-Rock moins calibré, et moins bridé (« Highlands » au déhanché rythmique diabolique). Si les titres sont développés et n’hésitent pas à passer la barre des cinq minutes plafonnée, ils présentent suffisamment de qualités et d’inventivité pour ne pas lasser, pouvant compter sur des harmonies splendides et des arrangements limpides pour faire passer le temps plus vite qu’il n’y parait (« Down In The City »).
Incursions acoustiques pour Rock Heavy qui pique (« Welcome The Night »), ébènes et ivoires martelés comme à la grande époque d’un AOR sublimé (« Alibi », hit en puissance remarqué), le parcours est tout sauf du combattant, mais aux reliefs assez prononcés pour ne pas s’endormir durant la randonnée. Le talent des instrumentistes est évidemment prépondérant, bien qu’une indéniable humilité les empêche d’en faire trop et de gloser dans le vide, la production parfaitement couchée est lisse mais pas aseptisée, et de fil en aiguille, ce premier LP s’incruste dans les neurones et le cœur pour ne plus les quitter, et procurer un sentiment d’euphorie que la mémoire retient sans souci.
Les suédois encore, toujours, à la vie à la mort. Mais les surdoués sont ce qu’ils sont et autant l’accepter. Comme d’accepter le fait que les WILDNESS avec Wildness s’imposent comme une nouvelle valeur ajoutée, et ont signé un disque qui risque fort de devenir un classique instantané.
Titres de l'album:
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Je ne suis pas au courant.. il s'est passé quelque chose récemment avec le groupe Al Namrood?
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