Je dois bien l’avouer, à mon grand dam, ou pas, qu’un nouvel album de SUICIDAL TENDENCIES est depuis très longtemps pour moi devenu une simple anecdote, un entrefilet, un détail auquel je ne fais plus guère attention. La faute à quoi, à qui ?
Des séparations, des retours soit disant en fanfare ne faisant pas plus de bruit que celle de mon quartier, et puis des disques fades, sans saveur, qui m’ont toujours fait plus regretter la sacro-sainte époque des meilleures saillies de Muir & co.
Mais ces mêmes occurrences commençaient à salement dater dans le passé. Et le présent n’offrait que peu de choses…13, le dernier album « officiel » de la bande n’était qu’un collage hétéroclite de morceaux pas vraiment faits pour cohabiter, et sentait mauvais la tentative foireuse de retrouver l’esprit d’antan.
Enfin en gros, et pour résumer, depuis la débâcle catastrophique du pitoyable Suicidal For Life il y a vingt-deux ans, je ne m’attachais plus trop aux pérégrinations de l’homme au bandana, et j’ai donc accueilli la nouvelle d’un treizième LP studio avec tout le détachement que je pensais lui devoir.
Las, les meilleurs d’entre nous se trompent…Même avec des circonstances atténuantes…Alors, après avoir lu de çà et là des accroches intrigantes, des publications dithyrambiques sur les réseaux sociaux et des concerts de louanges un peu partout où la place de publication était disponible, je me suis finalement décidé à me pencher sur ce World Gone Mad, et pas seulement à cause de son casting qui méritait un minimum de déférence.
On le sait, Dave Lombardo joue sur ce disque, ce qui suffit à le rendre intéressant, jusqu’à un certain degré. Retrouver la frappe de monsieur SLAYER, GRIP INC, FANTOMAS et tellement d’autres que j’ai perdu le post-it où j’avais tout noté, est toujours un plaisir, surtout lorsque le frappeur le plus célèbre du Thrash décide d’adapter son jeu à l’un des combos les plus emblématiques de la vague Punk/Hardcore/Crossover de Venice. Pas de roulements diaboliques, pas de descente de toms infernale, juste une frappe massive et matte qui donne le la et le tempo, et surtout, un contrepoint fabuleux à la guitare hystérique de Dean Pleasant et la voix voilée de Muir.
Le monde va mal ? Oui, mais pas forcément plus qu’aux débuts de SUICIDAL, à l’époque où Mike et ses potes punks s’en prenaient à Reagan le conservateur pour fustiger sa politique d’austérité et de gonflage de budget de la défense. Certes, la tête à claques Donald Trump doit bien agacer la casquette de Mike, et l’envie de lui coller quelques beignes doit le tarauder, mais toute cette agitation n’était pas forcément synonyme de retour aux sources pour la bande…
Et pourtant si, et le miracle que personne n’attendait plus s’est produit. SUICIDAL TENDENCIES, je veux dire le vrai, l’unique, celui de How Will I Laugh ou Join The Army est de retour, paré des paillettes des glorieux et inégalables Lights, Camera Revolution et The Art of Rebellion. Et inutile de faire durer le suspense trop longtemps à la Walking Dead, oui, World Gone Mad est presque à la hauteur des deux chefs d’œuvres du collectif qui pour une fois depuis très longtemps sonne comme tel. Il aurait d’ailleurs pu sortir en tant que suite logique, personne n’aurait rien trouvé à redire, puisqu’il en constitue une extension tout à fait honorable. Dans le fond et la forme s’il vous plaît.
Alors ressortez votre skate du placard, vissez votre bandana sur votre front, et redevenez possédés, puisque ST est de retour, plus méchant, lucide, agressif, chafouin et mordant que jamais.
World Gone Mad en substance, c’est le crossover parfait, et le terme est idoine. Il a la puissance et l’esprit gouailleur de Lights, la rigueur et la rugosité Metal souple de Rebellion, le tout agité d’une attitude borracho digne des piliers de comptoir fans des trois premiers INFECTIOUS GROOVES.
Et d’ailleurs, pour bien montrer que l’héritage de « Therapy » n’est pas tombé dans le domaine public, le quintette démarre les non hostilités avec un savant clin d’œil au madman, et « Clap Like Ozzy » de permettre à Lombardo de cavaler d’une rythmique Hardcore digne des premiers efforts de la bande à Mike.
Certes, sa frappe n’est pas vraiment groovy, mais colle à merveille à la nouvelle ambiance de fiesta acide et sans limites proposée par Muir, qui a lui-même composé 99% du matériel.
Il faut croire que l’adjonction du cogneur fou a greffé des ailes à son inspiration, puisqu’on retrouve enfin cette basse qui ne claque pas dans le vide, à la Trujillo bien sûr, mais dignement ressuscitée par le fabuleux Ra Diaz, sorte de croisement monstrueux entre Robert et Eric Avery des JANE’S ADDICTION. Vitesse débridée, refrain hurlé avec conviction, les choses sont mises au point dès le départ, et la folle sarabande commence sous les meilleurs auspices.
Malgré ses six minutes bien tassées, « The New Degeneration » ne marque aucune pause et se veut lourdeur Metal, retrouvant de fait l’haleine fétide de The Art Of Rebellion. Riff lourd qui s’impose, rythmique qui appuie un peu plus sur les bandages du passé, chœurs collégiaux plein de rage, et harmonie dans la diversité. On pense à « Can’t Stop », à « Monopoly On Sorrow », jusqu’à cette accélération ébouriffante qui permet à « God » Lombardo de placer un de ces roulements dont il est coutumier, et à Dean Pleasants de singer les meilleurs soli de Rocky George, en les adaptant à une époque plus contemporaine. Tuerie ? Massacre ? Les deux options sont les bonnes, et en deux morceaux, Muir et ST sa créature appuient la théorie selon laquelle leur grand retour est enfin effectif, effaçant de fait une ardoise de l’échec assez blanchie depuis les mid nineties.
De là, ça déroule sévère et on arrête de compter les points, tant l’avantage à l’équipe leader est indéniable et écrasant.
L’intro de « Living For Life » renoue enfin avec la roublardise des derniers instants avant la seconde séparation, et une fois de plus, multiplie les idées, les tempi, pour une virée sur le bitume sans freins ni genouillères. Lombardo fait le show et cogne avec fermeté et fluidité, et Dean se laisse aller à ses meilleures interventions. Muir chante enfin comme le sale gosse punk qu’il a toujours été, et se replonge dans ses introspections mélodiques de l’époque The Art, le temps d’un puissant « Get Your Fight On ! ». Pont construit inconsciemment entre les deux meilleurs albums du groupe, c’est un titre qui effleure enfin la légende d’un groupe qui ne nous avait que trop manqué, et qui a semblé retrouver le point G de cette fontaine de jouvence dont ils avaient perdu la trace.
Mais en fait, tous les morceaux sont du même tonneau, qui exsude par quelques trous d’un alcool fort en bouche, et qui en remontre à tous les petits producteurs Core de ces dernières années.
« World Gone Mad ! » semble se traîner d’un downtempo qui dégénère à saccades régulières, mais empeste la lucidité ironique par tous les pores. « One Finger Salute », outre son titre plein de finesse résonne comme le départ en guerre d’une troupe qui a retrouvé son courage sur le champ de bataille, et qui multiplie les manœuvres pour tromper l’ennemi. Tempo virevoltant et changeant, chant galvanisant, et parties de guitare en mouvement, la trademark de ce treizième album, chiffre qui visiblement ne porte pas vraiment malheur…
Le Punk N’Thrash de « The Struggle Is Real », la longue suite évolutive et moite « Still Dying to Live » qui susurre l’air connu de « I Wasn’t Meant to Feel This/Asleep at The Wheel » dans nos oreilles ébahies, et le final apaisé et acoustique de « This World », sorte de faux « The Battle Of Evermore » de SUICIDAL…Tout est là, ou presque, pour résumer une carrière entamée à l’orée des années 80, et dont la saine colère juvénile trouve un écho formidable dans la maturité de ces musiciens qui n’ont pas encore oublié les rebelles qu’ils étaient.
Il serait tentant d’invoquer le pouvoir de roi Midas de Lombardo qui transforme en or tout ce qu’il touche de ses baguettes, mais il faut reconnaître que son apport n’a pas été négligeable dans l’euphorie retrouvée de Muir et de sa musique.
Ou peut-être sont-ce les nombreuses provocations de Trump qui ont redonné du jus de fiel à ce bon vieux Mike…
Toujours est-il, et je le répète encore, mais de la production de Mike Muir et Paul Northfield au hit and run de Dave, en passant par les soli de Dean et les fulgurances de basse de Diaz, tout ici se pose en continuation d’un travail de perfectionnement commencé sur How Will I Laugh Tomorrow et laissé en friche après The Art of Rebellion.
Fraîcheur, envie, puissance et mélodie, non ça n’est pas une pub pour Tahiti qui donne envie de prendre une douche, mais les qualificatifs d’un extraordinaire album qui reste longtemps en bouche.
Et vous savez quoi finalement ?
SUICYCO MOTHERFUCKER !!!!!!
Titres de l'album:
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