En Grèce, c’est le bordel, peut-être un peu plus qu’ailleurs en Europe, ce qui n’empêche pas les musiciens nationaux de poursuivre leur carrière à la poursuite d’un rêve Thrash entamé il y a de nombreuses années. Pour preuve, les athéniens de SUICIDAL ANGELS atteignent aujourd’hui leur septième longue-durée, ce qui laisse admiratif lorsqu’on connaît le parcours semé d’embuches qu’est une carrière au long cours. Et en préambule de cette chronique, j’adresserai donc mes plus chaleureuses félicitations à ce combo qui depuis 2001 poursuit son chemin, sans se demander de quoi sera fait ses lendemains, et qui nous livre à intervalles réguliers des albums de très grande qualité. Depuis 2007 et la parution d’Eternal Domination, nous savons pertinemment que les grecs sont des gens solides, sur qui on peut compter pour headbanguer au son d’un Heavy Thrash certes nostalgique, mais pas bloqué dans les glorieuses eighties pour autant, même si leurs influences en proviennent. Jusqu'à présent les hellènes nous prodiguaient leurs bons soins tous les deux ans au pire, mais trois se sont écoulés depuis la publication du très célébré Division of Blood, qui n’avait justement divisé personne mais rassemblé les troupes de fans. D’ailleurs, pour beaucoup d’entre eux, ce pénultième LP représentait la quintessence de l’art brutal des grecs, et entraînait donc un questionnement logique pour la suite des évènements. Les SUICIDAL ANGELS allaient-ils parvenir à maintenir le cap, et surtout le niveau de qualité atteint par cette étape cruciale ? La réponse se présente aujourd’hui sous la forme de neuf morceaux intelligemment agencés, qui sans stagner évoluent à leur rythme pour continuer à bâtir cette cathédrale sonore que beaucoup de fans de Thrash pur et dur visitent depuis des années avec piété.
Enregistré aux Zero Gravity Studios d’Athènes et aux Soundlodge Studios de Papenburg en Allemagne, produit par le groupe lui-même et flanqué d’un superbe artwork signé de la légende Ed Repka (MEGADETH, DEATH, MUNICIPAL WASTE), Years Of Aggression est en quelque sorte un parfait résumé de l’histoire des grecs, mais surtout, une synthèse fabuleuse des courants européen et américain de l’extrême d’il y a trois décennies. On retrouve ce professionnalisme dans l’entrain, cette mesure dans l’excès, mais surtout, ces riffs porteurs qui transcendent des structures classiques. La recette appliquée est la même depuis leurs débuts, une base solide de Thrash de la Bay Area (EXODUS), quelques accentuations typiquement germaines de la même époque (DESTRUCTION), le tout traité façon scandinave lorsque le tempo accélère et se approche des AT THE GATES et SOILWORK. Cette démonstration est patente tout au long de l’album, qui ne cache en rien ses influences, et qui les revendique avec une morgue admirable. Ainsi, les fast songs sont toujours aussi propices au headbanging, à l’image du lapidaire « D.I.V.A », qui suggère une contribution conjointe des AT THE GATES et du TESTAMENT de « C.O.T.L.O.D. », ou de la petite bombe « Born Of Hate », qui rappelle toute l’importance du KREATOR des années 90, celui-là même qui allait inspirer les scandinaves dans leurs tentatives d’adapter le Thrash à l’air du temps des nineties. Mais les crises de colère ne sont pas rares sur ce septième longue durée des grecs, qui savent toujours aussi bien doser l’agressivité et la nuance, comme le démontre avec emphase le monstrueusement efficace « Years Of Aggression », qui de son titre synthétise à merveille toutes les optiques du quatuor ( Nick - guitare/chant, Orfeas - batterie, Gus - guitare et Angel - basse).
Nouvelle réussite donc à ajouter au tableau de chasse déjà très fourni ? Oui, puisque chaque album du groupe en est une, et si on semble noter une temporisation parfois, notamment sur les titres les plus médiums qui ne sont pas sans rappeler Schmier et sa bande (« Bloody Ground », aux chorus inquiétants dans le lointain qui se servent des atmosphères étranges de la BO de Return of the Living Dead), l’implication globale est toujours aussi dense, ce qu’on note dès le tourbillon d’entame « Endless War », qui fait virevolter les guitares comme l’EXODUS des grandes années, celui-là même qui finirait par s’unir à SLAYER par procuration. La production du groupe, très claire et ample sonne parfois un peu propre, mais permet d’apprécier le travail de Nick et Gus aux guitares, parvenant toujours à trouver les motifs les plus marquants. Le chant de Nick, rauque et toujours convaincant, domine les débats par son talent naturel, sans chercher à s’imposer, et les morceaux les moins immédiats comme « Bloody Ground » parviennent toujours à trouver un angle d’approche hypnotique qui rend leur progression fascinante. En choisissant la politique des arrangements épars mais toujours bien placés, les grecs enjolivent leur travail de base sans le dénaturer, et font la jonction parfaite entre le Heavy et le Thrash plus mélodique, sans oublier que ce qu’on cherche dans cette musique, est ce surplus d’énergie qui nous décoiffe tout en incrustant des riffs catchy dans nos mémoires (« Order Of Death », split entre les DEATH ANGEL et EXODUS en loucedé, mais aplatissant comme il faut). Double grosse caisse économique mais pertinente, phrasé saccadé comme un tir de barrage, toutes les composantes sont là, une fois encore expurgées de tout excès, mais cette modération a quelque chose d’hypnotique dans son épure.
Qui plus est, les SUICIDAL ANGELS ont toujours cette présence d’esprit de ne pas en faire trop, et d’arrêter leur effort juste au-dessus de la barre des quarante minutes, ce qui permet à l’auditeur de ne pas se lasser. Evidemment, les idées se répètent parfois, mais l’efficience est indiscutable, et « The Roof Of Rats », à la limite pile du Techno-Thrash de nous rappeler pourquoi nous avons craqué un jour pour ces rythmiques enlevées et ces guitares déchaînées. En guise d’épilogue, Years Of Aggression se termine par un manifeste d’allégeance, entre acoustique d’intro délicate mais sombre et longue et lente procession, avec un « The Sacred Dance With Chaos » mystique à souhait, et témoin des ambitions toujours présentes du groupe. On aurait peut-être préféré quelque chose de plus radical au moment de les quitter, mais on ne peut reprocher à un groupe de regarder plus loin que le bout de son nez et de préparer au mieux son avenir. Un avenir qu’on imagine à la hauteur d’un passé glorieux et d’un présent fameux, et ce septième longue durée des athéniens est encore une réussite, qu’il sera très difficile de critiquer sans argument falsifié.
Titres de l’album :
01. Endless War
02. Born Of Hate
03. Years Of Aggression
04. Bloody Ground
05. D.I.V.A
06. From All The One
07. Order Of Death
08. The Roof Of Rats
09. The Sacred Dance With Chaos
Alors, j'ai vu les prix et, effectivement, c'est triste de finir une carrière musicale emblématique sur un fistfucking de fan...
20/02/2025, 19:08
J'avoue tout !J'ai tenté avec un pote d'avoir des places le jour J...Quand on a effectivement vu le prix indécent du billet, v'là le froid quoi...Mais bon, lancé dans notre folie, on a tout de même tenté le coup...
20/02/2025, 18:52
Tout à fait d'accord avec toi, Tourista. En même temps, on a appris qu'Ozzy ne chanterait pas tout le concert de Black Sabbath. Du coup, faut essayer de justifier l'achat d'un ticket à un prix honteux pour un pétard mouillé.
20/02/2025, 09:27
Tout est dit.Que ce soir devant 50 personnes dans une salle de quartier ou dans un festival Hirax et en particulier Katon assuré à l'américaine. Parfait.L'album précèdent reste terrible. A voir celui ci.
19/02/2025, 17:51
Hell Yeah!!! Voilà ce que j'appelle une bombe bien métallique.P.S: Il serait bien que ce site passe en mode sécurisé: https car certains navigateurs refusent son ouverture car il est considéré comme malveillant.
19/02/2025, 16:32
Pareil, vu au Motoc l'année dernière plus par curiosité qu'autre chose : et bah c'était excellent ! La passion qui transpire, la nostalgie d'une époque aussi et puis cette énergie !
17/02/2025, 21:39
Oui, Keton de Pena est une légende encore vivante avec son Thrash reprenant pas mal les codes du Heavy. Il y met cette ambiance jubilatoire en forte communion avec les fans (il a dû vous faire le coup du drapeau). Je l'ai vu deux fois il y a une dizaine d'années, c&a(...)
17/02/2025, 13:18
Vu pour la toute première fois en live l'été dernier.Il était grand temps pour moi au vu que j'adore ce groupe...Le concert était laaaaaargement au-dessus de ce que j'en attendais : Ambiance, prestation, joie communicative, ultra-res(...)
17/02/2025, 06:50
C'est un groupe assez ancien en fait, ils ont bien vingt ans de carrière derrière eux. Martin Mendez les a recrutés pour son propre groupe parallèle à Opeth, White Stones, car il est installée à Barcelone. Ils avaient commenc&eacut(...)
15/02/2025, 18:14
Âge oblige, j'ai connu à fond cette époque et elle était formidable. Evidemment, aujourd'hui, il y a internet mais le gros avantage du tape-trading, c'était que, par défaut, un tri s'effectuait, copie après copie (de K7). Aujourd(...)
14/02/2025, 05:50
AAAAh Benediction... Toujours un plaisir de les retrouver. Et en live c'est du bonheur (efficacité et bonne humeur!)
13/02/2025, 18:38
Dans son livre "Extremity Retained", Jason Netherton met en lumière l'importance énorme que ce phénomène a eu lieu dans la naissance de la scène. Tous les acteurs isolés dans leurs coins du monde échangeaient par ce moyen, et cela le(...)
12/02/2025, 01:30