D’un côté, les groupes majeurs, à l’œuvre référentielle, qui marquent de leur empreinte un style musical. En ce qui nous concerne, les exemples ne manquent pas, de BLACK SABBATH, LED ZEPPELIN, et DEEP PURPLE à IRON MAIDEN, DEF LEPPARD, SCORPIONS, JUDAS PRIEST, VAN HALEN puis METALLICA, SLAYER, BON JOVI et je m’arrêterai là avant de tenter la liste exhaustive. Le point commun de ces groupes ? Leur constance dans la qualité, et la possibilité d’extraire de leur travail plus de deux albums d’importance, de ceux qu’on cite en référence pour illustrer le génie d’une époque.
D’un autre côté, les groupes qui marquent une époque, par un ou plusieurs traits de talent, et qui définissent l’air du temps par quelques hits ou concepts bien troussés. On peut ranger dans cette catégorie plusieurs ensembles, dont EUROPE, QUEENSRYCHE, HELLOWEEN, SAXON, j’en passe et des moins évidents. Il s’agit donc là de groupes qui sont parvenus à publier deux ou trois chapitres cruciaux à la suite ou sur une période plus ou moins courte, et qu’on reconnaît immédiatement en les associant à des années bien précises.
Et puis, entre les deux catégories, existe une zone un peu floue dans laquelle se rangent les groupes ayant approché le génie en une seule occurrence, et qui ont porté le lourd flambeau « d’espoir futur » avec plus ou moins d’aisance et de bonheur. Des groupes qui à un instant T ont incarné la perfection, publiant un LP frisant la grâce absolue ou synthétisant les tendances du moment avec un panache indéniable. On peut facilement placer sur cette étagère le Pornograffitti d’EXTREME, le Young, Wild and Free de BRIGHTON ROCK, le Long Cold Winter de CINDERELLA, mais aussi un autre disque, paru à peu près en même temps, et venant du nord de l’Europe. Future World de PRETTY MAIDS fait assurément partie de cette catégorie, et il s’en est fallu d’un cheveu frisotté de Ronnie Atkins pour que le groupe ne change de catégorie, si tant est que ce second LP des danois avait été suivi d’un autre chef d’œuvre presque aussi magistral. Car après un début tonitruant avec Red, Hot and Heavy qui portait fort bien son nom, les danois étaient considérés pour beaucoup comme le next big thing européen, la relève assurée de SCORPIONS et IRON MAIDEN, et la seule passerelle viable entre la vieille Europe et la jeune Amérique. Pourtant, et malgré la qualité d’un premier EP éponyme et celle d’un premier longue-durée solide, rien ne laissait présager du miracle qu’allait accomplir Future World, au titre rappelant prophétiquement un tube d’HELLOWEEN. D’ailleurs, les fans du groupe commençaient à se ronger les sangs, puisqu’en 1987, ils étaient sans nouvelles de leur nouveau groupe fétiche depuis trois ans. Il faut dire que l’enregistrement de ce monument ne fut pas de tout repos, à la manière du Blackout de SCORPIONS.
Conscients qu’ils jouent une carte maîtresse, et profitant de l’enveloppe allouée par CBS, les danois se paient le luxe d’une production signée Eddie Kramer (KISS, FOGHAT, FASTWAY, WHITESNAKE, TRIUMPH, mais aussi RAVEN, ALCATRAZZ et ICON). Avec le soutien d’un gros label et un tel maestro à la console, tout ne peut que se passer à merveille pour les PRETTY MAIDS, qui affichent une confiance aveugle en leurs chansons. Conscients aussi que l’époque a changé depuis la parution de leur premier LP, et au fait de l’américanisation du son que MAIDEN ou le PRIEST ont adoptée en suivant la mode et les succès internationaux d’EUROPE et BON JOVI, le quintet au line-up renouvelé (Ronnie Atkins – chant, Ken Hammer – guitare, Phil Moorhead – batterie, Allan Delong – basse et Alan Owen – claviers, et départ de Pete Collins de la seconde guitare) tranche donc dans le vif, admet ses influences, et finit par comprendre que son talent est à la hauteur de ses ambitions. Et c’est ainsi que fort mécontent du travail de Kramer (viré selon la légende - ou Ken Hammer selon les sources - parce qu’il s’était endormi sur la console), le quintet s’en débarrasse et termine le travail seul. Mais le mixage sera confié à trois ingénieurs plus que compétents dans leur domaine, le célèbre producteur de METALLICA, Flemming Rasmussen, Keith Olsen mais aussi Chris Isca sur un seul titre. Pas étonnant dès lors que l’album ait longtemps traîné et n’ait vu le jour qu’aussi tardivement, mais lorsqu’on a un but en tête, et un but précis, il faut s’en donner les moyens. Et le but de PRETTY MAIDS avec Future World n’était rien de moins que de devenir le plus grand groupe du monde en 1987.
Et en écoutant les neuf morceaux de cette cathédrale sonore, on comprend que seul un géant au sommet de ses capacités pouvait les empêcher d’accéder au statut de groupe le plus marquant de cette année 1987 chargée en sorties. Et il ne faudra rien de moins que DEF LEPPARD et son monument Hysteria pour faire de l’ombre aux danois, ce qui n’est pas la moindre des ironies, puisque le groupe anglais figurait en bonne place des influences de PRETTY MAIDS. Mais alors, pourquoi Future World méritait amplement le prix de second meilleur LP de l’année, derrière Joe Eliott et sa bande ? Tout simplement parce que ce disque cristallisait son époque mieux que quiconque, et réussissait le tour de force de pouvoir séduire tous les publics et toutes les franges de la famille du perfecto Hard-Rock et Heavy Metal. Aussi Heavy que METALLICA, aussi mélodique que JOURNEY, aussi radiophonique que BON JOVI, mais aussi féroce et compétitif que SCORPIONS, Future World s’appuyait non seulement sur le talent d’instrumentistes de ses créateurs, mais aussi sur leur génie de composition. Et trente et quelques années en arrière, il ne fallut au quintet que cinq minutes et vingt-quatre secondes pour convaincre le public qu’il proposait autre chose qu’un Hard Rock faisandé remis au goût d’un jour opportuniste. « Future World », le morceau, déboulait dans votre chambre comme un dragster sur la piste, cramait votre moquette, enflammait vos oreilles, et vous frisait les cheveux plus efficacement qu’un fer de luxe. Avec cette entame, les danois jouaient sur du velours, unissant la puissance de RIOT, le côté épique de MAIDEN et HELLOWEEN, et la séduction mélodique de JOURNEY pour se propulser en haut de l’échelle des tops, et nous raconter LEUR futur, à l’image de cette sublime pochette signée White Line Illustration. Morceau dédié à la mémoire du regretté Phil Lynott, « Future World » ne devait rien à THIN LIZZY, mais construisait un pont solide entre l’agressivité européenne et la compromission harmonique américaine, trouvant le point de jonction entre la souplesse et la virilité.
Anecdote amusante, alors que le vinyle se poursuivait sur le très solide et Heavy « We Came to Rock », le CD préférait garder cette dynamique et placer l’ignifugé « Loud ‘n Proud » immédiatement, pour maintenir la pression. Mais quelle que soit la version que vous avez découverte à l’époque, ça ne changeait pas grand-chose à la donne, pour la simple et bonne raison que tous les morceaux de Future World étaient des hits qui supportaient très bien un agencement aléatoire. Il y en avait pour tout le monde, pour les romantiques (« Eye of the Storm », « Love Games »), pour les musclés de la cour de récré (« Needles in the Dark », « Yellow Rain »), pour les modérés qui ne refusaient pas un brin d’énergie entre midi et deux (« Long Way to Go »), en gros, de quoi réunir la famille Metal dans un même élan d’enthousiasme. D’ailleurs, celui de Jean-Pierre Sabouret de Hard-Rock Magazine le poussait à affirmer que ce disque donnait envie de « mettre la moitié de sa discothèque à la poubelle, devenue inutile », avis que je partageais fermement. Pourtant, les influences étaient marquantes, même sans recul. Impossible en effet de ne pas entendre SCORPIONS hurler « Dynamite » en écoutant « Yellow Rain », et difficile aussi de ne pas penser à BON JOVI en se sevrant du sucré « Love Games ». Mais avec des arrangements de claviers très intelligents et futuristes, utilisés à la fois comme Ken Hensley, Jon Lord ou Mic Michaeli, la voix incroyable de Ronnie Atkins, rauque dans les montées agressives et suave pendant les crises de séduction, la guitare volubile de Ken Hammer, lâchant des riffs enragés et des soli inspirés, tout était parfait sur ce disque, à tel point qu’il a tourné non-stop sur ma platine en alternance avec Hysteria pendant plus d’un an.
Mais plus que le travail d’un groupe, Future World était le fruit de la collaboration entre deux musiciens se connaissant et se respectant, Ronnie Atkins et Ken Hammer, les deux têtes pensantes de PRETTY MAIDS. Il ne prédisait pas forcément le futur, mais décrivait le présent musical avec une acuité incroyable, et dans un langage universel. Deux vidéos seront tournées pour l’occasion, illustrant les morceaux « Love Games » et « Future World », et l’album arrêtera sa course à 300.000 exemplaires vendus, et une très honorable 165ème place au Billboard, fait inespéré pour un petit groupe danois en pleine ascension. Malheureusement, et comme très souvent dans le cas de ces jolis contes de fée, Future World symbolisera pour beaucoup le pic de la carrière du groupe, alors même qu’il est encore en activité de nos jours. Certes, j’en conviens, Ronnie et Ken ne parviendront jamais à retrouver l’inspiration magique de l’année 1987, et rencontreront encore moult problèmes pour sortir leur troisième LP qui connaîtra deux versions, Jump the Gun / Lethal Heroes selon les pays, mais maladroite redite jusqu’à cette pochette allant fouiller dans la gloire passée. Ce qui n’empêche pas le duo de nous proposer des disques toujours très solides et crédibles (Undress Your Madness publié l’année dernière en est un excellent exemple), mais je donnerais n’importe quoi pour retrouver l’essence de mes quinze ans, et découvrir à nouveau ce disque dont les premières notes m’ont fait comprendre à quel point je pouvais aimer le Hard-Rock intelligent et sophistiqué.
Take your chances
Turn the key
Open up the doors
To another history
Here's no questions
No demands
Here's the future
This is wonderland
Rien n’était plus vrai que ces quelques vers. A part que le futur ne nous réservait rien de bon.
Titres de l’album:
01. Future World
02. We Came to Rock
03. Love Games
04. Yellow Rain
05. Loud ‘n Proud
06. Rodeo
07. Needles in the Dark
08. Eye of the Storm
09. Long Way to Go
Leur meilleur album un sacré souvenir.
"...jouer un concert en Arabie Saoudite. Un honneur absolu et un privilège. Les loups du nord apporteront la tempête hivernale à Riyad !"Un véritable honneur absolue de jouer en Arabie Saoudite, la ou les apostas sont condamnés &agra(...)
21/11/2024, 08:46
Quand on se souvient du petit son des années 80... Mais la prod ne fait pas tout, ça reste du pilotage automatique. C'est pas avec un truc pareil que je vais me réconcilier avec eux, et ça fait 20 piges que ça dure.
19/11/2024, 21:57
J'avais pas vu cette chronique. J'étais au soir avec Ulcerate et je n'ai pas du tout regretté...Le lieu : il y a forcément un charme particulier à voir ce genre de concert dans une église, surtout que le bâtimen(...)
15/11/2024, 09:51
Le who's who des tueurs en série. Un plus gros budget pour l'artwork que pour le clip, assurément. (...)
14/11/2024, 09:20
J'imagine que c'est sans Alex Newport, donc, pour moi, zéro intérêt cette reformation.
11/11/2024, 16:15
NAILBOMB ?!?!?!?!Putain de merde !!! !!! !!!J'savais pas qu'ils étaient de nouveau de la partie !!!Du coup, je regarde s'ils font d'autres dates...Ils sont à l'ALCATRAZ où je serai également !Humungus = HEU-RE(...)
11/11/2024, 10:09