En 1967, Paul McCartney tombe sur la critique d’un single, que le journal qualifie de morceau « le plus bruyant, le plus fou » que la musique ait pu produire. Intrigué, le bassiste/chanteur/auteur/compositeur des BEATLES écoute le morceau en question, et découvre le « I Can’t See for Miles » des WHO. Interloqué, McCartney ne comprend pas comment une telle chanson a pu être qualifiée de « bruit » et piqué au vif, se met en tête de proposer au reste du groupe un titre si bruyant et primitif que plus personne n’oserait employer ce terme en vain. Arrivé en studio pour l’enregistrement de The Beatles, il lâche un énorme riff de basse, et laisse les autres le suivre dans son délire. En résulte une jam session terrible de vingt-quatre minutes (d’où le «I’ve got blister on my fingers !! » hurlé par Ringo après le shunt final), faite de hurlements, de bruits blancs, et d’une distorsion poussée à l’extrême. Une « folie collective » comme le décrira Ringo Starr plus tard, mais quoi qu’on en dise, « Helter Skelter » reste pour moi l’acte de naissance définitif du Heavy Metal, avant BLACK SABBATH, et né par accident.
C’est aussi un accident qui coûte l’extrémité de deux de ses doigts (le majeur et l'annulaire) à Tommy Iommi, l’obligeant à se façonner une petite prothèse en cuir, à alléger le tirant de ses cordes, et à jouer un demi-ton plus bas, lui donnant ce son si typique. Les accidents ont donc une part très importante dans l’art, et sont généralement des éléments déclencheurs d’une mode, d’une façon de jouer, et de recycler du vieux pour faire du neuf. Lorsque MOTORHEAD sort ses grands classiques Ace of Spades et Overkill, Lemmy ne souhaite rien faire de plus que le Rock N’Roll le plus dangereux du monde. Les trois anglais de VENOM, musiciens médiocres, jouent le Heavy Metal comme ils le peuvent, le plus rapidement et salement possible, et l’accommodent d’une imagerie satanique de pacotille pour se démarquer. Mais déjà, alors que Welcome to Hell et Black Metal nous avaient à peine traumatisés, se tramait dans l’ombre un des complots musicaux les plus atypiques des années 80. Un complot si ignoble, si bruyant, si rapide, qu’il lui fallait un nom de baptême à la hauteur de sa vilénie.
Pour les puristes, le Thrash (et non pas « Trash », comme tant ont pu l’écrire à l’époque) est né avec le Kill Em’All de METALLICA, un petit combo de Californie traumatisé par la NWOBHM et MOTORHEAD, mais aussi par la scène Punk/Hardcore anglaise. Pour d’autres, plus à cheval sur les principes, c’est bien SLAYER qui lance le premier cri d’alarme avec son satanique Show No Mercy, tandis que certains osent même mettre en avant le possédé Bonded By Blood d’EXODUS comme acte de naissance du mouvement. En poussant le bouchon plus loin, on pourrait arguer qu’en Allemagne, à la même époque, deux groupes se distinguent déjà méchamment de leur puissance brute, TORMENTOR (formé en 1982) et SODOM (assemblé en 1981 avec une première démo en 1983), tandis que la Suisse fomente l’attentat HELLHAMMER (démo Death Fiend, 1983). Mais quel que soit le point de départ que vous choisissiez pour raconter l’histoire du Thrash, il convient de prendre en compte que comme beaucoup d’autres styles, il est né par accident, de ce désir tangible d’être plus rapide, plus agressif, plus blasphémateur et plus repoussant que les autres.
Le but de ce petit dossier n’est pas d’en raconter l’histoire exhaustive (ce qui pourrait toutefois être intéressant en disposant d’interviews de ses acteurs majeurs et mineurs), ni de parler pour la énième fois de ses chefs d’œuvres. Tout a déjà été dit sur les pierres angulaires du Thrash, de Reign in Blood à POWER TRIP, de Master of Puppets à PANTERA, de Fabulous Disaster à GAMA BOMB. Non, le but de ce petit article sans prétention, est de mettre sous la lumière des albums méconnus, parfois franchement inconnus, mal-aimés, sous-estimés, et qui ne se retrouvent que trop rarement cités dans les listes des « indispensables » dressées par les spécialistes et amateurs. Evidemment, les séries B fameuses en sont aussi partiellement exclues dans la mesure du possible, puisque trop connues, et c’est donc à l’obscur, à l’anecdotique, à l’enterré vivant que cet hommage s’adresse, avec une poignée de disques que certains d’entre vous connaissent surement, mais que d’autres n’ont jamais pris le temps d’écouter, ou eu la chance de découvrir.
En bonne feignasse gauchiste que je suis, j’avais le choix. J’ai néanmoins décidé de classer ces albums par année de sortie, pour garder une cohérence dans la narration. Chaque entrée ne fera pas l’objet d’une chronique approfondie (ce que j’ai déjà fait pour certaines), mais vous donnera quelques informations utiles (label, line-up, production si possible, etc…), et proposera un morceau, que je juge le plus emblématique de sa démarche globale (si tant est que Youtube me permette ce choix dans certains cas). Il est évident que le choix est hautement subjectif, la sensibilité artistique de chacun les rapprochant d’autres œuvres jugées plus pertinentes, tandis que d’autres estimeront ces allusions comme des évidences, leur culture leur ayant permis de découvrir des albums dont de nombreux autres n’auront jamais entendu parler. Cette liste est donc promise à un enrichissement dans le futur, et soumise aux avis/découvertes de notre lectorat qui pensera sans doute que certains titres méritent amplement d’y figurer. Ce dossier n’est donc pas fermé à clef, mais bien ouvert, et tous les commentaires sont les bienvenus, pourvu que comme moi, vous soyez un passionné. Et nul besoin d’avoir connu le mouvement en temps et en heure pour participer !
1 - MORSÜRE - Acceleration Process
Que la controverse soit. Je ne sais pas ce que le nom de MORSÜRE représentait pour vous à l’époque, mais je sais ce qu’il incarnait pour la presse spécialisée : un défouloir, un exutoire magnifique permettant toutes les injures journalistiques possibles. Il faut dire que le groupe d’Argenteuil avait tout fait pour se démarquer du reste de la production des mid eighties. Look sobre, cheveux courts, lunettes de soleil mystérieuses, et musique cryptique sur fond d’apocalypse rythmique. Il fallut à MORSÜRE quelques années pour se stabiliser et enfin enregistrer son premier album, l’un des plus cultes et décriés de l’histoire du Metal français. J’ai eu la chance de le découvrir lors de sa sortie, puisqu’une bande de potes cloutés le passaient à fond sur leur boombox en plein centre-ville : le choc fut énorme et immédiat.
Existant depuis 1981, MORSÜRE a ramé quelques années et changé quelques pièces avant d’enregistrer sa première démo professionnelle en 1984. Je vous conseille d’ailleurs d’y jeter une oreille pour y découvrir les fondements de la musique des français, de la même manière que Hatred Surge donnait de précieux indices sur la jeunesse de NAPALM DEATH. Et c’est en 1985 que le quatuor enfin stable signe un contrat d’enregistrement avec le label Devil’s Records, qui leur permit d’investir le studio Garage à Paris. En résultèrent dix morceaux qui chamboulèrent la donne de l’extrême, mais dont les effets ne furent ressentis que des années plus tard. Devil’s Records joua évidemment sur l’envie de provoquer du combo, et gratifia Acceleration Process du gimmick « d’album le plus Speed du monde ». Ce qui était évidemment faux, mais comme tous les éléments de la batterie de Frank Tadic étaient accordés de la même façon, il était quasiment impossible de faire la différence entre la caisse claire, les toms et la grosse caisse. C’est cette batterie électronique qui fit ranger cet album dans la case des bruitistes géniaux ou des fumistes intégraux. Il est évident que la pseudo vitesse d’exécution a beaucoup joué pour la légende du groupe, mais les morceaux au tempo plus discernable ne manquaient pas de charme, à l’image de l’hymne absolu « Morsüre », que Didier le Serrec hurlait comme un beau diable.
Au niveau des réussites, notons pour la bonne bouche l’instrumental « Et Nox Fracta Est », le tube impossible « Neither Pity nor Remorse », et bien sur le final « Vreder Strack », chanté en Nadsat (la langue utilisée par les Droogies dans Orange Mécanique). Soulignons aussi la performance hallucinante et contre-nature du bassiste Eric Sanson, constamment sur la brèche et nous gratifiant de soli tout à fait convaincants. Le riffing de l’album, très Punk ne présentait pas un grand intérêt, et seul l’osmose surnaturelle entre les musiciens sauvait le tout du naufrage. Imparfait jusqu’à la dernière note, inécoutable pour certains, Acceleration Process se fit traiter de tous les noms d’oiseaux (Hard Force s’était même fendu d’un laïus aussi assassin qu’un sniper russe), et ne connut les honneurs d’une chronique positive que dans les colonnes de Metal Attack, sous la plume de Gil Tadic…frère du batteur Frank. Ceci expliquant cela, mais n’enlève rien au mérite de ces quatre musiciens pas comme les autres. Notons que l’album connut une réédition improbable via NunSlaughter Records et Hells Headbangers, avec une pochette modifiée et la démo de 1984 en bonus (et un livret bourré de photos et d’anecdotes).
Line Up : Eric Sanson - basse, Loran Laurent - guitare, Didier le Serrec - chant et Frank Tadic - batterie
Date de sortie : 1985/Devil’s Records
Recommandations auxiliaires : Aucune
2 - DETENTE - Recognize No Authority
Bien avant les screameuses connues de la scène extrême, existait un petit bout de femme qui crachait ses tripes. DETENTE, groupe californien formé en 1984 n’a pas tardé à faire parler de lui, et devint une valeur sûre de Los Angeles après avoir lâché 3 démos dans l’underground. Mais en 1986, le quintet passa à la vitesse supérieure grâce à l’indépendant Metal Blade, qui lui offrit un contrat menant sur l’enregistrement du légendaire Recognize No Authority. Devenu grand classique avec les années, cet album était le premier à mélanger avec autant de hargne le Thrash et le Punk, sans tomber dans les travers cocasses du Crossover. La voix unique de Dawn Crosby, les riffs imparables et simplissimes de Caleb Quinn et Ross Robinson, la rythmique infernale propulsée par Steve Hochheiser et Dennis Butler permirent à des morceaux comme le meurtrier « Losers » et le furieux « Holy War » de se détacher, faisant de DETENTE une valeur plus que montante du marché. Sorti l’année de Reign in Blood, Recognize No Authority n’avait guère d’équivalent sur la scène de Los Angeles en termes d’intensité, et il faudra un ZNÖWHITE au sommet de sa forme pour tenir la dragée haute à Dawn et ses sbires. Las, ce début fulgurant ne permit pas au groupe de décoller, et les musiciens lâchèrent l’affaire en 1989, avant de remettre le couvert en 2007, puis en 2019. Ross Robinson, Caleb Quinn & Steve Hochheiser partirent former CATALEPSY, du nom d’un des morceaux instrumentaux de DETENTE, mais en connurent guère le succès. Dawn de son côté forma FEAR OF GOD, qui offrit au public deux albums aux destins divers, dont l’impeccable et féroce Within the Veil en 1991 que je vous recommande chaudement. La chanteuse décéda en 1996, mettant un point final à une éventuelle reformation du groupe d’origine. De son côté, si Ross Robinson ne fit pas d’autres éclats en tant que musicien, il devint l’un des producteurs Metal les plus recherchés des nineties, et fut entre autres l’artisan du succès du son Nu-Metal, produisant KORN et bien d’autres.
A noter que Recognize No Authority fut réédité à de nombreuses reprises, la version la plus collector restant celle parue en CD sur Roadracer, dans la collection « Price Killers », atteignant régulièrement les 2 ou 300 dollars sur Ebay ou Discogs. Si vous l’avez et que vous acceptez de vous en séparer pour une somme raisonnable, je suis évidemment preneur.
Line Up : Steve Hochheiser - basse, Dennis Butler - batterie, Caleb Quinn - guitare, Ross Robinson - guitare, Dawn Crosby (R.I.P. 1996) - chant
Date de sortie : 16 août 1986/Metal Blade Records
Enregistré aux Baby-O Recorders, Hollywood
Recommandations auxiliaires : ZNÖWHITE - All Hail to Thee, HOLY MOSES - Finished with the Dogs
3 - MAYHEM - Burned Alive
Evidemment pas de méprise sur ce coup-là, il ne s’agit évidemment pas du TRUE MAYHEM norvégien, ni de Black Metal, mais d’un obscur combo de Portland, Oregon, et responsable d’un seul album. Fondé en 1983, ce quatuor n’avait pas la langue dans sa poche, et proposait une vision de l’extrême assez modérée, mais franchement hilare dans le fond. Musiciens assez capables, les gus nous ont offert via le légendaire label Black Dragon leur seul longue-durée, Burned Alive, à la pochette rigolarde, et au contenu ne l’étant pas moins. Totalement anecdotique, ce LP m’a quand même intrigué pendant des années, l’ayant découvert dans la presse spécialisée de l’époque, mais n’ayant jamais pu mettre la main sur une copie. Dans une optique de Speed/Thrash diffus, aux textes assez directs, mais aussi loufoques (« Aerobic Genocide »), les MAYHEM détonaient dans le paysage de 1987, qui voyait notre musique préférée prendre un virage plus radical, ou beaucoup plus technique. A rapprocher d’une version beaucoup moins violente de WEHRMACHT, ou d’un COVEN moins hermétique, MAYHEM jouait avec les styles, et osait même le non-sens total avec deux reprises du « Ace of Spades » de MOTORHEAD. L’une normale et académique, l’autre passée en 78 tours, et malicieusement intitulée « White Mice on Speed ». L’absurde avait donc droit de cité sur ce LP, dont « 6 Is 9 » assume totalement le choix du contrepied. Mais un morceau comme « Couch Potato », à la basse redondante, et au groove tangible préfigurait déjà MORDRED, tandis que « Face It », jouait la blague de potache dispensable.
Assez déséquilibré et inégal, Burned Alive n’en restait pas moins sympathique, et assez symptomatique de cet underground qui osait alors des choses moins figées et plus abordables. Entre le Speed de WARFARE et AT WAR, et le Thrash américain à la New Renaissance Records, Burned Alive a étonnamment bien tenu l’épreuve du temps, et garde encore aujourd’hui un parfum sympathique de nostalgie. MAYHEM disparaitra après ce coup pendable, et ne refera surface qu’à titre posthume (ou pas ?) avec une compilation des démos de cet album sortie en 2006. A noter que le combo avait déjà commis un premier méfait en tape en 1985 (avec pas mal de titres repris sur Burned Alive), via As The World Burns. Malgré la pelletée de rééditions Thrash des années 2000, Burned Alive ne connaîtra que trois tirages, dont deux en vinyle, et un seul en CD, via US Metal Records en 2005.
Line Up : Craig Lower - basse, Eric Olson - guitare, Matt McCourt - chant et Steven Hanford (R.I.P. 2020) - batterie
Date de sortie : Mars 1987/Black Dragon Records
Recommandations auxiliaires : COVEN - Blessed is the Black, AT WAR - Retaliatory Strike, WARFARE - Mayhem Fuckin' Mayhem
4 - ZOETROPE - A Life of Crime
1987, le Thrash accusait déjà trois ans d’existence discographique, et s’orientait déjà vers des pistes moins radicales…ou beaucoup plus. DEATH avait poussé son premier et ignoble cri via Scream Bloody Gore, POSSESSED trustait le canal satanique, METALLICA au contraire sophistiquait de plus en plus sa musique, SLAYER avait imposé le postulat définitif Reign in Blood, le style connaissait donc ses premières évolutions majeures, et chaque sortie plus ou moins importante était scrutée à la loupe par les spécialistes. Pourtant, cette même année, c’est un album simple, direct et réminiscent des premières années qui secoua l’underground, jouant sur la corde sensible des nostalgiques et de ceux pensant que le Thrash s’accommodait encore fort bien de musicalité et de modération.
ZOETROPE, fondé en 1976, accusait déjà le poids des ans, onze après sa naissance, malgré une discographie encore très chiche. Venant de Chicago, Illinois, le quatuor avait déjà osé un premier long en 1985, l’honnête et efficace Amnesty, mais à vrai dire, peu de gens attendaient au tournant la suite des évènements. Alors membre de la respectable écurie Combat Records, le groupe bénéficiait d’un bon succès d’estime, et sa réputation live lui avait permis d’agrandir sa fanbase, les performances du groupe on stage sentant bon la sueur, l’authenticité, la rage et l’envie d’en découdre via une musique faussement simple, mais réellement riche. Mené de l’arrière-scène par l’incroyable batteur/chanteur Barry Stern, centrale atomique à la Dan Beehler, ZOETROPE pouvait donc s’appuyer sur une incroyable rythmique pour propulser des riffs puristes, directs, mais incroyablement fluides et/ou syncopés. Et ce retour en arrière de la machine Thrash en 1987 plut à beaucoup de monde, dont ceux recherchant désespérément à retrouver des sensations de jeunesse passées plus ou moins à la trappe.
Acheté à l’époque en vinyle chez mon disquaire préféré, A Life of Crime m’avait déjà séduit au moment où j’ai fait glisser sa pochette intérieure hors de son écrin. Avec son habile jeu de mugshots inséré dans une pocheté carton à trous, illustrant aussi les visages des musiciens, ce second album honorait l’histoire de sa ville et ses truands les plus célèbres, alors justement que ZOETROPE était tout sauf un album de criminels artistiques.
Dillinger, Pretty Boy Floyd, Nelson et Machine Gun Kelly exhibaient donc leur faciès peu avenant, et nous invitaient à une plongée dans le monde de la pègre de Chicago, lorsque les différents se réglaient d’une balle bien placée. Et les balles tirées par le groupe étaient bien réelles, comme en témoignait le premier coup porté par « Detention », et ses allusions au demon alcohol. La seule devise du quatuor : la simplicité. Inutile de placer quatre ou cinq riffs lorsque deux suffisent à porter un morceau, inutile d’accumuler les fills et les figures de style lorsqu’un beat steady fait galoper la machine à bonne allure, et inutile de hurler lorsqu’une ligne de chant ferme souligne plus sobrement les textes. A cheval entre le Speed âpre et le Thrash sobre, taquinant le Heavy catchy sans trahir son crédo (« Nasa », au texte sombre, « Company Man » et son groove trahissant les origines des années 70), durcissant soudainement l’atmosphère pour un vol à l’étalage rapide et concis (« Unbridled Energy »), ZOETROPE brillait par sa sobriété et son esprit frondeur, et signait là l’un des meilleurs albums d’une année qui allait pourtant révéler des pièces maitresses du genre. Sans astuce de production, sans gimmick putassier, mais avec des soli brillants et un leader en grande forme, le groupe se plaçait donc en marge de la production globale, et nous offrait l’un des disques les plus sous-estimés de la décennie.
Il fallut attendre six ans pour découvrir Mind over Splatter en 1994, sympathique mais tardif, mais le plus bel achèvement d’une carrière longue de presque vingt ans (1976/1995) restera à jamais ce A Life of Crime, monument de concision et de frappe sauvage.
Line Up : Barry Stern (R.I.P. 2006) - batterie/chant, Louis Svitek - guitare, Kevin Michael - guitare, Calvin "Willis" Humphrey - basse
Date de sortie : 1987/Combat Records
Enregistré aux Music Grinder Studios et au Track Records, Hollywood, Californie. Mixé au Capitol Mastering.
Recommandations auxiliaires : HALLOWS EVE - Tales of Terror, NUCLEAR ASSAULT - Game Over, EXCITER- Heavy Metal Maniac
5 - RECIPIENTS OF DEATH - Recipients of Death
1988, le style existe déjà depuis cinq ans ou presque, et commence à être plus accepté dans le mainstream Metal, presse et public. Tous les cadors ont sorti leur grand-œuvre, ou presque, et le Thrash n’a (presque) plus à pâtir de cette image d’enfant bâtard et indiscipliné que lui ont collé certains magazines (dont Enfer, qui ne s’est pas gêné pour tourner le genre en ridicule dans sa rubrique « Et pourtant, ils tournent ! »). C’est dans ce contexte d’ouverture que le premier EP des américains de RECIPIENTS OF DEATH voit le jour en février 1988, alors justement qu’il incarne certainement tout ce que les amateurs de pur Heavy et les journalistes attachés à la tradition rejettent en masse. Sorti sur le très estimé mais underground label Wild Rags (qui distribuera aussi ORDER FROM CHAOS, NUCLEAR DEATH, IMPETIGO, HEXX, HELLWITCH ou CRUCIFER), Recipients of Death n’était effectivement qu’un méchant concentré de haine, un succédané de SLAYER vitesse grand V, un concurrent sérieux des EXUMER allemands, et donc un produit de contrefaçon destiné à encombrer les étagères du temps, au rayon des chefs d’œuvres en péril. Mais il y avait quelque chose de vraiment démoniaque qui émanait de ce mini LP, quelque chose d’intangible qui en a fait l’un des premiers albums les plus recherchés du marché, comme une rage sous-jacente exprimée par des riffs acides et une rythmique incorruptible. De sa pochette en champignon atomique jusqu’à ses morceaux irréprochables dans la forme, Recipients of Death incarnait la quintessence du Thrash sans concession, basé sur les saccades et la brutalité, mais animé d’une fluidité assez intelligente pour séduire les plus modérés. Sublime en version vinyle, l’objet ne fut pas des plus faciles à dénicher de son vivant, et encore moins à titre posthume.
Entre « Seizure » et son mid tempo écrasant un riff classique mais redondant, et « Necropolis (City Of The Dead) », Thrashcore en diable, le grand écart était facial, et le résultat éclaboussait les tympans. Sans aucune concession, ce premier jet de bile vous faisait fondre les tympans et ridiculisait la concurrence de sa précision dans la bestialité. Pas toujours très carré rythmiquement, mais sauvage et physique, RECIPIENTS OF DEATH de sa Californie natale n’eut même pas les honneurs d’un véritable longue durée, puisque son deuxième chapitre, judicieusement intitulé Final Flight n’était qu’un EP lui aussi. Mais réédité sur le label de truands Black Cobra Records (qui proposa fut un temps de sémillants vinyl rips en CD, avec les grésillements s’il vous plaît), les deux sorties forment une suite très cohérente, et une progression dans le professionnalisme flagrante. Dommage pour les américains, qui auraient mérité plus d’attention de la part de labels souvent peu regardant sur la qualité. Avec un peu de chance, ils auraient pu devenir les SLAYER des années 90.
Line Up : Dead Rich G. - basse/chant, Zac Taylor - guitare, Albert Gomez - guitare, Chris Broguiere - batterie
Date de sortie : Février 1988/Wild Rags Records
Recommandations auxiliaires : EXUMER - Rising from the Sea, GAMMACIDE - Victims of Science
6 - MX - Simoniacal
La simonie consiste en l’achat, la vente de biens spirituels, de sacrements, de postes hiérarchiques, de charges ecclésiastiques ou de services intellectuels. Merci Wikipedia pour ces quelques éclaircissements au moment d’aborder le premier 12’’ des brésiliens de MX. Et puisque nous en sommes aux précisions, sachez que le nom du groupe est tiré de celui d’un missile américain, le LGM-118 Peacekeeper, aka MX missile (pour Missile-eXperimental). Une fois ces présentations faites, passons au vif du sujet. Si le Thrash brésilien a mis du temps à se faire connaitre hors de ses frontières, et qu’il doit beaucoup aux frangins Cavalera pour sa popularité, il reste aujourd’hui basé sur un nombre très restreint de références acceptées. Parlez d’extrême brésilien, et les sempiternels noms viendront immédiatement agrémenter la conversation, qui tournera à n’en point manquer autour de SARCOGAFO, DORSAL ATLANTICA, SEPULTURA évidemment, VULCANO, MUTILATOR, HOLOCAUSTO et peut-être un ou deux autres exemples moins connus. Mais si d’aventure vos glissiez le nom de MX hors du tapis, les mines se ferment, et les plus éclairés esquissent un sourire complice en disant long sur les bonnes impressions dégagées par le combo.
Comme beaucoup de groupes d’Amérique du Sud, les pauvres MX n’ont disposé que d’une distribution confidentielle dans les années 80, et c’est le label Fucker Records, qui ne produira pas grand-chose de notable qui s’est chargé de la promotion intra-muros. Il n’est donc guère étonnant que 1988 ne se soit pas mis à genoux face à ces brésiliens obscurs, qui proposaient pourtant un Thrash efficace, intelligent, délicatement technique aux entournures, et mélodique juste ce qu’il faut pour séduire les fans les plus sensibles. Bien loin de la débauche orgiaque de l’extrême national usuel, les MX s’épanouissaient dans une forme de Thrash plus fine que la moyenne nationale, mais aussi plus diffuse, et loin de la perfection du SEPULTURA à venir. Assez proche d’ailleurs parfois de Schizophrenia (« Satanic Noise »), Simoniacal incarnait l’archétype d’œuvre passée inaperçue à l’époque, pour des raisons de distribution défaillante, mais aussi de production si dense que seuls les meilleurs ne passaient pas à travers les mailles du filet, mais qui a gagné ses galons au fil des années, se retrouvant aujourd’hui dans la position assez agréable d’œuvre culte, souvent citée dans les listes d’albums méconnus mais méritant mieux.
On comprend pourquoi a posteriori, en découvrant ces morceaux moins bas du front qu’il n’y paraissait au prime abord. Se basant sur des saccades franches et des ambitions techniques à peine dévoilées, le quatuor brésilien s’opposait à la grosse majorité de ses confrères, et flirtait même avec la frontière les séparant du Death Metal, grâce à la voix méchamment rauque d’Alexandre da Cunha, batteur/chanteur à la puissance atomique. Impossible de ne pas craquer aujourd’hui pour un morceau comme « Dead World », lapidaire comme du brésilien en colère, mais précis comme du SLAYER de carrière, et si le groupe a persévéré au point d’être encore vivant en 2021 (dernier album paru en 2018, A Circus Called Brazil), s’il a produit des chapitres assez intéressants dans les années 2000, on retient surtout de lui ce Simoniacal, mais aussi sa suite largement à la hauteur (et même meilleure selon certains) Mental Slavery, publié à peine un an plus tard.
Réédités en CD par une pelletée de labels locaux ou colombiens (Marquee Records, Vingança Music, Southamerican Holocaust, Warfuck Records, Sudaca Records), les deux premiers albums du groupe sont disponibles pour un prix tout à fait raisonnable, et sont indispensables à toute discographie Thrash digne de ce nom.
Line Up : Alexandre da Cunha - batterie/chant, Décio Frignani - guitare, Alexandre Prado Favoretto - guitare, Eduardo - basse
Date de sortie : 1988/Fucker Records
Enregistré au Cameratti Studio sur 16 pistes entre février et mars 1988 (Santo André/SP)
Recommandations auxiliaires : ATTOMICA - Limits of Insanity, PANIC - Rotten Church, MX MACHINE - Manic Panic
7 - REALM - Endless War
1988, le Thrash s’est affiné depuis quelques temps, sous l’impulsion des plus grands, et de quelques musiciens plus futés que la moyenne. METALLICA sort son manifeste …And Justice For All, truffé de breaks et de digressions complexes, les esthètes suisses de CORONER ont déjà affolé l’underground élitiste de leur précieux R.I.P, CELTIC FROST a osé l’avant-gardisme avec le controversé Into the Pandemonium, et la jeune génération des HEATHEN, DEATH ANGEL, TESTAMENT a compris que la course à la vitesse était une compétition stérile. Il faut dire que les jeunes américains ont un bagage technique de plus en plus conséquent, et que la rage des débuts à fait place à une violence plus intelligente et construite : on ne séduit plus le public par des approximations bruitistes, mais bien avec des morceaux complexes, mais agressifs.
Les originaires de Milwaukee de REALM l’ont bien compris. Ayant débuté leur carrière au moment où le Thrash explose à la face du monde, le quintet a pris son temps et construit son répertoire via deux démos qui lui permettront de se faire remarquer par le géant hollandais Roadrunner, via sa filiale brutale Roadracer. Cette indication peut sembler anodine, mais Roadrunner gardait pour la bonne bouche les produits les plus puissants, mais aussi les plus originaux pour sa branche. Et si Endless War n’obtint à l’époque qu’un intérêt à moitié poli de la part des média spécialisés, les fans d’un Thrash précieux et technique n’étaient pas dupes : les REALM étaient leurs nouveaux héros, et l’enfant illégitime des VICIOUS RUMOURS et TOKIX.
A l’image de TOXIK, REALM jouait un Power Metal débordant largement de son cadre pour se répandre sur les trottoirs du Techno-Thrash. On le comprendra encore plus facilement lorsque leur second LP heurtera le marché (Suiciety, 1990), mais Endless War plantait déjà les germes de la sophistication. Entre Speed vraiment dense et Thrash lyrique (la voix de Mark Antoni était très proche de celle de Midnight de CRIMSON GLORY, mais aussi de celle de Mike Sanders de TOXIK), ce premier album faisait montre d’une maîtrise absolue, et alternait avec flair les saillies explosives et les longues progressions évolutives. Ainsi, entre la franchise de « Endless War », et la sophistication de « Eminence », proche d’un FATES WARNING sous stéroïdes, le résultat était tout simplement bluffant. « Root of Evil » confirmait cette ambivalence et cette envie de s’extirper de la masse de ses arpèges inquiétants à la TESTAMENT, tandis que « The House is Burning » justifiait la caution Thrash en se référant à la sauvagerie américaine des origines.
REALM a peut-être payé le fait d’être le cul entre deux chaises. Pas vraiment Techno-Thrash parce que pas totalement Thrash, trop violent pour les amateurs de Power et de Speed, le quintet n’a pas su se placer sur l’échiquier de 1988, une année de plus fort chargée en sortie majeures. Heureusement, le temps a réhabilité leur œuvre, qui s’est vue rééditée en deux occurrences par le label polonais Metal Mind et la maison de disques plus ou moins officielle russe CD-Maximum. Les pressages CD d’origine atteignent aujourd’hui des sommes indécentes sur la toile, mais je ne saurais que trop vous conseiller de vous jeter sur les deux albums du groupe, pour avoir un aperçu de la domination américaine de cette année-là sur le reste du monde.
Line Up : Steve Post - basse, Mike Olson - batterie, Paul Laganowski (R.I.P. 2017) - guitare, Takis Kinis - guitare, Mark Antoni - chant
Date de sortie : 8 novembre 1988/Roadracer Records
Enregistré au Breezeway Studios, Waukesha, Wisconsin. Mixé au studio Sonic Art, Lake Villa, Illinois.
Recommandations auxiliaires : TOXIK - World Circus, TARGET - Mission Executed, FLOTSAM AND JETSAM - No Place for Disgrace
8 - RIGOR MORTIS - Rigor Mortis
Comme précisé en amont, la tendance en 1988 était à la sophistication, à l’allongement des morceaux, et à la densification des structures. Les musiciens de Thrash aspiraient alors à plus de reconnaissance du mainstream, et savaient depuis le succès de METALLICA, SLAYER, MEGADETH et ANTHRAX que les charts n’étaient plus forcément une chasse gardée. Alors, les albums devenaient plus complexes, plus ouvragés, mais une petite faction de résistants continuaient à considérer le style sous son angle le plus brutal et viscéral. Ainsi, les texans de RIGOR MORTIS incarnaient le contrepied absolu de cette orientation plus classieuse, et leur premier album éponyme représentait en quelque sorte le refus total de sortir le Thrash de son ghetto pour le rendre plus respectable. Fondé par Harden Harrison (batterie) et Casey Orr (basse) après leur rencontre avec le guitariste Mike Scaccia, RIGOR MORTIS était alors un exutoire musical pour trois jeunes gens passionnés de Gore et de Heavy Metal. Né en 1983, alors que METALLICA venait tout juste de publier son séminal KIll Em’All, RIGOR MORTIS a rongé son frein jusqu’en 1988 pour oser son premier long, après avoir pris le soin de publier une démo sans nom en 1986. Et c’est sur la major Capitol que Rigor Mortis fut proposé au public, un choix plutôt culotté de la part du label, mais assez caractéristique de l’intérêt des grandes maisons de disques pour la cause Metal. Mais avec sa sémillante pochette rouge vif et son crâne jovial, Rigor Mortis mettait immédiatement les choses au point : le Thrash se devait d’être rapide, crade, bon enfant, et vecteur d’expressions adolescentes fascinées par le monde des ténèbres.
Et c’est par un surprenant instrumental que le quatuor nous cueillait à froid, via un « Welcome to Your Funeral » rapide, mais aussi très mélodique. Il faut dire que le groupe pouvait s’appuyer sur la guitare extrêmement volubile de Mike Scaccia, qui n’hésitait jamais à partir en solo, nous gratifiait de sextolets enflammés sur fond d’instrumental déchaîné. Dans le fond et la forme, RIGOR MORTIS n’était pas sans rappeler une version moins satanique et plus ludique de POSSESSED, ce que le terriblement syncopé « Bodily Dismemberment » suggérait sans ambages. Mais en dix morceaux, Rigor Mortis préfigurait la vague des VIO-LENCE et autres amateurs de Thrash supersonique et chanté comme un démon pendant un exorcisme. Produit à la perfection, bénéficiant d’un son dense et abyssal, ce premier album multipliait les actes de violence, et renvoyait la concurrence élitiste à ses chères et chiantes études de solfège. Et des boucheries de l’intensité de « Shroud of Gloom » (proche de MACABRE) ou « Grudge Fuck » (proche du chaos) équilibraient des tentatives plus élaborées comme « Vampire » et son intro en percussions sur basse Punk, ou « Slow Death », qui en remontrait à DARK ANGEL en termes de brutalité.
La suite des aventures fut moins franche, plus expérimentale, mais je peux que vous enjoindre de découvrir le reste de la discographie du groupe, spécialement le mini LP Freaks, haut en couleurs. Mike Scaccia poursuivra sa carrière aux côtés d’Al Jourgensen dans MINISTRY, REVOLTING COCKS et 1000 HOMO DJ’S, avant de décéder tragiquement en 2012. Sept ans plus tard, le chanteur Bruce Corbitt le rejoindra, laissant le line-up du groupe en deuil. Un plutôt bon album de reformation vit le jour en 2014 (Slave to the Grave), mais rien ne parvint à atteindre la folie Gore de ce premier album, que les esthètes et apprentis-bouchers s’arrachent depuis trente ans et plus. Pour information, le CD d’origine de chez Capitol vaut un bras, mais une réédition sur le propre label du groupe vous permettra de garder vos reins.
Line Up : Bruce Corbitt (R.I.P. 2019) - chant, Mike Scaccia (R.I.P. 2012) - guitare, Casey Orr - basse, chant (piste 7), Harden Harrison - batterie
Date de sortie : 19 Juillet 1988/Capitol Records
Enregistré au Dallas Sound Lab, Dallas, Texas. Mixé aux studios The Enterprise & Amigo Studios, Los Angeles.
Recommandations auxiliaires : POSSESSED - The Eyes of Horror, SADUS - Illusions, HOBBS ANGEL OF DEATH - Hobbs Angel of Death
9 - SIEGES EVEN - Lifecycle
Lorsqu’on connaît cet album, et qu’on connaît le parcours du groupe, il est assez difficile d’imaginer qu’il a battu pavillon sous le nom de SODOM pendant trois ans avant de se rebaptiser SIEGES EVEN. En effet, il est très difficile d’imaginer une telle contradiction dans les termes, puisque le premier longue-durée de ces allemands plus fins que la moyenne est considéré à juste titre comme le seul rival possible du chef d’œuvre américain Control and Resistance, des immanquables WATCHTOWER. D’ailleurs, le débat fait rage chez les spécialistes : qui de l’œuf ou la poule est venu le premier, et quid de la paternité du Thrash/Jazz progressif que l’on pensait l’apanage de Ron Jarzombek et les siens ? La question reste en suspens, d’autant que les munichois ont poussé le vice jusqu’à opter pour un titre rappelant un morceau de leurs homologues américains…Mais en dehors de ces querelles de clocher, laissons notre imagination dériver, et pensons que les deux groupes ont eu la même idée et la même technique de mise en place simultanément, ce qui tend à rendre les choses encore plus fascinantes.
Fondé par les frères Oliver (basse) et Alex Holzwarth (batterie), SIEGES EVEN incarne une vision extrême du Techno-Thrash, poussé à son paroxysme. Et il n’est pas difficile de comprendre que le doute ait pu s’installer quand à son inspiration, puisque ce Lifecycle ressemble à s’y méprendre au second longue-durée de WATCHTOWER, son de basse à l’appui, et changements de signatures compris. Les deux groupes partageaient ce goût pour l’équilibrisme, mais aussi pour un chant lyrique ici assumé par le gosier incroyable de Franz Herde, alter-ego très capable d’Alan Tecchio. Sorti le 1er octobre 1988 sur le très estimé label Steamhammer, Lifecycle prit tout le monde de cours, et ne suscita pas beaucoup de vocations à l’époque de sa sortie. Il lui fallut des années et une exhumation par les passionnés du net pour qu’il accède enfin au statut culte qu’il méritait tant, et représente aujourd’hui l’acmé d’un genre que les plus doués ont transformé en art.
Tout comme son homologue américain, le groupe germain n’était pas des plus faciles d’accès, spécialement pour les fans de SODOM, KREATOR, DESTRUCTION ou ASSASSIN, le menu habituel des fans allemands. Sa musique, aussi complexe que celle de WATCHTOWER révélait des capacités techniques dignes de jazzmen aguerris, mais à la différence des texans, les munichois s’enorgueillissaient de cette appellation Metal qu’ils méritaient sans doute plus. Plus puissant et dur que Control and Resistance, Lifecycle n’en était pas moins aussi sophistiqué, avec cette basse en roue libre et cette guitare cristalline, et un morceau comme « David » suffisait à prouver que les deux rivaux étaient en fait sur la même longueur d’ondes. Entre Thrash Progressif et Techno-Thrash vraiment agressif, SIEGES EVEN brouillait les frontières, mais signait un exercice de style d’une densité incroyable, qui aujourd’hui encore, peut tenir à la dragée haute à tous ses concurrents. Une simple écoute de l’épilogue « Straggler from Atlantis » suffisait alors à comprendre que les allemands défiaient avec morgue leurs adversaires américains sur leur propre terrain, et que la bataille n’était pas perdue d’avance. Par la suite, le groupe abandonna évidemment tous ces tics trop chargés et cette connotation Metal trop poussée, pour se rapprocher d’un FATES WARNING en mode musclé.
Mais chaque album du groupe est d’importance, et si ma préférence va en 2021 à des œuvres comme Steps (1991) ou Sophisticated (1995), je garde toujours une place dans mon cœur pour ce premier album, larger than life, et porteur de tous les excès de prétention de la scène. Pour l’anecdote, Alex et Oliver servirent de gunmen rythmiques pour ANGRA, BLIND GUARDIAN et RHAPSODY OF FIRE, le groupe ayant splitté définitivement en 2008.
Line Up : Oliver Holzwarth - basse, Alex Holzwarth - batterie, Markus Steffen - guitare, Franz Herde - chant
Date de sortie : 1er Octobre 1988/ Steamhammer
Enregistré et mixé par Kalle Trap aux Karo-Musikstudios.
Recommandations auxiliaires : WATCHTOWER - Control and Resistance, DEATHROW - Deception Ignored, FATES WARNING - No Exit
10 - TARGET - Master Project Genesis
Vous remarquerez en prêtant attention à cette liste que le Techno-Thrash y est largement représenté. J’avoue une obsession assumée pour le genre, et il n’y a rien de plus satisfaisant pour moi que de remettre des groupes à l’honneur, alors que les sempiternels noms sont cités au moment de dresser la liste des musiciens les plus méritants. A ce petit jeu, la Belgique n’a pas grand-chose à dire, si ce n’est que le plat pays a révélé l’un des candidats les plus doués au concours de l’alchimiste Thrash le plus créatif en la matière. Si les allemands de SIEGES EVEN se tapaient la bourre avec les américains de WATCHTOWER, les belges eux venaient défier les allemands sur leur propre terrain, faisant un joli pied-de-nez à l’un de leurs représentants les plus énigmatiques, MEKONG DELTA. Il n’était en effet pas difficile en 1988 de trouver des similitudes entre ce Master Project Genesis et le The Music of Erich Zann de Ralph et les siens, à la différence près que les belges bénéficiaient d’une production bien plus performante, et d’une énergie plus concrète.
Fondé en 1986 par le guitariste Franky Van Aerde, TARGET ne perdit pas de temps en conjectures, et lâcha son premier album un an plus tard, le solide mais encore un peu timide Mission Executed. Alors empreint de Speed et de Metal, ce premier effort permit au quintet belge de se faire un nom, mais pas de ceux qu’on retient forcément. A l’image de VENDETTA, les TARGET eurent besoin de temps pour affiner leur approche, qui arriva à maturation sur le chef d’œuvre absolu Master Project Genesis. A l’image du concept de studio MEKNG DELTA, TARGET prônait des valeurs d’abstraction, et préférait le classique au jazz pour pimenter ses morceaux. Alors que Ralph Hubert était fasciné par la musique slave et les accents de l’est-européen, les TARGET se concentraient sur un Metal rapide, violent, abstrait, tout en retenue, mais qui savait de temps à autres accélérer la cadence pour mériter son appellation. Ainsi, « Digital Regency » nous ramenait au temps de l’éponyme début de MEKONG, tandis que la longue suite « Absolution By Termination » préfigurait les débordements de plus en plus abscons du The Principe of Doubt à venir. Avec son riff redondant, « Absolution By Termination » singeait les tics du « Eye of the Beholder » de METALLICA, avant de partir en vrille psychédélique. Tout l’album était basé sur un principe de surprise et de contrepied, et la voix assez unique de Guy Degrave était très proche de celle de Wolfgang Borgmann aka Keil pour les intimes.
Il était d’ailleurs assez tentant de voir en TARGET une pâle doublure des MEKONG DELTA (même si les deux groupes partageaient alors le même label, dirigé par…Ralph Hubert évidemment), tant leurs optiques étaient similaires. Mais réduire les belges au simple rôle de doublure temporaire serait d’une injustice rare, d’autant qu’ils n’ont pas eu la même chance que leurs homologues allemands qui ont poursuivi leur carrière bien après les années 80. Avec seulement deux albums au compteur, les TARGET peuvent se targuer de leur statut d’étoile filante très brillante, qui a laissé une trace impérissable dans l’histoire de la musique. Et aujourd’hui, un morceau aussi puissant que « Dehumanization » s’écoute encore avec un plaisir non feint, tout comme « Master Project Genesis », symptomatique de la mode en vogue dans l’Europe des années 87/90. Mélodique, agressif, convaincant, ce second LP est régulièrement cité dans les listes d’albums à réhabiliter, chose qu’il mérite amplement.
Comme beaucoup d’album sortis sur Aaarrg Records, le pressage original en CD est devenu horriblement cher avec le temps (comptez entre 100 et 150€), mais les rééditions High Roller (2017) et Archivist Records (même année) restent des moyens raisonnables de se procurer cet album estimable.
Line Up : Yves Lettanie - chant, Johan Susant - basse/textes, Lex Vogelaar - guitare, Franky Van Aerde - guitare, Christ Braems - batterie
Date de sortie : 15 novembre 1988/Aaarrg Records
Enregistré au Phoenix Studio de Bochum.
Recommandations auxiliaires : MEKONG DELTA - The Music of Erich Zann, DEATHROW - Deception Ignored, MYSTREZ - The Indictment
11 - VENDETTA - Brain Damage
Comme beaucoup de Metal kids des années 80, je me faisais faire des compilations sur tape par des potes, mais j’en achetais aussi en version vinyle. A cette époque-là, les labels aimaient bien offrir aux fans un résumé de leur catalogue, et en sus des légendaires Metal for Muthas, Metal Massacre et autres Speed Kills, existaient de petits samplers sympathiques, proposés par Steamhammer, Roadrunner, Music For Nations, mais aussi Noise International. C’est d’ailleurs sur le Doomsday News des allemands que j’ai découvert une bonne poignée de groupes, dont DEATHROW, SCANNER et évidemment, VENDETTA.
A l’époque, VENDETTA était le poulain type de l’écurie Noise. Son « And The Brave Man Fails » m’avait alerté sur sa capacité à brouiller les pistes entre Speed, Thrash, et Power, et j’avais jugé son premier LP Go And Live......Stay And Die suffisamment intéressant pour l’acquérir. Mais en 1987, le groupe bavarois était encore un peu générique pour déchainer les passions, et c’est donc au rayon des anecdotes plaisantes que je rangeais son premier album. Et dire que rien ne me préparait à sa tonitruante suite serait d’un euphémisme lénifiant. Fondé en 1984, le combo de Schweinfurt était alors un pur produit métallique de son temps, et ses trois démos, bien qu’augurant d’un potentiel certain, ne lui permit pas de se faire remarquer au-delà du cercle des admirateurs du Metal allemand, conformiste, mais plaisant. Néanmoins, Suicidal Lunacy, la maquette de 1986 leur offrit un deal avec Noise, la référence indépendante allemande de l’époque, et c’est aux côtés de TANKARD, CORONER, RUNNING WILD, SINNER, GRAVE DIGGER ou CELTIC FROST que le quintet fit ses premières armes.
Mais intégré au contexte progressif des années 88/90, le groupe changea alors d’optique, et se permit de venir défier les maitres techniques sur leur propre terrain. Ainsi, sous des aspects rigolards (la photo de la pochette arrière reste un modèle à ne pas suivre avec ses grimaces pathétiques), Brain Damage était au moins aussi révolutionnaire que le Deception Ignored de DEATHROW, dans un style moins avant-gardiste, mais pas moins risqué. D’ailleurs, le quatuor mettait immédiatement les choses au point en jouant sur l’opposition d’un titre cliché et rabâché et de son contenu pour le moins choquant. « War » incarnait à merveille la première ligne allemande de sophistication de l’époque, et nous trimbalait pendant huit minutes sur le grand huit de ses rythmiques. Le groupe avait donc opéré un virage à quatre-vingt-dix degrés, pour offrir à ses fans un Thrash technique et touffu, hautement mélodique et alambiqué, mais toujours aussi puissant et efficace. Ainsi, « Precious Existence » jouait sur l’ambivalence entre ballade progressive à la HELLOWEEN et accélération à la DEATHROW, pour mieux prendre le contrepied, et laisser une basse concentrique mener les débats. Le quatuor osait même tremper ses deux pieds dans les eaux de l’instrumental ciselé et énergique avec « Fade to Insanity », histoire de prouver à DEATH ANGEL et METALLICA qu’ils n’étaient pas les seuls orfèvres en la matière.
Faussement jugé à l’époque, l’album reçu d’ailleurs un accueil assez glacial de la presse spécialisée, se voyant taillé dans les grandes largeurs par Metal Hammer, qui ne vit en cette œuvre qu’un exemple type de beauf Metal à l’allemande, laissant le fan circonspect quant à la crédibilité de l’analyse du journaliste qui n’avait certainement pas écouté une seule note de l’album. Mais plus de trente ans après sa sortie, Brain Damage reste un témoignage particulièrement crédible et surprenant de la vague Techno-Thrash, et a même mieux supporté le poids des années que certaines œuvres plus référentielles. Le groupe existe toujours aujourd’hui, même si son dernier album accuse les quatre ans d’existence, et s’épanouit dans un Thrash plus générique et dispensable. Brain Damage reste donc un heureux accident sur le parcours de VENDETTA, qui grâce à une habile compilation promotionnelle, a su trouver sa place dans le cuir des fans de Thrash outre-Rhin.
Line Up : Achim Hömerlein "Daxx" - guitare/chant, Michael "Micky" Wehner - guitare/chant, Klaus "Heiner" Ullrich - basse, Andreas "Samson" Samonil - batterie
Date de sortie : 24 octobre 1988/Noise Records
Enregistré en juin 1988 au Muscilab Studios de Berlin.
Recommandations auxiliaires : PARADOX - Heresy, PYRACANDA - Two Sides of a Coin, LIVING DEATH - Protected From Reality
12 - ZNÖWHITE - Act of God
J’ai toujours appris à me méfier des groupes qui optent pour un tréma dans leur nom. Tous les combos ayant fait ce choix sont soit devenus des légendes (MOTÖRHEAD, MÖTLEY CRÜE, HÜSKER DÜ), soit des outsiders de choix (THE ACCÜSED, DESTRÖYER 666, LȦȦZ ROCKIT etc…). Le cas des américains de ZNÖWHITE n’est donc pas des plus épineux, puisque le mainstream ignore tout de son existence, seule une poignée de thrasheurs lettrés ayant eu connaissance de leur prose musicale. Né en 1982 à Chicago, Illinois, ville de la pègre des années 20, ZNÖWHITE a débuté sa carrière assez prudemment, en accumulant les formats moyens, et c’est en 1984 que All Hail to Thee vit le jour de sa pochette anonyme à la Stendhal. Ce premier jet de bile remarqué par la presse spécialisée laissa rapidement la place à la sortie la plus emblématique du combo, ce Kick 'em When They're Down flanqué d’une énorme tête de mort. Le propos, plus rapide, plus incisif prouvait que les américains se tenaient au courant des tendances, mais malgré la puissance dégagée et l’originalité du chant féminin de Nicole Lee, le groupe peinait à se faire connaître hors de ses frontières.
Il fallut attendre 1988 et une signature sur Roadracer Records, le géant Thrash hollandais pour que ZNÖWHITE devienne autre chose qu’une banale notule de bas de page. Remarqués sur Stars on Thrash, la compilation historique du label et sa pochette magnifiquement ignoble, ZNÖWHITE en profitait pour placer un rageur et fumasse « Baptized by Fire », au son de guitare vrillant les tympans, mais à l’énergie salement débridée. On comprit alors à ce moment-là que le groupe avait des choses différentes à exprimer, et en glissant l’album sur sa platine, on tombait pile sur un « To the Last Breath » à la longue intro intrigante. En densifiant son propos, le groupe de Chicago s’inscrivait de plein fouet dans la vague de radicalisation du Thrash US, et surfait sur la tendance des ATROPHY, GOTHIC SLAM, HADES et TOXIK, leurs partenaires de label.
Mais les ZNÖWHITE, plus intenses et dramatiques que leurs petits camarades, profitaient d’une plus longue expérience pour soigner des compositions qui n’avaient rien de prétextes. Sans véritablement s’enticher d’un Techno-Thrash alors très en vogue, Act of God y trempait ses croches avec plus ou moins d’insistance et préfigurait alors le HOLY MOSES de The New Machine, avec beaucoup plus de vigueur. A la manière de sa consœur Dawn Crosby, Nicole Lee savait chanter ET hurler, sans forcer sa voix, mais en conférant à l’instrumental la solidité et la folie dont il avait besoin. On le sent sur « Pure Blood », manifeste au riff digne de Gary Holt, sur le long et écrasant « Rest in Peace », au son épais et aux accélérations fantasques, mais surtout sur le phénoménal « Something Wicked (This Way Comes) », épilogue de près de neuf minutes, et figure de style assez rare dans le genre.
Plus que technique, le Thrash de ZNÖWHITE était devenu évolutif et d’envergure. Raffiné mais encore assez brut pour convaincre les plus punks des fans de Thrash, Act of God est aujourd’hui devenu un classique accepté et célébré. A noter qu’après le split du groupe, inévitable malheureusement, les trois instrumentistes partirent former CYCLONE TEMPLE, groupe besogneux mais au I Hate Therefore I Am distrayant.
Line Up : Ian Tafoya - guitare/composition, Nicole Lee - chant, Alex Olvera - basse et Scott Schafer - batterie
Date de sortie : 1er avril 1988/Roadracer Records
Enregistré au Chicago Trax. Mixé aux Quad Studios, NYC. Masterisé au Frankford Wayne, NYC.
Recommandations auxiliaires : HOLY MOSES - Finished With the Dogs, DETENTE - Recognize No Authority, ATROPHY - Socialized Hate
13 - SIXTY NINE - Just for the Fun
La Belgique n’était pas forcément le pays le plus représentatif en matière d’extrême et de Thrash durant les années 80. Alors que la Suisse se fit remarquer via HELLHAMMER, CELTIC FROST, CORONER ou APOCALYPSE, alors que le voisin allemand inondait le marché, les amis belges faisaient profil bas, et nous envoyaient les médiocres KILLER, les sympathiques CROSSFIRE, les anecdotiques ACID, ou les demi-bourrins d’OSTROGOTH. Pas de quoi se pavaner, mais au tournant Crossover de la fin des années 80, le pays prit sa revanche de la plus belle des façons. Pour beaucoup, le nom de SIXTY NINE reste une anecdote de listing de concerts dans les magazines spécialisés, ou un bon souvenir live pour ceux ayant eu la chance de les voir. Je n’ai pas eu cette chance, et je le déplore, puisque l’énergie que déployait le groupe en studio devait se voir décuplée dans des conditions live.
Très peu d’infos ont filtré sur les belges, même lorsque Internet est devenu la référence. Quelques pages mentionnent leur nom, mais les SIXTY NINE restent un plaisir mineur pour la communauté mondiale, alors même que leur unique album avait de quoi rivaliser avec les cadors de la Fusion Thrash/Hardcore de l’époque. Pas encore au niveau d’un S.O.D, et plus proche de nos NOMED, SIXTY NINE combinait depuis sa création en 1986 les riffs cycliques et redondants du Thrash et le chant en phrasé type du Hardcore, le mélange détonnant des années 80, popularisé par les SUICIDAL TENDENCIES et bien évidemment ANTHRAX.
De fait, il est assez difficile d’agrémenter une éventuelle chronique d’anecdotes croustillantes. Signés sur le micro-label Pilum Records, qui ne se fit connaître que par eux et les EVIL SINNER (un seul album aussi, mais côté 600 euros sur Discogs, la classe), les musiciens ont donc tout donné, et proposé une version professionnelle de leur formidable démo éponyme parue un an auparavant. Toujours sur la brèche, piétinant en permanence la frontière séparant le Thrash du Thrashcore (« You Gonna Die » s’y vautrait d’ailleurs avec plaisir), le quatuor de Bruxelles alternait les saillies instantanées et courtes (« Uniform »), et les digressions longues et Heavy (« Eternal Life », assez FORBIDDEN dans l’esprit), proposant un panaché fascinant de fraîcheur, et fédérateur de spontanéité. Très à l’aise dans leur créneau, les SIXTY NINE évoquaient une forme plus sérieuse des MUCKY PUP (avec lesquels ils ont fait une mini-tournée si ma mémoire ne me fait pas défaut), et une alternative plus légère au crossover New-yorkais. Un album qui mérite autre chose que le traitement qui lui a été réservé par sa confidentialité, et qui a été réédité à prix raisonnable par Painkiller Records en 2008.
A noter pour la petite histoire que le batteur Philippe Baheux fera par la suite une belle carrière au sein des CHANNEL ZERO, la référence belge absolue des années 90.
Line Up : Patsy H - guitare, Danny Mouethwil - chant, Patrice Harck - basse et Philippe Baheux - batterie
Date de sortie : 1988/Pilum Records
Enregistré et mixé au IIC Studio, Bruxelles, en septembre & Octobre 1988.
Recommandations auxiliaires : MUCKY PUP - Can’t You Tale a Joke ?, NOMED - Like…, EXCEL - The Joke’s on You
14 - HOBBS' ANGEL OF DEATH - Hobbs' Angel of Death
On ne peut pas dire que l’Australie dans les années 80 était un grand exportateur de valeurs sûres. Le style était assez confidentiel sous le soleil austral, ce qui n’a pas empêché quelques musiciens oints d’écran total de tenter leur chance dans la fournaise mondiale. J’aurais évidement pu parler des MORTAL SIN, dont le Mayhemic Destruction hante encore mes rêves avec une régularité rassurante, des plus intimes BEZERKER et de leur Lost assez fameux, des plus tardifs CROMOX, prolifiques et groovy, mais j’ai préféré aborder le cas plus sympathique des HOBBS' ANGEL OF DEATH, dont le nom combinait avec panache la satisfaction égotique et la fascination pour SLAYER. HOBBS' ANGEL OF DEATH était en effet la contraction de deux noms, celui d’ANGEL OF DEATH, le premier patronyme du groupe en 1987, et celui de Peter Hobbs, leader autoproclamé de la bête. Sorte de Blackie Lawless de l’extrême austral, Peter Hobbs menait ses troupes à la baguette, et parvint à nouer un deal avec la référence Steamhammer afin de sortir son premier album en cette prolifique année 1988.
Hobbs' Angel of Death était évidemment à l’époque noyé dans la masse de sorties plus sérieuses, et ne fit pas grand bruit dans les rédactions du monde entier. Hard-Rock Magazine lui consacra un entrefilet poli, plus par goût de l’exotisme que par réelle passion pour ce Thrash jugé trop générique. Il est vrai qu’à l’époque HOBBS' ANGEL OF DEATH n’avait pas grand argument pour se démarquer de la concurrence, entre ses riffs cycliques et ce chant raclé mais raisonnable, ses structures prévisibles et ses breaks l’étant tout autant. Pourtant, Peter Hobbs, ex-TYRUS pouvait tabler sur son sens de l’innovation locale puisqu’il fut l’un des premiers à jouer cette forme de Thrash très européenne, et c’est sans doute ce qui a séduit les labels étrangers. Une fois enfermé dans les fameux Musiclab studios à Berlin, et sous la supervision d’Harris Johns, le gourou national, Hobbs enregistra donc un album authentique, qu’il définit lui-même comme étant du « Virgin Metal », une forme très pure de Thrash dont lui seul avait le secret. Et si à l’époque, le pétard fit long feu, ce sont les années qui ont réhabilité ce morceau d’histoire qui finalement, s’apparente à l’un des meilleurs albums du genre.
Après tout, on ne lâche pas en entame un morceau de l’envergure de « Jack the Ripper » si l’on n’est pas animé du meilleur des pires intentions du monde. Se référant évidemment au radicalisme allemand, à la franchise d’un KREATOR, HOBBS' ANGEL OF DEATH réfutait les théories de nuance du Thrash américain pour découper des côtes dans le filet, et même si Peter faisait parfois preuve de finesse et d’intelligence de composition (« Marie Antoinette », longue suite évolutive de plus de huit minutes), ses influences restaient européennes avant tout, sauf dans le cas des plus frappés d’outre-Atlantique, et notamment DARK ANGEL.
Hobbs' Angel of Death se réécoute très bien aujourd’hui, et si Peter a continué sa carrière tant bien que mal, publiant un album tous les dix ou vingt ans, le diable s’est rappelé à son bon souvenir en 2019, l’emportant loin de nous. Et quoi de mieux pour l’honorer que de jouer sa musique, terriblement vivante, et symptomatique d’une époque où SLAYER et KREATOR représentaient la quintessence de la violence mondiale.
Line Up : Peter Hobbs (R.I.P. 2019) - guitare/chant, Darren McMaster-Smith - batterie, Mark Woolley - guitare, Phil Gresik - basse
Date de sortie : Mars 1988/Steamhammer Records
Enregistré et mixé au Music Lab de Berlin par Harris Johns.
Recommandations auxiliaires : FLAMES - Summon the Dead,DARK ANGEL - Leave Scars, VIOLENT FORCE - Malevolent Assault of Tomorrow
15 - AGONY - The First Defiance
On ne peut pas dire que la Suède dans les années 80 était connue comme le pays du Metal. Niveau exportations notables, la nation pouvait s’enorgueillir du succès intersidéral d’EUROPE évidemment, la star nationale avec ROXETTE, de l’attention mineure portée aux 220 VOLT, et éventuellement, de l’intérêt poli manifesté à l’attention de CANDLEMASS. BATHORY n’était alors connu que d’une poignée de spécialistes bruitistes, et l’extrême venu du froid n’était pas encore la dominante majeure d’une production discographique plus orientée vers les mélodies américaines, quoi que les représentants Hardcore faisaient déjà école. C’est presque par accident que je suis tombé sur le premier et unique LP d’AGONY, paru sur un label que je surveillais de près, Under One Flag, subdivision carnassière de Music for Nations, spécialisée dans les groupes les plus brutaux du marché.
En 1988, le groupe eut les honneurs de quelques chroniques dans la presse, mais rares furent les journalistes à louer les qualités musicales de The First Defiance, qui finalement, fut aussi le dernier acte de défiance de la part des suédois. Les diverses plumes jugèrent l’album hésitant, trop convenu, pas assez rapide, pas assez technique, et finalement, cet ancien groupe Punk retomba dans l’oubli de ses années AGONI (1984/86), alors que son unique témoignage avait valeur de prise de position ferme en l’honneur de la violence made in Bay Area. On trouvait évidemment beaucoup d’inspiration américaine sur cet album, des saccades symptomatiques de METALLICA (« Execution of Mankind » aurait pu figurer sur Master of Puppets pour exemple), des syncopes malicieuses typiques de l’esprit chafouin de Dave Mustaine (« The First Defiance »), mais aussi des ruades caractéristiques de la nouvelle génération des TESTAMENT et DEATH ANGEL sur l’ouverture « Storm of the Apocalypse ». Alors certes, comparé au monumentaux The Ultra Violence ou The Legacy, The First Defiance faisait un peu petit frère moins doué. Mais avec le recul des années, il n’est pas incongru d’y voir aujourd’hui l’un des meilleurs albums du genre.
D’une, de par ses compositions. Classiques, bien agencées, mais aussi basées sur un potentiel instrumental non négligeable. Ainsi, « Night of the Emperor » ouvrait la face B du vinyle avec conviction, et une rythmique plus inventive que la moyenne. Très à l’aise dans le changement de tempo sans annonce, les suédois parvenaient à caser un maximum de plans par morceau, comme le METALLICA de Master, sans pour autant nuire à la cohésion d’ensemble. Et a postériori, il n’est pas incongru de voir en cet album le raccourci le plus parfait entre Master et And Justice, ne serait-ce qu’à cause de cette volonté de multiplier les riffs comme Jésus les pains.
Tout n’était pas parfait, et l’album marquait parfois le pas lorsque les idées s’enchaînaient en pilotage automatique, mais avec sa production immaculée et encore performante en 2021, The First Defiance contenait un lot impressionnant d’idées et d’astuces, et nous laissait sur un diptyque fabuleux, « Madness Reigns » et son riff redondant à outrance, et le smash en uppercut « Deadly Legacy », petit cousin du « Dyer’s Eve » de METALLICA. L’écoute d’AGONY est à notre époque réservée à un petit clan de passionnés qui n’ont jamais oublié les maîtres suédois du Thrash. On regrettera amèrement qu’aucune suite ne fut donnée au projet, à l’heure où la Suède domine les débats sur tous les fronts musicaux.
Line Up : Pete Lundström (R.I.P.) - chant, Magnus Sjölin - guitare, Pelle Ström - guitare, Nappe Benchemsi - basse et Tommy Moberg - batterie
Date de sortie : Avril 1988/Under One Flag
Enregistré et mixé en août/septembre 1987 aux Silence Studios. Masterisé au Trutone Mastering Labs de New-York
Recommandations auxiliaires : STONE - No Anaesthesia!,ATROPHY - Violent by Nature, MORTAL SIN - Face of Despair
16 - GAMMACIDE - Victims of Science
GAMMACIDE fait partie des victimes collatérales d’une guerre de production préférant la quantité à la qualité. Dès que les labels se sont rendu compte que le Thrash pouvait VENDRE, pas une semaine ne passait sans son cortège de sorties toutes plus anecdotiques les unes que les autres. Les gros indépendants sont à blâmer au même niveau que les majors ou les micro-labels, et de cette bataille rangée a émergé une immense fosse commune encombrée de cadavres de groupes plus méritants parfois que ceux ayant survécu. Fondé en 1986 sur les cendres de WARLOCK, combo anecdotique comme un autre mélangeant les reprises et les morceaux personnels, GAMMACIDE désirait combiner ses influences classiques avec une énergie plus contemporaine, et se fit connaitre via le circuit habituel des groupes amateurs, participant même à une « Battle of the Bands », qui leur permit de graver un titre sur une compilation locale au rayonnement restreint.
1987 fut l’année de la première démo, enregistrée aux Pantego Sound studios (pour l’anecdote, les studios Pantego étaient dirigés par un certain Jerry Abbott, père de Vince et Darrell Abbott de PANTERA), démo qui obtint de très bons échos dans la presse spécialisée. Mais c’est en 1989 et après la signature sur le décidément mythique label Wild Rags que l’histoire s’accéléra pour les texans, avec la sortie de leur premier album Victims of Science, qui demeure encore aujourd’hui l’un des achèvements les plus violents et précis du Thrash américain.
Comme toute sortie estampillée Wild Rags, ce premier et unique album de la bande ne leur permit pas de devenir millionnaires, encore moins connus internationalement. Mais en prenant la route pour défendre leur répertoire, et en encaissant leur maigre chèque de royalties, les musiciens purent enregistrer une nouvelle démo quatre titres en 1991, un an avant leur split. Mais alors, qu’est ce qui justifie la présence de cet album dans les colonnes de ce dossier ? Sa qualité bien sûr, son intensité, mais aussi ses particularités, notamment dans la voix assez étrange de Varnam Ponville, chanteur au timbre assez spécial, dans la veine d’un Sean Killian (VIO-LENCE) ou d’un Russ Anderson (FORBIDDEN), loin des vocalistes standard du genre. Musicalement, le groupe respectait un cahier des charges de violence accentuée, avec un rythme montant régulièrement dans les tours, des riffs aux saccades précises et tournoyantes, et si l’originalité était évidemment aux abonnés absents, l’efficacité et l’investissement des musiciens palliaient facilement à ce conformisme ambiant. A l’image d’un RECIPIENTS OF DEATH qui n’avait pas inventé SLAYER mais qui savait le reprendre à sa sauce, GAMMACIDE était l’archétype du groupe capable, dont l’ouvre a fait son office au travers des années. D’autant que les texans jouaient habilement entre toutes les fragrances de la brutalité, se montrant allusifs au Thrashcore le plus chaotique (« Gutter Rats »), pour mieux nous assommer d’une lourdeur suffocante sur « Walking Plague ».
Ajoutez à ceci une mise en jambes sans échauffement, avec l’hymne « Endangered Species » placé en ouverture, et immédiatement suivi d’un létal « Fossilized », des paroles concernées par l’environnement à la manière d’un NUCLEAR ASSAULT, une production propre et un label mythique, et vous obtenez un album diablement efficace, et toujours aussi dense trente ans ou plus après sa sortie. Aussi fous que les VIO-LENCE, aussi agressifs que DARK ANGEL, mais plus rapides que la moyenne, les GAMMACIDE auraient mérité une plus grande exposition. A noter que l’album a longtemps été introuvable en format CD, avant que les labels ne se déchainent pour lui offrir une seconde vie. Les premiers à dégainer ont été les musiciens eux-mêmes, qui ont proposé la première sortie numérique en 2005, avant que les brésiliens de Marquee Records ne leur emboitent le pas l’année suivante. Puis les russes s’y sont mis sous la forme de différents bootlegs, la Chine osant même une réédition tape en 2020.
Line Up : Rick Perry - guitare, Scott Shelby - guitare, Varnam Ponville - chant, Eric Roy (R.I.P. 2001) - basse, et Jamey Milford - batterie
Date de sortie : Février 1989/Wild Rags Records
Enregistré et mixé aux Sound Logic Studios, Garland, Texas, pendant l’été 1989.
Recommandations auxiliaires : RECIPIENTS OF DEATH - Final Flight,VIO-LENCE - Eternal Nightmare, MORBID SAINT - Spectrum of Death
17 - PROTECTOR - Urm the Mad
Certains ne seront pas d’accord, et argueront que les PROTECTOR ont toujours été plus proche du Death que du Thrash. Je ne saurais pas vraiment les contredire, spécialement lorsqu’on parle d’Urm the Mad, l’un des albums les plus sombres et glauques du combo de Wolfsburg. Formé en 1986, le gang n’a pas tardé à se tailler une solide réputation en tant que groupe jusque-boutiste, et chantre d’un son abominable taillé à la serpette. Et c’est après trois démos vraiment hargneuses que PROTECTOR a enfin jeté ses dés professionnels avec le court mais lapidaire Misanthropy, qui leur valut une réputation tout à fait méritée de têtes brûlées du Thrash allemand. Pourtant, les fans européens étaient déjà rodés à la brutalité d’outre-Rhin, grâce aux premiers jets de bile de SODOM et KREATOR, mais force est d‘admettre que les PROTECTOR avaient quelque chose en plus, quelque chose de plus underground, presque de plus Punk, et surtout, une propension à rejeter toute forme de mélodie et un appétit certain pour les BPM.
C’est évidemment Golem qui a vraiment sonné les trompettes de l’apocalypse, mais ce premier long faisait encore preuve d’une certaine retenue. Urm the Mad a vraiment fait fi des derniers principes, au point d’incarner une forme de Proto-Blackened-Thrash, bien avant que le style n’existe. Les magazines parlaient même de guitare jetable (Hard Force), tandis que les fans jubilaient de cette débauche de violence ininterrompue. La réputation du groupe s’est d’abord faite sur un son, très sourd et diffus, et un chant grognon et caverneux, celui de Martin Missy, assez proche des premières exactions BM de Norvège. La réputation a été assise par une propension à rejeter toute forme de technicité trop poussée, pour retrouver l’impulsion d’origine, celle lancée en pâture par les HELLHAMMER et autres chantres d’un Thrash grave et gras.
Pris sous l’aile d’Atom H, le label historique des parias (ACCUSER, RUMBLE MILITIA, SHAH), PROTECTOR a donc joué le jeu à fond avec cet album, qui les a derechef intronisés rois du boucan à l’allemande. Même Tom Angelripper ne pouvait rivaliser avec cette méchanceté épaisse comme un glaviot craché à la face du bon goût, mais les thrasheurs les plus ultimes n’étaient pas dupes : ils avaient trouvé leurs anti-héros, et comptaient bien les soutenir. Avec l’assurance de vendre au moins trois milles exemplaires de chaque album, le quatuor ne se refusait rien, imposait une rythmique nucléaire aux confins du Thrashcore (qui ressemble d’ailleurs au beat BM de base des premières années de MAYHEM), des riffs concentriques interchangeables, et misaient tout sur l’ambiance pour séduire les plus masochistes. Ainsi, après une intro en trompe l’œil mélodique sur « Capitascism », la machine se mettait immédiatement en branle, et accélérait à tout va pour catapulter des parties de guitare sommaires, mais incroyablement efficaces.
Que ce soit en mode missile air-sol ou combat de tranchées, le groupe parvenait toujours à instaurer un climat malsain, sans équivalent sur la scène d’alors. Impossible de comparer facilement les PROTECTOR à certains de leurs homologues sans se ridiculiser, et une simple écoute au poisseux « Quasimodo » permettait de comprendre que les quatre mercenaires ne devaient rien à personne, sauf à BATHORY peut-être, le style le plus proche de leur optique extrême. D’un autre côté, le lancinant et morbide « Nothing has Changed » nous ramenait aux plus grandes heures d’HELLHAMMER, avec son riff traînant et limite Doom et sa complainte vocale post-mortem. Et comme pied de nez final, quoi de plus provocant qu’un énorme « Molotow Cocktail » de cinquante secondes, à la mode « Mon Chéri » de TANKARD, mais moins alcoolisé et plus…corsé.
Black, Thrash, Death, PROTECTOR était tout ça à la fois, et Urm the Mad était la dernière occasion d’apprécier son style initial, avant qu’A Shedding of Skin ne rentre dans le rang avec sa philosophie plus raisonnable. Permettez à votre serviteur de regretter le PROTECTOR des débuts, ce chien fou qui chiait là où bon lui semblait, et qui niquait les accoudoirs de canapé et les armoires sans regrets ni remords.
Line Up : Ede Belichmeier - basse, Hansi Müller - guitare, Michael Hasse (R.I.P. 1994) - batterie, Martin Missy - chant
Date de sortie : Octobre 1989/Atom H. Records
Enregistré en août 1989 aux Phoenix Studios, Bochum.
Recommandations auxiliaires : BATHORY - The Return,HELLHAMMER - Apocalyptic Raids, NUCLEAR DEATH - Bride of Insects
18 - DEFIANCE - Product of Society
Ecouter le premier album de DEFIANCE, c’est comme avoir une fausse impression de déjà-vu. Mais je mentirais en affirmant que la première écoute de Product of Society ne m’a pas laissé indifférent à l’époque. J’avais cru y déceler le dixième album du mois, imitant à merveille les astuces du BIG4, MEGADETH et EXODUS en tête, et pourtant, un arrière-goût me restait en oreilles, une sensation étrange, celle d’être passé à côté de quelque chose de plus important qu’une anecdote. Fondé en 1985, le groupe ne sortira son premier album que quatre ans plus tard, après avoir inondé l’underground de trois démos, toutes plus ou moins recommandables. Enfant légitime du guitariste Brad Bowers, du batteur Matt Vander Ende, et du bassiste Mike Kaufmann, DEFIANCE était à cheval entre la deuxième et la troisième vague Thrash US, contemporains des FORBIDDEN, VIO-LENCE et autres. Mais assez rapidement, et malgré le rayonnement confidentiel de leur premier album, les cinq musiciens se taillèrent une respectable réputation, entachée toutefois de remarques de plagiat envers TESTAMENT.
Accusation que je n’ai jamais comprise, tant les deux groupes étaient très éloignés. Alors qu’à l’époque TESTAMENT se vautrait dans un Heavy Thrash générique et mélodique, les DEFIANCE osaient déjà la perspective progressive et agressive, et signaient l’un des albums les moins immédiats de la scène. Bien qu’originaires de Californie, les DEFIANCE se détachaient de la masse avec un son plus européen que la moyenne, et qui sur cet album rappelait la froideur du HOLY MOSES technique de The New Machine of Lichtenstein. Le son fut d’ailleurs source de discorde entre le groupe et Jeff Waters, leur illustre et ANNIHILATOR producteur, accusé d’avoir ruiné les riffs avec un son de guitare trop propre et faible. Aujourd’hui encore, on se demande comment l’album aurait pu sonner entre les mains d’un Harris Johns ou d’un Alex Perialas, les spécialistes de la console…
Nonobstant ces querelles de clocher, depuis longtemps enterrées dans les souvenirs, Product of Society était comme son titre l’indiquait un vrai produit de son époque. Guitares en saccades permanentes, breaks finauds et bien amenés, soli de qualité, et si ce n’était pour ce chant un peu monocorde et fluet dans la lignée d’un Steve Souza, le tout aurait approché la perfection de très près. Pourtant, le classicisme de l’ouverture « The Fault » ne semblait pas cacher une forêt de créativité, mais en avançant un peu plus dans l’album, on découvrait un groupe en pleine mutation, hésitant encore entre un Thrash purement Bay Area, et un techno-Thrash à la CORONER.
Plus progressif que réellement technique, Product of Society se basait sur une succession d’idées pertinentes et de plans vraiment percutants. Ainsi, avec des morceaux de trois minutes à peine, les américains parvenaient à caser un nombre conséquent de transitions, passant d’un Heavy syncopé à outrance sur « Insomnia » (mélange ANTHRAX/EXODUS tassé) à un Thrash mélodique et pointu sur « Death Machine ». Rois du contrepied discret, les DEFIANCE n’aimaient rien tant que jouer avec le tempo, pour conférer à leurs morceaux une patine évolutive et surprenante. Ainsi, « Lock Jaw » avec son refrain en gimmick et ses contretemps malins, vous faisait valdinguer d’un pied à l’autre, sans savoir sur quel temps commencer à headbanguer.
Rien à jeter sur cet album qui se terminait d’ailleurs par deux bijoux, « Tribulation » et sa basse en circonvolution, et « Hypothermia », très proche d’un MESSIAH joueur et en forme. Le groupe continuera sa carrière, nous offrant avant son premier split deux autres albums, Void Terra Firma en 1990, poussant la recette encore plus loin, et Beyond Recognition en 1992, plus conséquent et épais. DEFIANCE reviendra par la petite porte en 2005, puis en 2019, refusant de jeter l’éponge.
Line Up : Ken Elkington - chant, Jim Adams - guitare, Doug Harrington (R.I.P. 2006) - guitare, Mike Kaufmann - basse et Matt Vander Ende - batterie
Date de sortie : 6 février 1989/Roadrunner Records
Enregistré et mixé en septembre/octobre 1988 au Fiasco Bros. Studio, New Westminster, B.C., Canada. Produit par Jeff Waters (ANNIHILATOR)
Recommandations auxiliaires : HOLY MOSES - The New Machine of Lichtenstein, XENTRIX - Shattered Existence, PARADOX - Heresy
19 - D.B.C. - Universe
Si la justice existait dans le monde de la musique (à l’inverse du monde tout court), les canadiens de D.B.C auraient immédiatement été reconnus comme les pairs de leurs frères d’arme de VOÏVOD. Evidemment, la carrière phénoménale et intègre des seconds parle pour elle, et les D.B.C ne pourront jamais rivaliser sur la durée, eux dont l’existence ne s’est étendue qu’entre 1986 et 1994 (et qui continue aujourd’hui, mais de façon très confidentielle), et dont le parcours n’a été sanctionné que par deux albums. Mais quels albums mes aïeux ! Et finalement, il n’est pas incongru de penser que les D.B.C furent à VOÏVOD ce que TARGET fut à MEKONG DELTA : un quasi alter-ego fabuleux, un sidekick magnifique, une sorte de Poulidor taquinant de sa roue Anquetil sans se faire d’illusion sur l’ordre d’arrivée.
Formé à Montréal en 1986, après avoir battu pavillon FINAL CHAPTER pendant un an, D.B.C ne prend même pas la peine de passer par la case démo, et se jette dans le grand bain via son premier long éponyme. On y découvre alors une formation très en place, encore hésitante sur l’optique à suivre, mais faisant preuve d’une dextérité instrumentale indéniable et d’un culot de composition remarquable. Mais il faudra attendre l’année prolixe 1989 pour voir le loup sortir de sa tanière, et déposer sur le palier de la grand-mère le piège fatal : Universe.
Avec sa pochette rendant hommage à notre O.R.T.F, ce second album des canadiens ne faisait rien pour séduire l’amateur de Thrash beaucoup plus habitué aux dessins de CM2 ou aux crânes sous toutes leurs formes. Mais le contenant décrivait avec acuité le contenu : un Thrash sombre, diffus, expérimental, progressif, envoutant, qui parvenait à synthétiser en un même effort toute la première période de VOÏVOD, avec un soupçon de CORONER pour faire bonne impression. « The Genesis Explosion » mettait immédiatement les choses de travers, à la manière d’un « Experiment » sur le chef d’œuvre Dimension Hatröss. Guitares déviantes, mélodie de biais, empreinte psychédélique affirmée, jusqu’à ce que le chant achève de nous perdre dans le labyrinthe des émotions froides : la voix de Phil Dakin, bassiste/chanteur n’était pas de celles dont le Thrash se repaissait à longueur d’année. Distanciée, sans agressivité, presque déshumanisée, elle servait le propos d’un album futuriste qui considérait que l’univers en était alors à son terme d’agonie.
A la manière de VOÏVOD, D.B.C n’envisageait le Thrash que comme une composante d’expression, et non pas un but. Leurs influences s’étendaient des cadors du genre à la vague Post Punk/Cold Wave des années 80, et prenaient le contrepied de leurs confrères d’EXCITER ou RAZOR. Ici, le Thrash prenait la tangente pour surgir soudainement d’une galaxie éloignée et imposer une accélération Mach 5 époustouflante. Car même si le groupe s’opposait au radicalisme le plus primaire, il ne s’empêchait guère de singer les suisses de CORONER sur « Heliosphere », ou un WATCHTOWER plus simpliste sur « Primordium ». Mais ces emprunts étaient élégants, et surtout, traduits dans un vocable personnel, et donc excusables.
De bout en bout, Universe n’avait de cesse de nous surprendre et de nous bousculer, allant jusqu’à imposer un beat dansant sur « Rise of Man », ou des BPM en rafale sur l’impitoyable « Humanity’s Child ». Précurseur d’une tendance canadienne à l’opacité, les D.B.C brouillaient intelligemment les pistes, et suivaient la leur, qui les emmenait vers un ailleurs que personne n’osait vraiment envisager. Doté d’une production impeccable, bien plus efficiente que celle de Dimension Hatröss, Universe permettait à Combat Records de s’éloigner de la facilité de ses productions habituelles, même si évidemment le rationnement des canadiens était beaucoup plus restreint que nombre de leurs collègues. Et comme l’œuvre de VOÏVOD, celle de D.B.C n’a pas pris une ride. L’apanage des visionnaires, toujours en avance sur leur temps. Ou plutôt, hors du temps.
Line Up : Phil Dakin - basse/chant, Gerry Ouellette (R.I.P. 1994) - guitare, Eddie Shahini - guitare, et Jeff St. Louis (R.I.P. 2019) - batterie
Date de sortie : Mai 1989/ Combat Records
Enregistré en décembre 1988 aux Tempo Studios, Montréal. Mixé aux Amigo Studios, Los Angeles.
Recommandations auxiliaires : VOÏVOD - Dimension Hatröss, OBLIVEON- From This Day Forward, CORONER - Punishment for Decadence
20 - BELIEVER - Extractions From Mortality
Lorsque STRYPER est descendu du paradis, les hordes métalliques découvraient avec horreur que le Seigneur avait des considérations décibelliques à mettre en avant. Certes, le Hard-Rock des guêpes ne risquait pas de détrôner dans le cœur des païens WASP ou IRON MAIDEN (comme ANGEL n’avait pas réussi à renvoyer KISS en enfer la décennie précédente), mais l’existence même de ce qu’on appela rapidement le White Metal avait de quoi interpeller. D’une, parce que les thématiques usuelles du Heavy Metal (indépendance, rébellion, mort, souffrances, blasphèmes, clous et patches) étaient fort éloignées de la bondieuserie de ces musiciens un peu trop bien coiffés. De deux, la musique de STRYPER, doucereuse et bienveillante avait de quoi faire passer BOSTON pour un groupe de Grind avant l’heure. Mais ce chef de file cachait d’autres prédicateurs beaucoup moins portés sur le manichéisme musical, et un sous-genre totalement improbable naquit alors : le White Thrash. Après tout, ne pouvait-on pas être chrétien et être fan de METALLICA et SLAYER ? La question ne resta pas longtemps en suspens, et la réponse vint en un tonitruant cri du cœur de la part de groupes comme DELIVERANCE, VENGEANCE RISING, MORTIFICATION et…BELIEVER.
Remarqués une fois de plus sur un habile sampler de chez Roadrunner en 1990, At Death’s Door, les originaires de Colebrook en Pennsylvanie existaient déjà depuis quatre ans sous le nom de BELIEVER, après avoir officié deux ans sous baptême DECEIVER. Et c’est en 1989 que les quatre musiciens publièrent leur première déclaration d’intention sous la forme de neuf psaumes dédiés au Christ et aux pêcheurs que nous étions, Extractions from Mortality. Sorti sur le label spécialisé dans la musique chrétienne R.E.X Music, ce premier album assimilé alors au Death Metal proposait au contraire le compromis le plus efficace entre les témoins de Jéhovah et le Thrash, pimentant la violence de conversion d’un brin de Death pas totalement assumé. Mais soyons clair. Les BELIEVER n’ont jamais été un groupe de Death. Soyons clair aussi, ce premier album est très loin d’être leur meilleur, prix que les fans décernent en masse et à l’unanimité à Dimensions, sorti quatre ans plus tard. Mais en tant que défouloir et assurance de la crédibilité du mouvement White Thrash, Extractions from Mortality se posait sur la table comme un missel près des bancs de l’église.
Fondamentalement classique, cette première épitre combinait la force de frappe de la Bay Area, et la méchanceté alors en vogue en Floride. Mais les riffs de BELIEVER étaient purement Thrash, comme le démontrait l’ouverture tonitruante et bénie de « Unite », hymne à l’union de quasiment sept minutes à l’intro époustouflante. Sur cet album, les musiciens combinaient la persuasion du Heavy violent et la (dé)cadence du Thrash le plus débridé, au point de nous pondre un hymne Thrashcore de la trempe de « Blemished Sacrifice », tuerie intégrale sur tempo épileptique. « Not Even One », le morceau que l’on retrouvait sur la fameuse compilation At Death’s Door jouait au contraire le côté catchy et saccadé d’EXODUS. Mais ce qu’on appréciait le plus chez ces jeunes gens était leur capacité à cacher leur côté progressif sous une épaisse couche de violence. De fait, « Shadow Of Death » et « Extraction from Mortality » anticipaient avec discrétion les débordements expérimentaux et lyriques à venir, et préfiguraient doucement de l’avènement d’un des plus grands groupes de Thrash progressif du monde, celui que Sanity Obscure allait faire connaître un an plus tard.
Je garde une affection particulière pour ce premier album, ne serait-ce qu’à cause de la voix unique de Kurt Bachman, hurlée à plein poumons, comme celle d’un prêtre pratiquant un exorcisme. Mais je concède bien sûr que la suite de la messe a converti beaucoup plus de fidèles que ce premier sermon, encore un peu gauche, et trop « dans le rang ».
Line Up : Kurt Bachman - chant/guitare, Joey Daub - batterie, Howe Kraft - basse et Dave Baddorf - guitare
Date de sortie : 1989/ R.E.X. Records
Enregistré aux Morning Star Studios de Spring House, Pennsylvanie.
Recommandations auxiliaires : ANACRUSIS - Suffering Hour, TOURNIQUET- Psycho Surgery, DELIVERANCE - Weapons of Our Warfare
21 - NOMED - Like
Lorsqu’on parle d’extrême français dans les années 80, les sempiternels noms tombent sur le paillasson de la mémoire. Les éternels LOUDBLAST, AGRESSOR, MASSACRA, DEATH POWER pour les plus connaisseurs, mais un nom semble éternellement oublié dans les limbes des neurones. Pourtant, le nom de NOMED devrait servir de cas d’école à tous les musiciens et passionnés voulant en apprendre plus sur la perfection du crossover. Formé au Havre en 1986, le groupe est passé par plusieurs phases et plusieurs baptêmes, naissant SWORD, puis devenant OXYDE, avant d’opter définitivement pour NOMED, qui comme chacun le sait n’est rien de plus que DEMON écrit à l’envers. Le trio a pourtant toujours fait les choses à l’endroit, se forgeant d’abord une solide réputation dans le circuit des salles locales, publiant pas moins de quatre démos avant de nous frapper de plein fouet via l’EP Troop of Death, salué des amateurs comme le classique éternel qu’il sera toujours. Mais aussi puissant et percutant fut cet EP, il n’était qu’un solide apéritif en attendant le plat de résistance Like…
Il m’a fallu exactement trois minutes et quarante-trois secondes pour faire de NOMED l’un de mes groupes fétiches. Les trois minutes et quarante-trois secondes de « Is It a Dream? », qui soulignait avec beaucoup de naïveté l’impression que laissait cet album sur les chanceux ayant pu l’écouter. Sorti sur le label national Putrefaction Records à 1100 exemplaires et pas un de plus, Like était la réponse française aux attaques Crossover internationales, et l’assurance que notre beau pays savait s’adapter aux nouvelles tendances sans avoir à copier ses voisins. En écoutant l’album, on sentait évidemment quelques références évidentes à tout amateur sérieux de Thrash et de Hardcore, mais je mets pourtant n’importe qui au défi d’affirmer que les havrais s’inspiraient d’un groupe en particulier, au point de l’évoquer inconsciemment dans leurs compositions. Bien sûr, on ne pouvait manquer de parler de la scène de NYC, de S.O.D, de NUCLEAR ASSAULT, d’EXCEL, de D.R.I, mais aucun de ces modèles n’a servi de moule à ce tour de magie sonore qu’était ce premier album. Conçu le plus sérieusement du monde pour se marrer, Like démontrait que l’humour et la violence faisaient bon ménage, et pas seulement chez ANTHRAX. Ici, pas question de galéjades en short, pas question de grimaces pour faire marrer la plèbe, du Mosh certes, mais du Mosh fluide, des compos spontanées mais léchées, et un son exemplaire, à la basse gigantesque et à la batterie profonde et matte.
Ajoutez à ça la voix très tongue in cheek de Jean-Luc Provost, bassiste/chanteur essentiel et frontman assumé, et vous obtenez l’un des groupes les plus créatifs de sa génération. Les riffs du regretté André Lemesle, loin de pomper Gary, Kerry, James ou je-ne-sais-qui utilisaient les graves, les sifflantes, les harmonies, les saccades surnaturelles, et formait avec la basse de Jean-Luc un tandem incroyablement performant. En dix-sept morceaux, les havrais commettaient un sans-faute incroyable, passant du hit en gimmick romantique (« Klootzak »), au Thrash Heavy et solide comme du PRONG sous acides (« New Project »), en passant par la blague en clin d’œil supersonique (la reprise du Pink Panther de Henry Mancini), et le pavé Heavy à faire valser vos dents sur deux quartiers (« Too Far, Too Late »).
Drôles, excellents musiciens, volontiers portés sur la boutade qui tue (« Flower », ULTRA VOMIT, prenez-en de la graine), lettrés es-extrême (« Like » et son riff d’intro qui gratte les genoux), les NOMED étaient les potes que nous avions peut-être tous, que l’on soutenait en répétition et sur scène, et avec qui on allait boire une bière en semaine. Des mecs simples, sympa, doués, qui auraient mérité bien plus qu’un succès d’estime, car ils avaient la capacité d’en remontrer aux plus grands groupes étrangers.
Line Up : Jean-Luc Provost - basse/chant, Patrick Lemesle - batterie, André Lemesle (R.I.P. 2008) - guitare
Date de sortie : 1989/Putrefaction Records
Enregistré aux Ketchup Studios en mai/juin 1989
Recommandations auxiliaires : S.O.D - Speak English or Die, EXCEL - The Joke’s on You, WEHRMACHT - Beermacht
22 - CALHOUN CONQUER - Lost in Oneself
On a tous un album que l’on croit être le seul à connaître, pendant des années. Comme si l’on faisait partie d’un cénacle secret, étalé dans le monde entier, une sorte de loge maçonnique métallique dans laquelle tous les membres sont des sages inconnus qui ne savent rien les uns des autres, mais qui se reconnaissent d’un signe. Jusqu’à l’avènement des réseaux sociaux, je pensais ainsi être le seul en France à connaitre le groupe suisse CALHOUN CONQUER, et pour cause. Fondé en 1987 à Zurich, ce trio totalement inconnu du grand public n’a eu le temps de sortir qu’un unique album, paru en sus sur le label allemand d’initiés Aaarrg Records (les collectionneurs sauront immédiatement apprécier la rareté de leurs sorties en CD…), qui ne bénéficiait pas de la distribution la plus effective hors de ses frontières. Mais il n’est guère étonnant que l’omnipotent Ralph Hubert se soit intéressé à ce groupe sorti de nulle part : sa musique devait lui évoquer ses propres errances classico-progressives dans MEKONG DELTA.
CALHOUN CONQUER fait donc partie de ces one-album-wonders que le Metal a connu en masse. Et à l’instar de leurs collègues de label TARGET ou MEKONG DELTA, les suisses pratiquaient un Metal abscons, à moitié technique et progressif, et à moitié psychédélique, permettant aux fans de VOÏVOD et de WATCHTOWER de s’unir dans un même élan d’amour. Il était assez difficile à l’époque de s’immerger en toute confiance dans les eaux troubles de Lost in Oneself. J’en veux pour preuve l’écoute assez éprouvante du morceau « You Mean Nothing », qui recoupait les données des japonais de DOOM, la fascination cartoon d’Away, et les obsessions rythmiques de CORONER, opacifiant le tout d’un chant plaintif à la Tom Warrior, époque Into the Pandemonium. En quelque sorte, CALHOUN CONQUER ne faisait pas grand-chose pour séduire les masses, certes déjà rompues à l’exercice du Techno-Thrash, mais encore réfractaires aux expérimentations les plus poussées.
Et la froideur apparente d’un « Torturer » ne les a pas aidés outre mesure. En adoptant la fluidité rythmique des D.B.C et leur froideur de ton, les zurichois se mettaient les puristes de la violence à dos, créant une sorte de Proto-Post-Thrash trop en avance sur son temps, et pourtant puissant. Mais le découpage de l’album, l’hétérogénéité des pistes (allant de quarante-sept secondes à presque six minutes), le grand écart entre les approches (« Portals of Delirium » aurait pu s’évader d’un album de Joe Satriani composé avec Larry Lalonde) jouait en leur défaveur, mais créait pour l’éternité une œuvre complexe, adoubée par les passionnés, et adulée par les fans d’un Thrash intelligent, hermétique, et à la force centripète.
Certains morceaux plus francs, à l’instar de « Psycho Trap », rappelaient le meilleur des accès de colère de MEKONG DELTA, reprenant à leur compte les recettes du magique « Hatred », de The Music Of Erich Zann. Les parallèles entre les deux groupes n’étaient pourtant pas si nombreux, les suisses adoptant une vitesse de croisière supérieure, et une densité de ton plus profonde. Ainsi, « Worlds in Collision », tapait dans le mille d’un CORONER, tandis que le final « Diane » jouait la nostalgie amère des HUSKER DÜ, en une reprise torturée mais cathartique. Le groupe se sépara dans les faits en 1994, et mis à part le guitariste Christian Muzik, qui trouva refuge au sein de BABYLOND SAD, nul n’eut d’autres nouvelles du trio. Dommage, une suite plus progressive encore aurait peut-être converti plus de fidèles mais en tant que seul témoignage de CALHOUN CONQUER, Lost in Oneself reste un petit miracle de l’histoire, et un secret bien enfoui qu’on se transmet entre initiés.
Line Up : Geri Christian Gerling - chant, Christian Muzik - guitare/percussions/programmation, Stefan Gerling - basse/percussions/programmation
Date de sortie : 1989/Aaarrg Records
Produit par Harris Johns.
Recommandations auxiliaires : D.B.C - Universe, DOOM - Complicated Mind, MEKONG DELTA - The Principle of Doubt
23 - STONE - No Anaesthesia!
Seul représentants finlandais de ce dossier, les STONE n’en sont pas moins l’un des cas les plus intéressants. Fondé en 1985 à Kerava, le groupe s’est vite distingué par son sens du chaud et froid, et par sa tendance à graviter dans diverses sphères. Après deux démos sans nom, et une poignée de singles, le combo se décide enfin à sortir son premier longue-durée, éponyme, sur le label national Megamania. Avec sa pochette ridicule dessinée par le petit Lars, 8 ans, fasciné par le Projects In The Jungle du PANTERA Glam, Stone n’attirait pas vraiment le chaland, ce qui représentait un handicap certain au moment de conquérir un nouveau public. Heureusement, la musique, beaucoup moins brouillonne et puérile savait capitaliser sur l’héritage de la Bay Area, et se rapprochait d’ailleurs vaguement des voisins suédois d’AGONY.
Mais c’est un an plus tard, en 1989, que les choses commencèrent à devenir sérieuses. Toujours sur le même label, et toujours aussi peu sûrs au niveau des goûts graphiques (ce dentiste fou était vraiment pathétique, et l’est toujours d’ailleurs), les finlandais passaient à la vitesse supérieure niveau composition, mais aussi production et interprétation. Toujours aussi à l’aise dans leur créneau très personnel, les musiciens délivraient donc une partition chargée de Thrash à la OVERKILL, d’un brin de liberté sauvage à la MOTORHEAD, de fluidité typique de METALICA, le tout agencé pour sonner comme le plus parfait exemple de faux Techno-Thrash fourbe, mais efficace. Se reposant sur un travail de riff remarquable, et la présence d’un bassiste acharné et volubile, l’album osait à peu près tout, et des duels à n’en plus finir, placés judicieusement pour permettre aux breaks futés de casser le rythme (« Empty Corner »).
Accueillis par l’ambiancé « Sweet Dreams », qui heureusement réveillait plus qu’il n’endormait, No Anaesthesia! démarrait sur les chapeaux de roue, avec un growl de bon aloi, annonçant une rythmique pur Heavy Metal US. Conscient d’avoir une carte à jouer, les musiciens se permettaient beaucoup de choses, de l’intro TESTAMENT sur le progressif « Back to the Stone Age », qui dégénérait assez vite en boucherie MEGADETH grand cru, jusqu’au title-track de proportions gargantuesques, s’étalant sur plus de dix minutes de créativité fumeuse. Synthèse de l’art du nord pour accommoder à sa sauce les recettes américaines, ce morceau n’était rien de moins qu’un petit chef d’œuvre de Thrash évolutif et groovy, avec en exergue ces riffs amples, et cette rythmique au biseau. Doté d’une production gigantesque, l’album se laissait apprécier dans ses moindres détails, et préfigurait même parfois les concessions radiophoniques de géants américains à venir (« Light Entertainment (Good Old Times) »)
Parfait de bout en bout, bouillonnant et inventif, musclé et fluide, No Anaesthesia! est un trésor à découvrir d’urgence, d’autant que STONE nous a gratifiés d’une suite tout à fait dans le ton (Colours en 1990), et d’un épilogue encore plus culotté (Emotional Playground). Assez comparable dans les faits à une version simplifiée d’ANACRUSIS, STONE reste l’une des légendes les mieux gardées de Finlande, et plus prosaïquement, un groupe à réhabiliter d’urgence.
Line Up : Janne Joutsenniemi - chant/basse, Roope Latvala - guitare, Jiri Jalkanen - guitare, et Pekka Kasari - batterie
Date de sortie : 1989/Megamania
Enregistré et mixé aux MTV studios en 1989. Produit par Mikko Karmilla et STONE
Recommandations auxiliaires : ARTILLERY - By Inheritance,ANTIDOTE - The Truth, PRESTIGE - Selling the Salvation
24 - OUTRAGE - Blind to Reality
Le Japon Metal dans les années 80. Allez-y, réfléchissez bien, mais à l’époque, difficile de connaître autre chose que LOUDNESS évidemment, VOW WOW éventuellement, ou EZO pour les plus pointus. On pourrait arguer de la condescendance européenne et américaine envers ce pays peu connu pour ses dons Rock, mais il faut surtout parler du marché intérieur japonais, qui n’exportait pas grand-chose vers nos contrées. Les labels nippons réservaient en effet leurs groupes à leurs disquaires, convaincus que leur potentiel ne pouvait rivaliser avec celui des cadors US ou anglais/allemands. Invitation, Victor, ou même les branches locales de major comme Polydor préféraient jouer la sécurité, et ne pas tenter le diable. Et sans faire de voyages au pays du soleil levant, impossible de connaître la fertilité de sa scène, découverte bien plus tard grâce à Internet. Je l’avoue, comme tout le monde, j’ai découvert les OUTRAGE sur le tard, le très tard même, en chroniquant un de leurs albums contemporains, enfin disponible chez nous par le jeu de la promotion virtuelle. Et en écoutant l’un de leurs derniers albums, j’ai eu envie d’en savoir plus sur eux, en me penchant sur leur discographie 80’s.
Formé à Nagoya en 1982, OUTRAGE a attendu 1988 pour sortir son premier album, le déjà performant Black Clouds (que je vous recommande évidemment). Evoluant dans un registre de Speed/Thrash très agressif, les japonais avouaient implicitement l’importance de METALLICA et SLAYER dans leur éducation musicale, et maniaient le riff saccadé avec un flair incomparable. Mais c’est véritablement Blind to Reality qui leur fit passer un cap, ce second LP se montrant d’une solidité incroyable et d’une puissance bluffante. Au moins aussi bon que les réalisations majeures de pays occidentaux, meilleurs que la plupart de nos seconds couteaux, les japonais se permettaient de jouer avec assurance un style né bien loin de chez eux, et faisaient preuve d’un investissement incroyable en termes de composition et d’interprétation.
Caché sous une pochette pour le moins anonyme, et décalée pour le genre, Blind to Reality était un modèle de métissage, un petit miracle de Crossover entre toutes les nuances de violence en vogue à l’époque, tout en gardant une musicalité prononcée. Mais il fallait une sacrée dose de culot pour placer en seconde position sur le disque un titre aussi ambitieux que « In His Steel Claw », aussi développé que le METALLICA d’And Justice, et concentré comme celui de Master of Puppets. Modèle de composition progressive, ce morceau en disait long sur le potentiel des OUTRAGE, qui sur cet album atteignaient un point de perfection enviable. Totalement Thrash et pourtant perméable aux harmonies du Heavy national à la LOUDNESS, Blind to Reality représentait l’achèvement global de la vision évolutive du Thrash au Japon, et se reposait sur de très longues compositions, dont deux de plus de huit minutes, et un final de onze. L’influence METALLICA était parfois plus évidente, comme sur « Call of the Hunter », démarquage à peine maquillé de « For Whom the Bell Tolls », mais OUTRAGE possédait une personnalité suffisamment affirmée pour pondre un petit miracle comme « Nowhere to Run ».
Dans la forme, Blind to Reality sonnait comme un album des Four Horsemen joué par le SLAYER de Season in the Abyss. Doté en sus d’une production aussi performante que celles de Rick Rubin, cet album aurait mérité une distribution internationale pour montrer à l’occident à quel point le Japon était devenu un pays à prendre au sérieux. Découvert en 2021, il n’a pas perdu une once de puissance, et incarne toujours le premier acte du réveil japonais, qui n’allait pas tarder à devenir LA référence des nineties.
Line Up : Yoshihiro Yasui - basse, Shinya Tange - batterie, Yousuke Abe - guitare, Naoki Hashimoto - chant
Date de sortie : 7 avril 1989/Polydor Japon
Enregistré au Studio Key-Stone. Produit par OUTRAGE
Recommandations auxiliaires : FLOTSAM & JETSAM - When The Storm Comes Down, PARADOX - Product Of Imagination, REALM - Suiciety
25 - OMNITRON - Masterpeace
Second représentant suédois de ce petit dossier, le projet OMNITRON, vendu comme un concept neuf lors de sa sortie, et qui cachait pourtant un autre groupe bien connu de la scène scandinave. J’ai d’ailleurs longuement hésité à vous parler de cet album, ou du précédent, signé sous un autre nom, celui des mythiques THE KRIXHJÄLTERS. Mais quel que soit le baptême que vous préfériez de ces suédois, ils auront marqué l’histoire sans se montrer vraiment productifs, puisque toute leur carrière n’a été sanctionnée que par…deux albums. Fondé en 1982 à Stockholm, THE KRIXHJÄLTERS prônait des valeurs de métissage, offrant au Thrash, au Hardcore et au Punk un point de convergence froid comme un hiver d’un semestre. Evilution, et son jeu de mots plus ou moins habile était déjà une sacrée découverte pour l’époque (encore fallait-il mettre la main dessus), les musiciens suédois y avouant une passion pour la culture américaine, transposée dans un vocale totalement scandinave. Mais c’est finalement Masterpeace qui a remporté le morceau, puisqu’il reste l’un des albums les plus improbables du style, et certainement le plus addictif dans l’incongruité.
THE KRIXHJÄLTERS/OMNITRON, un combat qui n’en était pas un, pour un seul vainqueur. Affublé à l’époque d’un gros sticker sur sa version vinyle, Masterpeace était vendu comme un album « plus rapide que SLAYER, plus Heavy que PRONG, et plus original que les RED HOT CHILI PEPPERS ». Seule l’une de ces assertions était vraie, la dernière, puisque Masterpeace ne pouvait rivaliser ni avec PRONG, encore moins avec SLAYER, même si son Metal extrême qu’on aura toujours du mal à définir comme du Thrash était unique en son genre, et terriblement intrigant.
Basé sur une ouverture d’esprit le confinant parfois au bordel organisé, cet unique LP faisait preuve d’un culot incroyable en termes de juxtaposition d’instrumentations. Très intelligents, les musiciens avaient pris soin de placer en ouverture l’un des titres les plus ouvertement Thrash de leur répertoire, « The Power Line ». Mais les arrangements aquatiques, acoustiques, les cassures rythmiques, les changements de ton aiguillaient tous sur la piste d’un crossover débridé, et animé d’une volonté de choquer les plus conformistes. Cette philosophie trouvait son apogée sur le surnaturel « Lucifertility » (les suédois adorent les jeux de mots…), véritable démonstration de camouflage musical, qui nous offrait dans le désordre un break rappé, des voix d’enfants, un solo de saxo (le must pour l’époque, gimmick devenu banal aujourd’hui), et une collection de riffs à faire frémir le grand Gary Holt.
Entre option évolutive, progressive, et avant-gardiste, cet unique album était un miracle en soi, puisque outre son originalité, c’était sa cohérence dans la démence qui frappait le plus. Même si parfois, les musiciens donnaient le sentiment de forcer le trait, les chansons en étaient vraiment, et accrocheuses, comme ce « Rock Drill / Iron Ration », truffé de wah-wah, de Rap, de plans Thrash, et de superpositions vocales rieuses. Attaque Thrash décomplexée (« Triumph of What »), ambiance pesante et suffocante (« Five in Four »), production incroyablement aérée et claire, Masterpeace était un OVNI survolant le paysage extrême un peu trop conformiste de l’époque, et préfigurait les délires Fusion des années 90. Sans équivalent sur la scène, ni lors de sa sortie, ni aujourd’hui, il reste le témoignage d’une Suède s’affirmant avec les années, et presque prête à prendre le leadership mondial de la production décalée. L’aventure OMNITRON ne dura qu’une paire d’années, avant que Pelle Ström et Rasmus Ekman ne partent fonder COMECON. Mais ça, c’est une autre histoire, et moins drôle.
Line Up : Pontus Lindqvist - basse/chant, Stefan Kälfors - batterie, Pelle Ström & Rasmus Ekman - guitares
Date de sortie : 1990/CBR Records
Enregistré et mixé aux B3B Studios, Stockholm, mai/juin 1990.
Recommandations auxiliaires : THE KRIXHJÄLTERS- Evilution,MORDRED - In This LIfe, PSYCHOTIC WALTZ - A Social Grace
26 - CYCLONE - Inferior to None
Etrangement, lorsqu’on tombe sur une liste des chefs d ‘œuvre oubliés du Thrash, on trouve toujours quelque part le légendaire Brutal Destruction de CYCLONE. Mais beaucoup plus rarement leur second LP, Inferior to None, qui était pourtant Superior to Anyone. Ceci expliquant cela, cet album majestueux de violence a pâtit de la confidentialité de sa maison de disques, au point que les fans du groupe avaient même du mal à le trouver. La suite est connue, dépôt de bilan, vinyle et CD passés aux oubliettes de l’histoire, et une fin d’aventure franchement triste au vu du potentiel du groupe de Vilvoorde. Fondé en 1981, CYCLONE a connu une carrière assez emblématique de tous les seconds couteaux des eighties. Démarrage pénible, changement de nom, démos qui s’accumulent, avant enfin le contrat qui va tout changer, signé avec le gros indépendant qui monte Roadrunner. Le résultat, un Brutal Destruction qui donne encore des suées aux amateurs d’un Thrash raffiné mais costaud, et qui reste encore aujourd’hui l’un des albums les plus recherchés du créneau.
Avec un tel démarrage et le soutien du label hollandais, les choses auraient du être lancées pour de bon, et pourtant, CYCLONE ne publiera rien entre 1986 et 1990. Et alors que la plèbe les pensait disparus pour le compte, le groupe est sorti de nulle part sur un micro-label pour tenter de reprendre ses droits, avec l’un des albums les plus solides de l’année 90, pourtant bien chargée en sorties majeures. Pensant sans doute reprendre là où ils s’étaient arrêtés, les belges, armés d’une livraison solide en Thrash à l’allemande ont subi le sort des pauvres combos dépendant d’une structure aux épaules trop fragiles, et certains témoins de l’époque pensent encore que les belges n’ont sorti qu’un seul album.
Pour être honnête, dans le paysage auditif de violence de la fin des années 80, Inferior to None ne faisait pas vraiment avancer le schmilblick. Pratiquant un Thrash solide mais classique, technique mais pas vraiment évolutif, les CYCLONE se plaçaient dans la haute moyenne de classicisme, copiant tous les tics des cadors dont ils auraient pu faire partie s’ils avaient eu plus de chance. On sentait du METALLICA dans leur musique, du MEGADETH, mais aussi de l’ACCUSER, du FLOTSAM & JETSAM musclé (« So Be It »), en gros, la quintessence du genre qui ne déborde pas sur les extrêmes, et qui ne tente pas de fricoter avec le Jazz ou le Funk. Du solide, de l’épais (« Paralyzed »), quelques mélodies en filigrane pour ne pas passer pour de gros bourrins (« Throw The First Stone »), et surtout, une qualité constante dans la composition, et un tri opéré au niveau des riffs pour ne conserver que les plus efficaces. Doté d’une énorme production signée Eric Greif (WRATH, DEATH, MORBID SAINT, ACROPHET, le fin du fin), Inferior to None proposait donc une alternative formelle à l’ouverture d’esprit en vogue à l’époque, et marquait les esprits comme ont pu le faire au même moment les DEMOLITION HAMMER et autres SADUS. Sauf qu’il n’était pas question de concessions Death ici, mais de Thrash touffus, carré aux entournures, et aussi efficace sur les neurones qu’une jardinière vous tombant du dernier étage sur la tronche.
Edité confidentiellement à l’époque, Inferior to None n’a connu depuis qu’une seule réédition via le label mexicain Avanzada Metalica (qui date quand même de….1992), et un bootleg russe, qui reste la seule façon de pouvoir l’acheter sans vendre un rein, l’original atteignant les 180€ dans les bons jours.
Line Up : Guido Gevels - chant, Stefan Daamen - guitare, Didier Kapelle - guitare, Geert Vanoverloop - basse, Giancarlo Langhendries - batterie
Date de sortie : 1990/Justice Records
Enregistré et mixé aux Ace Studios d’Aartselaar en octobre 1990. Produit par Eric Greif.
Recommandations auxiliaires : ACCUSER - Who Dominates Who,BLESSED DEATH - Kill or be Killed, VIKING - Man of Straw
27 - SACROSANCT - Truth is - What Is
Un petit tour de la Hollande, non pour y acheter des sabots ou une compilation de Dave, mais pour y faire la connaissance des SACROSANCT, un des trésors les mieux gardés des Pays-Bas. Surtout connu pour être la patrie de Martin Van Drunen, et par extension de PESTILENCE ou ASPHYX, ce pays a d’abord été le terreau fertile d’une formation totalement Thrash, dont les premières exactions forcent encore le respect aujourd’hui. Fondé en 1988, SACROSANCT fait partie de ces groupes sacrifiés sur l’autel de l’anonymat par un label trop confidentiel, et des pressages difficiles à dénicher. Avec un cas abordé dans les colonnes des grands magazines Metal de l’époque, SACROSANCT a pourtant bénéficié du soutien de certains média, ce qui n’est guère étonnant lorsqu’on connait sa musique.
Outre sa musique, ce sont les connexions externes qui ont permis de situer les hollandais sur la carte. En effet, on retrouvait au tabouret de batterie de la première démo du groupe un certain Marco Foddis, que vous avez sans doute plus connu comme le batteur fou de PESTILENCE. Mais le véritable leader du groupe était bien sûr Randy Meinhard, guitariste et compositeur, qui tenait absolument à ce que sa musique soit aussi précise que progressive. Grand admirateur des duels historiques du Heavy Metal, l’homme avouait sa fascination pour les tandems de guitaristes de QUEENSRYCHE, IRON MAIDEN ou EXODUS, mais concevait aussi avoir été initié à l’instrument par Ace Frehley. Très confiant, le tempétueux instrumentiste bombait le torse, et affirmait à la cantonade que Truth is -What Is contenait autant de riffs que l’intégrale des albums de SLAYER. Affirmation certes sans ambages, mais pas totalement fausse, puisque le fondement de ce premier jet était justement sa richesse de thèmes.
Une simple écoute du morceau « Skin to Skin » suffisait à le comprendre, le titre en question passant par toutes les ambiances possibles, allant jusqu’à humer l’air Folk pour un break totalement improbable. Mais tous les morceaux de cet album étaient conséquents. Et que ce soit l’intro purement NWOBHM de « The Sickened Thrill », ou l’harmonie progressive et véloce de « Disputed Death », tous avaient leur place au panthéon du Thrash progressif, à la limite du techno-Thrash, mais dans le sens ANACRUSIS du terme, et non WATCHTOWER ou SIEGES EVEN. Petit bémol, la voix très spéciale de Michael "Mike" Lucarelli, rauque mais un peu aigrelette, qui ne convenait pas à toutes les optiques, et qui conférait un petit parfum Hardcore aux chansons les plus brutes.
Avec en exergue un formidable final éponyme de plus de sept minutes, Truth is -What Is incarnait le versant le plus viril et agressif du Techno-Thrash, le style le plus en vogue de la fin des années 80. Heureusement pour vous, le CD a été réédité convenablement par la compagnie hollandaise Vic Records en 2018, bien que l’original de No Remorse Records soit à un prix abordable. A noter qu’une superbe édition double vinyle a été mise sur le marché par Lusitanian Music, qui vaut le coup d’œil et d’oreilles.
Line Up : Ronny Scholten - batterie, Michael "Mike" Lucarelli - chant, Randy Meinhard - guitare, Michael Cerrone - guitare et Remco Nijkamp - basse.
Date de sortie : 1990/No Remorse Records
Enregistré au Franz "K" Tonstudio, Witten.
Recommandations auxiliaires : DESPAIR - History of Hate,PARALYSIS - Visions, GENETIC WISDOM - The Fear Dimension
28 - XENTRIX - For Whose Advantage ?
On ne peut pas vraiment dire que la contribution anglaise à la cause Thrash des années 80 ait été primordiale. Entre les groupes gag à la ACID REIGN et leur mosh faisandé, et les seconds couteaux largement dispensables comme SLAMMER, le bilan n’était pas des plus fameux, et s’il n’y avait eu le génie épique d’un SABBAT, la perfide Albion n’aurait plus eu qu’à se reposer une fois encore sur les lauriers de sa NWOBHM. Heureusement, certains groupes ont relevé le niveau, proposant non des œuvres fondatrices, mais de jolis caprices brutaux qui encore aujourd’hui, méritent une écoute approfondie. Ainsi, XENTRIX en deux albums, fit passer la note anglaise de médiocre à passable. Fondé en 1988, le combo de Preston dans le Lancashire a mis le turbo pour que sa carrière décolle le plus rapidement possible, et après deux démos bien senties, a lâché son premier album sur le marché.
Shattered Existence est à ce jour l’album le plus connu des anglais. Bien agencé, assez culotté pour se faire remarquer, d’une précision rythmique impeccable, il posait des bases solides, et nivelait le terrain pour les travaux à venir. Mais à l’instar de nombreux fans, je lui préfère son successeur, For Whose Advantage ?, et pas seulement parce que le bleu de sa pochette est vraiment très chouette. Dès « Questions », le morceau d’ouverture, on sent la différence de professionnalisme entre les deux chapitres. Superbement produit, avec un son de guitare tranchant que n’aurait pas renié James Hetfield, ce titre d’ouverture place la barre déjà très haute, mais on sent le groupe en forme olympique, et le title-track, placé immédiatement après confirme les impressions.
Adoptant des postures rythmiques mouvantes, aménageant leurs breaks avec beaucoup de pertinence, les XENTRIX délivrent un Thrash puissant mais fin, technique mais abordable, et se situent en convergence de l’efficacité typiquement californienne et de la préciosité du Techno-Thrash texan. Percutant comme un EXODUS sous amphétamines, claquant comme du OVERKILL au sommet de sa forme, ambitieux comme le METALLICA de 1988, XENTRIX déroule, se souvient de sa jeunesse fougueuse (« The Human Condition »), mais nous enfume régulièrement avec des compositions à tiroirs aux ambiances envoutantes (« False ideas » qu’on aurait bien vu chez les SACROSANCT, « Desperate Remedies » et son intro bizarre longue comme le bras, menant sur un riff hyper syncopé).
Rois du morceau truffé de plans efficaces en diable, les anglais nous servent même encore bouillant le morceau le plus accrocheur de cette année 90, « Kept in the Dark », qui se permet trois ou quatre licks différent avant de trouver son thème principal. Constamment sur la brèche, jouant la surprise avec une régularité métronomique, assénant des mélodies typiques de la première vague de Frisco (« Black Embrace »), accélérant le tempo comme une bande d’allemands en goguette à Los Angeles, les anglais manifestaient leur envie de sortir leur pays du marasme de violence dans lequel il s’était plongé, remettant en question des décennies de suprématie.
Le groupe, fondamental, existe toujours aujourd’hui, même si ses albums sont beaucoup plus anecdotiques. Le dernier-né, Bury The Pain a été moyennement bien accueilli, mais au regard de leur apport au patrimoine Thrash anglais, ces mecs-là mériteront toujours le respect.
Line Up : Chris Astley - guitare/chant, Kristian "Stan" Havard - guitare , Paul "Macka" MacKenzie - basse et Dennis Gasser - batterie
Date de sortie : 21 août 1990/Roadracer Records
Enregistré au Loco Studios en juin 1990. Mixé au Raezor Studios, Londres.
Recommandations auxiliaires : HEATHEN - Victims of Deception, DEFIANCE - Void Terra Firma, PANIC - Epidemic
29 - OBLIVEON - From This Day Forward
Le Canada Metal des années 80, c’est quoi au juste ? Un sacré vivier d’artistes qui ont fait avancer le genre, qui lui ont donné ses lettres de noblesse, et une liste de groupes fondamentaux dont s’échappent évidemment les VOÏVOD, RAZOR, ANNIHILATOR, EXCITER, mais aussi une méchante liste de seconds couteaux qui n’avaient pas la lame émoussée. Attardons-nous justement sur le cas très intéressant des OBLIVEON, avec un « E », et non pas un « I », histoire de bien se démarquer de la masse de normalité.
Fondé en 1987 entre Longueuil et Montréal, OBLIVEON a comme tous ses petits copains ratissé le circuit des clubs locaux, et publié un certain nombre de démos (cinq en tout entre 1987 et 1989, bon score) avant de proposer ses compositions à grande échelle. Publié par le très recommandable label anglais Active Records (un tableau de chasse impressionnant, ANACRUSIS, ATHEIST, DESTINY, CANDLEMASS, HEXENHAUS, MEZZROW…), dont les CD originaux atteignent aujourd’hui des prix indécents, From This Day Forward était une sorte de non-cas d’école, et une œuvre à cheval entre plusieurs genres, à tel point qu’il est toujours aussi difficile aujourd’hui de le classer dans la petite case du Thrash. Death, Progressif, technique, agressif, ce premier album des canadiens préfigurait la vague Techno-Death des années 90, et les albums fondamentaux des PESTILENCE, DEATH, CYNIC et consorts, tout en gardant prise sur une efficacité Thrash indéniable.
Véritable trésor d’ingéniosité et de malice, From This Day Forward combinait la complexité d’un Thrash vraiment dense et précieux, et des lignes vocales brutes éructées par le bassiste/chanteur Stéphane Picard, qui n’avait pas acheté sa dextérité au rayon surgelés. En un seul morceau, très intelligemment placé en seconde de couverture, OBLIVEON se hissait à la première place du podium, devant ATHEIST et son Piece of Time encore un peu gauche. En bon admirateur du paysage brutal canadien, j’ai vu en cet album le plus parfait compromis entre le VOÏVOD le plus brutal, l’ATHEIST le moins torturé, et le HEXENHAUS le moins alambiqué. Pourtant, ce premier jet avec ses sept pistes jouait l’économie de compositions, sans avoir besoin d’en rajouter. Et s’il est devenu en quelque sorte le parangon d’une certaine vision Techno-Thrash tirant sur le Death avec les années, le hasard n’y doit rien. « Droidomized » était cruel et rapide, « Imminent Regenerator » aussi teigneux que sophistiqué, tandis que le stellaire « It Should Have Stayed Unreal » anticipait les débordements à venir de Chuck Schuldiner.
Véritable synthèse poussée à son paroxysme, From This Day Forward fut le dernier grand album de Techno-Thrash des années 90. Trente ans après sa sortie, il est toujours possible d’y découvrir des détails fascinants, et son écoute à très bien supporté l’épreuve du temps, grâce à une production ample et chaude. Moins froid et clinique que beaucoup de leurs homologues, les canadiens d’OBLIVEON pouvaient séduire les amateurs de finesse technique, tout comme les accros à la vilénie Death. Pour l’anecdote, la version originale du pressing Active Records se négocie aux alentours de 200 dollars dans les bons jours. Pire, la réédition Prodisk de 2007 ne passe jamais sous la barre des 70 dollars. Ce qui en fait l’un des albums les plus côtés du marché Thrash. Mais croyez-moi, rien d’étonnant à cela, d’autant que la suite de la carrière du groupe a réservé d’autre surprises grandioses.
Line Up : Stéphane Picard - basse/chant, Martin Gagné - guitare, Pierre Rémillard - guitare et Alain Demers - batterie
Date de sortie : 1990/Active Records
Mixé aux Peter Pan Studios, Montreal, Canada en mai 1990.
Recommandations auxiliaires : HEXENHAUS - The Edge of Eternity, ATHEIST - Piece of Time, PESTILENCE - Testimony of the Ancients
30 - MEZZROW - Then Came the Killing
Autre exemple de Thrash suédois avec les locaux de MEZZROW, qui encore une fois n’auront thrashé qu’un seul été. Formé en 1988, le groupe de Nyköping a rapidement signé un deal avec le légendaire label anglais Active Records, pour rejoindre son écurie de surdoués. Il est évident que les suédois n’avaient pas l’envergure d’un ATHEIST ou d’un OBLIVEON, mais leur Thrash générique et fort en oreilles avait quand même de quoi intéresser les nostalgique de la fin de la décennie. Basé sur une franchise rythmique incorruptible, le quintet n’était pas sans rappeler une version plus vorace du TESTAMENT de The Legacy, d’autant que le timbre de voix d’Uffe Pettersson n’était pas sans évoquer celui de Chuck Billy. Ajoutez à ça une basse ronde et omniprésente à la OVERKILL, une cadence appuyée, et des riffs triés sur le volet, et vous obteniez l’un des derniers grands classiques des années 80, avant que les nineties ne rappellent les thrasheurs chez maman.
Noyé dans la production pléthorique de l’époque, déjà dépassé par les Techno-thrasheurs et le mouvement Death grandissant, Then Came the Killing n’avait aucune chance de se distinguer en 1990, et seule l’épreuve du temps allait lui permettre de faire ses preuves et de s’imposer comme l’un des albums les plus sous-estimés de cette décennie. Avec son éventail de saccades qui synthétisait tout le répertoire extrême de la Californie, une brutalité typiquement allemande, le tout fluidifié par cette fameuse approche suédoise, Then Came the Killing incarnait en quelque sorte le parangon du Thrash formel de la seconde moitié des années 80. Impossible en écoutant « Then Came the Killin » ou « Ancient Terror » de ne pas penser au classique « Over The Wall » de TESTAMENT gonflé aux stéroïdes, mais les MEZZROW étaient bien plus que de simples doublures habiles.
Passant en revue tout l’attirail à leur disposition, les suédois se montraient terriblement Heavy en terrain lourd (« The Final Holocaust »), mais aussi redoutables dans leur combinaison de mid tempo catchy et d’accélérations fulgurantes à la « Raging Waters » (« Distant Death »). Sans véritable point fort, mais sans autre point faible que son traditionalisme, ce premier et unique album de MEZZROW s’apprécie beaucoup plus aujourd’hui que dans son jus trentenaire, spécialement lorsqu’on le compare aux trois-quarts de la production old-school actuelle. Superbement enrobé dans une production épaisse, Then Came the Killing nous réservait alors quelques moments de bravoure balèzes (« Whete Death Begins »), et ne supportait aucune accalmie trop mélodique.
Pas de quoi réveiller les morts, mais de quoi les déranger pendant leur sommeil, même s’il est clair que les suédois ne faisaient pas partie de l’élite d’Active Records. A noter, comme toujours ou presque dans le cas du label, qu’aucune réédition digne de ce nom n’est venu faire chuter le prix de l’édition d’origine, encore cotée entre 40 et 60 euros (si vous payez moins cher, alors vous avez acheté le bootleg russe…).
Line Up : Staffe Karlsson (R.I.P. 2018) - guitare, Zebba Karlsson - guitare, Steffe Karlsson - batterie, Uffe Pettersson - chant et Conny Welén - basse
Date de sortie : 1990/Active Records
Recommandations auxiliaires : TESTAMENT - The Legacy, EVILDEAD - Annihilation of Civilization, SHAH - Beware
Nan mais vlà le dossier de MALADE !!! Et ce n'est que la première partie
Merci mortne bordel ! Moi qui aime beaucoup le Thrash mais qui ne sais parfois pas où chercher... me voilà servi. Des heures d'écoute et de découverte en perspectives !
superbe chronique sur nos NOMED preferes ...... je partage sur leur page FB un GRAND merci
Alors évidemment j'ai pas eu le temps de tout lire, mais v'la le taf de dingue ! Bravo !
J'écouterai ça pour parfaire ma culture Thrash, mais je sais, déjà, que 90% des groupes cités ne sont pas fait pour moi.
HELTER SKELTER, où la naissance du Heavy mais aussi du Punk et du Noise-rock !
Bien accroché à Realm, merci pour la découverte, et super taff pour le dossier. Protector, c'est mon groupe du moment en voiture, a shedding of skin déboite vraiment (bon, on n'est plus dans les 80s là..)
Bon sang, un superbe article écrit par un clone de moi-même !! Superbe travail sur l'underground passé de mon style de prédilection. Article qui ne me rajeunit pas tellement, ayant découvert le speed-thrash en 1986. J'en possède tout de même une bonne quantité. Comme par exemple l'unique album de MAYHEM : je l'ai écouté encore récemment et reste pour moi un classique. ZOETROPE : acheté à sa sortie suite à la chronique dans Hard-Force. Superbe pochette découpée originale. Du luxe pour l'époque. Ils se disaient jouer du street-metal. Rien que pour le titre 'Seeking asylum', ce disque vaut le détour. Avec Svitek à la guitare, futur MINDFUNK et MINISTRY. Il a été réédité en Cd. Leur précédent méfait est aussi très bon. RECIPIENT OF DEATH : j'avais un Ep et comme un con, je l'ai revendu. Regret. REALM : ils ont fait sur un autre album une reprise des BEATLES : 'Eleanor Rigby'. Zegut l'avait passé à la radio à la grande époque de Wango Tango. Elle vaut le détour. TARGET : du techno-thrash de grande qualité mais je préfère les québécois de DBC dont les deux albums sont d'enfer. PROTECTOR : j'adore ce groupe et 'Urm the mad' est mon préféré. C'est tout dire. NOMED : écouté cette semaine. SACROSANCT : cet album est intéressant et contient à la gratte un ancien de PESTILENCE. Dommage que le chant manque de puissance. XENTRIX : j'ai aussi en Cd l'album que vous proposez sauf que le mien est dédicacé, ha, ha. J'ai le MEZZROW en vinyle. Il est superbe et en plus, vous m'apprenez qu'il me rend riche. C'est d'ailleurs marrant de voir que des disques sortis à l'époque dont tout le monde se foutait sont aujourd'hui très recherchés. Je ne connais pas tous les groupes que vous citez mais la sélection est fort judicieuse et rend hommage à toutes ces formations disparus et hélas oubliés. Et bravo pour les recommandations auxiliaires !
OUCH !!! !!! !!!
Va falloir que je lise cette encyclopédie et que je potasse tout ça les jours prochains...
J'n'en connais que 8 putain... Dont MORSÜRE et PROTECTOR (bien vu pour "Urm the mad" NecroKosmos !) dont je suis über fanatik.
@Nekro, je te conseille la reprise d'Eleanor par The Zoot (Australie, 1970) si tu ne la connais pas déjà..
Quel travail ! Honnêtement, je connaissais une dizaine de noms (et j'en ai réellement écouté encore moins...). On va avoir de quoi s'occuper les esgourdes au-delà du big 4 et du petit peloton qu'on cite derrière habituellement.
Même moi qui ai vécu cette époque je ne les connaissais pas tous. En revanche je me souviens très bien d'à quel point on se moquait de Morsüre, tellement on les trouvait ridicules. Avec le recul c'est sûr qu'ils ne méritaient pas tant de mépris.
Voilà un dossier qui me donne envie de replonger dans les vieilleries et d'en découvrir de nouvelles ! Bravo pour ce dossier de malade ! \m/-_-\m/
Alors !
J'ai enfin fini la lecture et l'écoute des morceaux proposés...
De tout ce qui m'était inconnu, les groupes intéressants à mes oreilles sont DETENTE, ZOETROPE, RECIPIENT OF DEATH, MX et DBC (pourtant dieu seul sait que le Thrash Prog n'est pas du tout ma tasse de thé, mais là, ce morceau m'a bien interpellé).
Je vais de fait creuser un peu la disco tout cela d'ici peu.
Un très grand merci donc mortne2001 pour ce superbe travail monacal.
Par contre ! :
- En quoi MAYHEM fait penser à WARFARE et AT WAR ?!?!?!
Comparaison incompréhensible pour moi...
- "Les anecdotiques ACID"
???
Là t'es plus que dur hein... ... ...
PS : Qui a repéré tout comme moi l'arrogante paire d'espadrille fièrement arborée par NOMED ?
Eh bé, bravo et surtout MERCI !!!
Moi qui adore le Thrash depuis 1986 mais qui ne trouve plus mon compte parmi les tonnes de disques sortant tous les mois dans le genre, je vais me replonger dans la bonne époque du style et écouter ceux de la liste que je connais que de nom, voire pas du tout.
Très bon travail de fond.
Bravo !
Je ne connaissais pas Calhoun Conquer. Écoute prévue du coup, les comparaisons avec MDelta m'attirent bien.
Lire sur Agony, RODeath ou Nomed en 2021, qui l'eut crû en 1989 ?
Pour le reste, quasiment d'accord sur tout. Merci d'avoir évoqué ce terrible Obliveon.
J'aurai plus mis le premier Dead Brain Cells ou le 1er Vendetta que leurs successeurs, mais bon, question de découvertes sans doute, le 1er album écouté étant souvent celui qu'on retient le plus d'un groupe.
Merci à l'auteur de ce génial dossier !
Pour ma part, j'ai relevé 10 albums qui m'intéressent plutôt pas mal :
- Believer : je connaissais que de nom, jamais écouté.
- Calhoun Conquer : connaissais pas
- DBC : que de nom, jamais écouté
- Gammacide : que de nom aussi
- Mezzrow : connaissais pas
- Rigor Mortis : j'avais leur dernier que j'écoutais rarement mais celui-ci donne plus envie
- Sacrosanct : j'avais le second album que je n'aimais pas trop. Idem là aussi, comme pour Rigor Mortis le premier album semble nettement plus jouissif.
La suite :
- Siege Evens : découvert récemment dans la vidéo clash sur le Thrash de Max Yme. J'avais aimé l'extrait qu'il avait passé. Ici aussi !
- Stone : connaissais pas du tout nonpu !
- Target : idem !
Et bien voilà ! Même si mon larfeuille ne va pas forcément me remercier, voici ici un florilège d'albums sympas à écouter, qui me replongeront dans la bonne époque du Thrash et me feront oublier toute cette tonnes de groupes actuels qui n'inventent strictement plus rien !
Et au fait !
"La simonie consiste en l’achat, la vente de biens spirituels, de sacrements, de postes hiérarchiques, de charges ecclésiastiques ou de services intellectuels"
Ca vient de la ton pseudo Simony ?
1000 mercis pour ce dossier de la mort qui tue !!!! Putaing, le TAF !
Je vais me lire ça en détail et aller à la pêche ensuite !
Joie et bonheur !
@Humungus : c'est l'idée, oui !
Et bien on en apprend donc tous les jours en ces lignes...
C'est ce que les prêtres faisaient au Moyen-Âge pour s'enrichir sans que le clergé ne le sache, du trafic de reliques et d'objets sacrés, pour moi ça en dit long sur le dogme religieux qui sert de cadre à notre éducation et que certains essaient désespérément de maintenir au nom des traditions...
Voilà, désolé pour le H.S. par rapport à cet excellent dossier.
Ben alors là...Quel voyage dans le temps!J'ai la chance d'être né à temps (1968)pour avoir pu vivre tout ça en temps réel.Frontalier avec la Belgique,j'ai pu me procurer les albums de Sixty Nine,Cyclone,Evil Sinner et bien d'autres en vinyle d'époque.Je les garde bien précieusement et les pose encore régulièrement sur ma platine.Les vinyles de Nomed également font partie de mes trésors.Ta connaissance en la matière est pointue.Vivement la suite.
Aux petits coquinoux qui voudraient écouter ces perles... allez jeter un oeil sur dts-metal
download
(Ckayatb)
(j'ai rien dit)
Excellent dossier qui aide à parfaire ses connaissances d'un courant musical absolument électrisant (ou autre synonyme de bandant).
Je viens de lire cet énorme pavé et c'est du très beau boulot, sérieux et documenté : un grand bravo au rédacteur !
Quelques albums que je connais dans le lot (rhaaa enfin quelqu'un qui estime les excellents Defiance à leur juste valeur ! ), d'autres de groupes que j'ai déjà écouté mais pas forcément les skeuds recommandés (Xentrix, jamais réussi à accrocher, mais il faudra que je réessaie avec l'album cité ici-bas), d'autres que je ne connais que de réputation, mais surtout énormément de découvertes, même pour un trasheux qui connait bien son sujet.
Nan, mais vraiment, je me suis régalé à lire et écouter/découvrir tout ça, mille merci à toi !
À quand le part 2, donc ? :)
Le numéro 2 sur les années 90 est en préparation.
"...jouer un concert en Arabie Saoudite. Un honneur absolu et un privilège. Les loups du nord apporteront la tempête hivernale à Riyad !"Un véritable honneur absolue de jouer en Arabie Saoudite, la ou les apostas sont condamnés &agra(...)
21/11/2024, 08:46
Quand on se souvient du petit son des années 80... Mais la prod ne fait pas tout, ça reste du pilotage automatique. C'est pas avec un truc pareil que je vais me réconcilier avec eux, et ça fait 20 piges que ça dure.
19/11/2024, 21:57
J'avais pas vu cette chronique. J'étais au soir avec Ulcerate et je n'ai pas du tout regretté...Le lieu : il y a forcément un charme particulier à voir ce genre de concert dans une église, surtout que le bâtimen(...)
15/11/2024, 09:51
Le who's who des tueurs en série. Un plus gros budget pour l'artwork que pour le clip, assurément. (...)
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J'imagine que c'est sans Alex Newport, donc, pour moi, zéro intérêt cette reformation.
11/11/2024, 16:15
NAILBOMB ?!?!?!?!Putain de merde !!! !!! !!!J'savais pas qu'ils étaient de nouveau de la partie !!!Du coup, je regarde s'ils font d'autres dates...Ils sont à l'ALCATRAZ où je serai également !Humungus = HEU-RE(...)
11/11/2024, 10:09