L'un des avantages marginaux du Hellfest, c'est que des groupes qui y vont font parfois une date ou deux ailleurs en France tant qu'à y être. Dans une période de l'année où il m'est difficile de me déplacer, autant en profiter quand c'est à un coup de volant de la maison en plein weekend. Cro Mags était déjà passé ici et la présente tournée européenne attendait depuis deux ans, comme bien d'autres. Un groupe aussi culte n'a pas manqué de drainer tous les vieux coreux de la région et une grosse délégation de skinheads (tendance SHARP, tout va bien) venus comme les fidèles viennent voir le pape après des années d'attente. Avec une telle chaleur, la scène était heureusement installée dans la cour de la Secret Place. Un concert à l'extérieur avec une petite brise était déjà une bénédiction après une semaine de canicule. En plus, la cantine proposait des farçous maison sur lesquels je me suis jeté avant que ça ne démarre ! Le festival estival HC et voisins "See You in The Pit" pouvait enfin repartir comme si rien ne s'était passé depuis trois ans.
Il y avait du changement pour le groupe d'ouverture. C'était finalement FULL IN YOUR FACE, formation plutôt basée en Provence voisine mais souvent programmée ici, qui s'y collait. En parfait accord avec la tête d'affiche, il s'agissait de Hardcore à la New-Yorkaise pur et dur. Rien d'original mais c'est l'authenticité de l'attitude qui compte. Les effets secondaires des confinements se ressentent encore : comme beaucoup d'autres, le quintet avait la pêche après des trimestres de frustration mais n'avait pas encore retrouvé une parfaite automaticité. Qu'importe, c'était suffisant et la fosse s'est rapidement formée malgré un sol dangereux. Dans ce style, il s'agit donc de gros riff fier et bien tendu avec une basse audible avec des chœurs de temps à autre, et ils le font bien. Les discours étaient partagés entre le chanteur bien sûr et le batteur. Les chœurs étaient partagés avec la guitariste rythmique, qui n'a rien d'un garçon manqué mais assurait sans effort cette tâche supplémentaire. Entre les propos revendiqués, les hommages, les intitulés simples mais pertinents des morceaux se référant à des valeurs simples mais sûres, plus un savoir-faire incontestable, Full in Your Face dégageait quelque chose de très sain dans l'esprit, qui faisait du bien, et cette sincérité qui disloque les réserves des grincheux. Tant que le HC français aura des combos comme ça, elle ira bien.
MONDE DE MERDE n'a pas eu de chance pour son set. Tantôt une moitié du son se coupait, tantôt il fallait rebrancher un câble… Avec un temps de jeu aussi haché beaucoup de gens moins expérimentés auraient explosés mais les quatre Orléanais ont pris cette cascade d'emmerdes avec calme et humour, et le public avec patience. Entre les deux autres, ce groupe apportait la touche différente de la soirée avec un son plus Punk, plus Noisy ou plus mélodique par moments, bref une musique plus variée. En se présentant avec une seule guitare qui devait tenir l'espace sonore, le son de cet instrument était fatalement plus sale mais c'était parfaitement cohérent avec la musique qu'ils font. Par des titres plutôt courts et directs, le registre hurlé de l'athlétique chanteuse, aidée par les chœurs de ses compères parfois, on ne pouvait s'empêcher de penser au style de Løvve un peu plus en aval sur la Loire, bien que M2M soit définitivement plus mélodique. Le guitariste raconta une anecdote amusante sur un concert apparemment annulé qu'il avait organisé il y a une trentaine d'années pour Cro-Mags dans leur ville. Malgré tous les pépins qui ont gâché leur show, M2M a pu nous montrer qui ils étaient.
Pour rompre un très long intermède (certes agréable avec le rafraîchissement vespéral) et une longue balance, Harvey Flanagan entama le temps de jeu de CRO MAGS par un véritable discours évoquant la longue histoire de sa chose et un amour appuyé pour la France (sincère ou opportuniste, en tout cas le nom de son groupe fait référence à un lieu situé en France, et dans le Midi de surcroît…), sans omettre de rendre hommage aux groupes d'ouverture, tout en précisant que la route avait été longue depuis Clisson la veille mais qu'ils avaient tenu à revenir ici. Et là, les premières mesures de "We Gotta Know" firent exploser la fosse et les gobelets partir en fusée. Peu de groupes parviennent à provoquer cela. Les morceaux choisis mettaient bien en valeur l'apport musical majeur de Cro Mags au Hardcore old-school qu'il a largement contribué à fonder, à savoir un riffing influencé par le Metal. Pour autant, Flanagan nous expliqua entre deux titres que les seuls amis qu'il avait dans cette scène étaient les vieux membres d'Agnostic Front et que les autres ne l'intéressaient guère. C'est une très forte personnalité, sympathique malgré un ego certain, comme les rues de New-York en produisent, dont la truculence a entraîné des baratins fournis entre chaque titre. Mais son anglais était très intelligible pour nous (ce dont il s'aperçut avec plaisir), et de toute façon la musculature imposante qu'il montra après avoir enlevé sa chemise rouge au bout de quelques titres (fruit d'une pratique assidue des arts martiaux) aurait dissuadé les imprudents.
Plusieurs morceaux étaient issus des albums récents, le boss n'aimant pas regarder seulement en arrière. Si certains passages me paraissaient un peu faibles, les nombreux moments rapides étaient suffisamment emballants, grâce au jeu sec et précis de l'imposant batteur Gary "G-Man" Sullivan, afro-américain comme Mike Smith chez Suffocation. Après l'incontournable "Hard Times", Papa Harvey se lança dans une impro' à la basse slappée, qu'il coupa en nous rappelant qu'il n'était pas Flea. Le pit était largement déchaîné, communiant en bloc aux chœurs sur le micro même de Flanagan à son invitation. La danse était plutôt typée des traditions HC et Skin, l'autre grosse marque laissée par Cro-Mags sur un plan plus culturel étant la forte connexion entre le Hardcore ricain et la culture Skinhead antiraciste que le groupe importa de ses premières tournées en Grande-Bretagne et largement reprise ensuite par d'autres grands groupes de cette scène. L'entrain des fans ravit le patron, qui affirma qu'il préférait l'esprit de ce lieu à celui du Hellfest la veille (le concert que vous aviez pu voir sur Arte) "… but let's keep this place a secret, ha ha !" conclut-il en référence au nom officiel du lieu peint en grand derrière la scène.
Après quelques ultimes morceaux du même tonneau mais parfois de qualité musicale un peu moindre à mes oreilles de spectateur non pogoteur, le set s'acheva sans rappel, à l'Américaine, au terme d'un temps de jeu finalement bien court : une cinquantaine de minutes qui avait compté de longs arrêts de jeu avec tout ce qu'Harvey Flanagan avait à dire. Après un bref passage en coulisses, il ne manqua pas de revenir rencontrer longuement ses fans, laissant son propre fils gérer plus loin le merchandising.
Même si lors de ma lointaine petite période un peu Coreuse je n'avais pas éprouvé une grande attirance pour ce groupe à la discographie quelque peu tronquée, je comprends mieux pourquoi il conserve ce statut auprès de ses fans. Le charisme d'un véritable chef proche de ses fans, soucieux autant de la bonne santé de tout un mouvement dont il a fortement participé à la naissance que de sa singularité au milieu de ses pairs. Intégrité, fidélité, unité, respect, c'est le Hardcore, c'est New York !
En attendant j'ai failli assister à un accident grave devant moi en rentrant, comme pour nous rappeler que la camarde rôde.
"...jouer un concert en Arabie Saoudite. Un honneur absolu et un privilège. Les loups du nord apporteront la tempête hivernale à Riyad !"Un véritable honneur absolue de jouer en Arabie Saoudite, la ou les apostas sont condamnés &agra(...)
21/11/2024, 08:46
Quand on se souvient du petit son des années 80... Mais la prod ne fait pas tout, ça reste du pilotage automatique. C'est pas avec un truc pareil que je vais me réconcilier avec eux, et ça fait 20 piges que ça dure.
19/11/2024, 21:57
J'avais pas vu cette chronique. J'étais au soir avec Ulcerate et je n'ai pas du tout regretté...Le lieu : il y a forcément un charme particulier à voir ce genre de concert dans une église, surtout que le bâtimen(...)
15/11/2024, 09:51
Le who's who des tueurs en série. Un plus gros budget pour l'artwork que pour le clip, assurément. (...)
14/11/2024, 09:20
J'imagine que c'est sans Alex Newport, donc, pour moi, zéro intérêt cette reformation.
11/11/2024, 16:15
NAILBOMB ?!?!?!?!Putain de merde !!! !!! !!!J'savais pas qu'ils étaient de nouveau de la partie !!!Du coup, je regarde s'ils font d'autres dates...Ils sont à l'ALCATRAZ où je serai également !Humungus = HEU-RE(...)
11/11/2024, 10:09