Impossible de se sentir lésé, en tant que fan de musique, par la programmation du Crossroad en ce mois de mars. Après la venue acclamée des WISHBONE ASH quelques semaines plus tôt, c’est au tour de la légende Pub Rock anglaise DR. FEELGOOD d’occuper la scène pour une paire d’heures. DR. FEELGOOD fait partie de ces groupes dont le line-up occulte tout membre original pour se concentrer sur la formation la plus stable et pérenne. Lee Brilleaux (chant, harmonica), décédé en 1994, Wilko Johnson (guitare) parti en 2022 ont donc rejoint le paradis des bars, alors que la section rythmique originelle de John B. Sparks (basse) et John Martin (batterie) s’est fait la malle en 1982.
Les deux plus anciens membres de la formation actuelle sont donc Phil Mitchell (basse, 1983-présent), Kevin Morris (batterie, 1984-present) et Gordon Russell (guitare, 1983-1989, 2021-présent), accompagnés depuis plus de vingt-cinq ans par la pile électrique Robert Kane (chant 1999–présent). Si le groupe tourne toujours - le concert de ce soir en témoignant - il enregistre aussi de nouveaux albums, le dernier en date, Damn Right! ayant frappé 2022 de plein fouet.
On pourrait se dire qu’après plus de quarante ans de présence scénique, DR. FEELGOOD soit tenté de mettre la pédale douce sur les représentations, mais il n’en est rien. Et pour cause : le groupe de Canvey Island affiche en 2025 une santé insolente, et une envie de jouer supérieure à celle de bien des orchestres plus récents. Quoi de plus adapté donc qu’une foule de fans pressés dans une salle dont la réputation n’est plus à faire dans la région pour retrouver ce Rock énergique et légèrement bluesy, un soir de semaine, alors que le weekend approche ?
Le public ne s’y est pas trompé, et se tasse au centre de l’édifice pour ne rien rater du spectacle, qui commence dès la sortie des loges de nos quatre héros. Acclamés comme il se doit, tirés à quatre épingles, mais arborant de splendide creeepers aux pieds, les quatre musiciens sont là pour balancer la sauce, et communier avec un public conquis d’avance. Mais avec une carrière discographique s’étendant sur cinq décennies, il n’est guère étonnant que les fidèles soient toujours aussi avides de décibels authentiques et d’attitude honnête d’artisans de la musique.
Et lorsque la sono arrête de cracher sa bande-son d’ambiance, ce sont deux heures ou presque de live qui nous attendent de pied ferme.
L’approche est sobre, et le contact épars. Mais le regard de Robert Kane en dit long sur son appétit, et sa gestuelle toujours aussi expansive est le véritable moteur de cette formation qui ne fait décidément pas son âge. Le frontmen, accessoirement harmoniciste, ne ménage pas ses efforts, et fait virevolter sa splendide veste rouge comme un toréador agaçant les cornes de la bête. Le chanteur, à l’aise dans son élément, joue beaucoup de sa taille et de sa minceur pour se transformer en marionnette manipulée par les Dieux du Rock, et s’abandonne à son art en s’adaptant à un tracklisting faisant la part belle à ce dernier album qu’il défend corps et âme.
Comme à l’habitude, le son est excellent. Bien rond, puissant juste ce qu’il faut, précis dans les graves et un peu roublard dans les médiums, ce qui permet à l’axe rythmique Phil Mitchell/Kevin Morris d’imposer le tempo sans paraître dominateurs. Les deux hommes se connaissent par cœur, et n’ont nul besoin de se regarder pour jouer à l’unisson. Pourtant, le binaire est exigeant : il réclame une métronomie parfaite, et une frappe assurée mais pas trop lourde pour ne pas lester l’instrumental. Phil Mitchell est assurément le gardien de la flamme, avec son attitude d’une sobriété exemplaire, uniquement déréglée par quelques poses sympathiques pour les photographes. Qui sont d’ailleurs à la fête ce soir : les gimmicks physiques pleuvent, et Gordon Russell multiplie les soli sous les lights avec un petit regard en coin vers l’objectif.
Les lignes mélodiques qu‘il tire de son instrument sont limpides, et pourtant, la dextérité du bonhomme ne surprend personne. En tant que guitariste, il est dépositaire du son du groupe, basé sur cet amalgame entre Rock classique, Pub Rock typiquement anglais et Blues déguisé en agneau pour ne pas trop effrayer les troupeaux d’autrui. Ce mélange magique, en marche depuis le début des années 70 est aujourd’hui sublimé par cette simplicité d’approche et cette authenticité de jeu : DR FEELGOOD n’est pas sur scène pour se faire mousser, mais bien pour donner le plus de plaisir possible à son public, tout en en prenant lui aussi en se plongeant dans son histoire.
C’est ainsi que la setlist mixe les époques et traverse le temps, celui qui s’est écoulé entre le séminal et historique Down By The Jetty en 1975 et le petit dernier Damn Right! il y a déjà trois ans. Outre le tubesque et incontournable « Milk & Alcohol », plus gros hit du groupe, on trouve dans les tiroirs ce soir les plus récents « Mary Ann » et « Damn Right I Do », ce qui nous permet de mesurer le chemin accompli depuis la formation du combo en 1971…l’année de ma naissance.
J’en profite pour faire un petit aparté qui a son importance. Lorsqu’on est amené à shooter un groupe live, il convient d’être attentif pour ne pas manquer le cliché le plus représentatif de la performance, et donc, de suivre les événements avec tout le sérieux nécessaire. Cette tâche s’est une fois de plus avérée plus difficile que prévue, le binaire incendiaire des anglais m’obligeant à poser mon appareil en plus d’une occasion, complètement contaminé par l’énergie développée sur scène. Mais cet indicateur en dit long sur le potentiel d’un groupe à perturber le bon fonctionnement d’un passionné qui ne peut résister à cette charge électrique digne d’une réanimation par défibrillateur.
Et les morceaux s’enchaînent, enflammés par cette guitare magique, ce chant flamboyant et théâtral et cette rythmique posée qui n’est pas sans rappeler l’austérité de l’axe Roger Glover et Ian Paice de DEEP PURPLE. En passant en revue sa longue histoire, DR. FEELGOOD nous trimballe dans les arcanes du temps, et nous fait revivre des moments intenses.
Quel moment plus intense d’ailleurs que « Roxette », premier hymne du groupe et fer de lance de son premier disque. C’est le genre de titre incontournable que tout le monde attend, et qui fonctionne encore à plein régime. Private Practice est évidemment abordé par la face « Down at the Doctors », mais plus que les morceaux en eux-mêmes, c’est le naturel de ces musiciens à qui on ne la fait plus depuis longtemps qui marque. Les quelques sourires d’un Phil Mitchell, roc flegmatique et sympathique, les fulgurances de la guitare de Gordon Russell, le jeu sobre et précis de Kevin Morris, et bien sûr, l’hystérie contrôlée de l’homme élastique Robert Kane, au visage émacié, mais à l’entrain infatigable.
Encore une bien belle soirée au Crossroad, qui nous accueille toujours les bras grands ouverts, pour que peu notre passion soit sincère et sans chichis. Ces gens sont admirables, et peuvent résister à des températures intérieures totalement déraisonnables. Et grâce à eux, we feel so good.
Concert complet à Nantes. Pas pu y aller. Crotte...
Je tombe sur la chronique et ce visuel de groupe intrigant. Cette nouvelle offrande est franchement pas mal, à confirmer avec plus d'écoutes.
01/04/2025, 15:21
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31/03/2025, 21:24
Bon...Je viens de me bouffer à peu près la première moitié de leur discographie là...Comme dirait le penseur, cela m'en touche une sans faire bouger l'autre.J'aurai essayé ma foi... ... ...
31/03/2025, 09:08
Quand je vois certains commentaires ici, on mesure à quel point la France (et pas que) est gangréné par les idiots utiles de la Russie. J'aimerais bien vous y voir si ce dégénéré de Poutine avait envahi la France : comment l'auriez-vous j(...)
31/03/2025, 08:54
Je n'avais pas été vraiment convaincu par l'album précédent, trop gonflé aux hormones inutilement, là ça respire, ça pue le old-school à plein nez, ça sent l'achat !
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On va peut-être vous ouvrir un sujet "La Géopolitique vue de ma fenêtre" dans le forum, ça pourrait vous être utile parce que je ne suis pas certain que ça passionne tout le monde tout cela....En tout cas, étant donné qu'il y(...)
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"Oui, comme nous en France en 1914 quand nous voulions récupérer l'Alsace et la Lorraine. Rien de choquant pour moi."Ouais, rien de choquant. Cet idiot utile de Zelensky avait juste faite sa campagne en faveur de la paix.
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