Hatebreed + Crowbar

Crowbar, Hatebreed

Paloma, Nîmes (France)

du 14/06/2024 au 14/06/2024

Mon agenda de concerts s'annonçait plutôt maigre pour l'été, sans grosse affiche de plein air ni festival. J'avais un plan de dernière minute pour Rammstein au Vélodrome, mais trop compliqué à attraper au vol (peut-être que d'autres noms m'auraient mieux motivé). Les belles affiches à Barcelone tombent mal début juillet ("Pantera" et Kerry King), le festival d'Orange n'aura pas lieu cette année et la programmation du festival de Nîmes ne me disait rien non plus. Mais à défaut de tout cela, il y avait une date intéressante dans l'unique vraie salle de la ville voisine. Le court déplacement fera donc office d'excursion musicale pour ce mois de juin. Hatebreed était passé à Montpellier il y a une bonne dizaine d'années maintenant mais je n'y étais pas allé. Les Yankees avaient percé juste quand j'ai cessé d'écouter un peu de Metal Hardcore. Mais n'était-ce pas un peu ingrat de ma part ? Venait l'occasion de se rattraper envers un groupe devenu une institution et qui a contribué à l'évolution de la scène toute entière.

Sous un temps maussade voire franchement menaçant, le parking de la Paloma était bien garni. On était venu d'assez loin de Provence et de Languedoc, et ce ne sont pas Shaka Ponk et Dyonisos programmés le même soir aux arènes qui risquaient de concurrencer (quoique j'y avais des amis… et dire que j'ai vu Dyonisos il y a vingt ans dans l'amphithéâtre romain en première partie de Muse). L'horaire de 20 heures annonçait bien l'ouverture des portes et une longue queue enserrait comme d'habitude la salle. De jour, je dois dire qu'elle est assez représentative de ces SMACs modernes tout à fait confortables pour profiter d'un concert mais assez moches esthétiquement. Comme elle est au milieu de nulle part entre un aérodrome, la maison d'arrêt, un centre commercial et le camp militaire pas loin, ça jure moins qu'ailleurs. Il n'y avait que deux groupes, ici on ne pratique guère la première partie locale. Mais puisqu'il y avait du monde, il fallait se presser quand même pour jeter un œil au merch' (tenu par l'épouse de Kirk Windstein), croquer un hot-dog et se prendre une pinte à l'intérieur où l'attente est moins longue que dans la cour.


Je finissais de payer quand CROWBAR s'avança sans cérémonie sur la scène tendue d'une toile à grande fleur de lys, avec quelques minutes d'avance. Kirk bougonna une première harangue et le quartet Louisianais envoya un premier riff massif bien dans son genre. Honnêtement je restais sur le souvenir plus que mitigé de la dernière fois il n'y a même pas deux ans à Toulouse. Mais cette fois, le vieux Kirk était mieux en forme. Ce style un peu particulier de Doom Sludge aux riffs pesants, austères mais assez propres qui caractérise Crowbar a fini par devenir une référence et il avait ses fans présents. Todd Strange était remplacé à la basse par contre. Comme en 2022, le jeu d'éclairages m'a paru un peu trop soigné par rapport à une musique aussi poisseuse. Mais c'était un détail par rapport à une performance qui se révélait à mesure plutôt bonne. Le père Kirk avec sa vaste barbe et sa casquette retournée se référait souvent à sa ville d'origine en mêlant du français de base à ses remerciements au fort accent du sud profond, complimentant même Nîmes où Crowbar venait pour la première fois. Surtout, son timbre retrouvé ne ressemblait plus au braillement épuisé de l'autre fois et apportait une âme déprimée, usée mais bien vivante à un répertoire bien plus contondant que tranchant. Quelques titres accéléraient et provoquèrent même une petite fosse assez tranquille. Un titre au riff plus aigu et nanti d'un chant plus mélodique sembla ravir une partie des fans, et de fait il sortait du lot par une charge émotionnelle plus marquée. Au bout d'une cinquantaine de minutes, Crowbar laissa la place à leurs chers camarades après avoir plutôt rassuré devant un public certes assez conquis d'avance.


Après une courte introduction épique, la bande de HATEBREED apparut conquérante derrière la harangue plus intelligible et truculente de Jamey Jasta, pour nous plonger directement au cœur d'un show qui s'annonçait physique et généreux. Il est très facile de rentrer dans leur monde qui mélange la fraternité indocile du Hardcore à l'agressivité du Thrash, dans le droit sillage du bon vieux Crossover. À chaque fois que je recroise ce style, je redeviens irrésistiblement fan le temps du set et il n'y avait qu'à profiter comme on avait savouré Biohazard, Walls of Jericho, Pro-Pain ou Sworn Enemy. Jamey lui aussi aimait bien balancer des noms de groupe à la chaîne, comme le fan qu'il reste au fond de lui sous ses cheveux actuellement longs. Sourire constant aux lèvres, il s'est démené pour nous pousser à vivre à fond un bon moment ensemble en ressortant les exercices classiques comme les batailles de chœurs, les vagues de bras (comme Depeche Mode !), les cornes, les circle-pits commandés d'un geste bizarre comme s'il désignait une montre inexistante à son poignet (mais ça marchait !), sautant et galopant partout. À son exemple, la fosse formée dès les premières notes se donnait sévèrement Cette proximité de Jamey et cet intérêt pour l'Histoire des musiques qu'il aime culminèrent ensemble dans le bref exposé sur l'histoire du "wall of death" introduisant l'arrivée du "ball of death", un gigantesque ballon de bien trois mètres de diamètre au nom du combo qu'il envoya et renvoya sur le public pendant bien deux morceaux. Ce sens du spectacle à l'américaine est bien bordé, mais efficace. Il doit bien aimer son batteur qu'il nous fit acclamer deux fois (il n'avait pas de marteau de guerre au bout des baguettes je vous rassure, c'était juste sur les décors). Musicalement, l'intensité imposée n'effaçait pas l'apport essentiel de Hatebreed qui ne s'est pas contenté d'être un patron du Hardcore Metal : plusieurs plans très typés Metalcore rappelaient que Jamey et son orchestre ont beaucoup participé à la fusion des deux styles achevée lors de la décennie 2000 : là où les prédécesseurs juxtaposaient pertinemment les deux, ils ont fait partie de ceux qui ont popularisé des passages lents où les cordes sont presque à vide, le chant passant du growl au cri. Sans pour autant abuser de ces structures aujourd'hui rebattues jusqu'à étouffement. Infatigable, Jamey nous remercia de l'accueil que la France leur a toujours donné (les pays voisins sont sans aucun doute aussi bien complimentés mais c'est toujours aimable de sa part), et nous fit encore choisir un titre à jouer en fonction des albums dont il faisait la liste : il est normal de choyer les vrais fans. La présentation individuelle des membres du gang, dont la prestation fut somme toute impeccable, annonçait une fin proche qui survint classiquement au bout d'une heure intense et sans rappel, à l'américaine.


En sortant, Papa Windstein était à son stand avec ses fans, bon esprit. Le fait d'avancer fourbu vers mon véhicule était bon signe. Venu sans grosses attentes, j'avais passé une bonne soirée qui me mettait dans de bonnes dispositions pour les prochaines affiches HxC qui s'annoncent.


par RBD le 18/06/2024 à 10:32
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