On en avait parlé, l'année 2023 a été marquée par le départ brutal de l'une des figures les plus actives de la scène régionale, Guillaume Dumazer alias Ged. Pour commencer 2024, ses amis ont organisé un festival de deux jours à sa mémoire ("Ged's not dead"), avec une programmation dont l'éclectisme rebelle lui ressemblait, en faisant venir quelques-uns des nombreux groupes de ses relations. Je n'étais pas un proche du défunt mais nous nous connaissions et j'ai un grand respect pour ce qu'il avait construit, sa passion dévouée à faire vivre le Rock, Punk et Metal contestataire au soleil du bas-Languedoc, et à le raconter. Participer au second soir était une manière de lui rendre hommage, n'ayant pu me libérer pour le premier dont j'ai eu de bons retours.
Cela faisait un moment que je n'étais pas revenu à la Secret Place, j'avais oublié comme ça peut être pénible de s'extraire de la ville en travaux un samedi soir. En arrivant, on se joignait une assemblée tout à fait honorable pour un festival d'intérêt local, massée sous le préau chauffé ou déjà dans la salle. Dedans, une expo' de l'artiste Fanny Saint-Pierre, d'origine Montpelliéraine, participait à l'hommage avec textes et dessins.
Avec une introduction enregistrée, TENTATION se présentait pour le premier set de la nouvelle année. En fait, c'est le groupe des organisateurs du Pyrenean Warriors Open Air, le festival de Heavy qui se tient chaque année (hors covid) depuis 2015 à la mi-septembre à Torreilles, entre Perpignan et la mer. Logiquement, le quartet a déployé un Heavy Speed Metal chanté en français dans la grande tradition de notre scène nationale, puisant dans des thèmes mythologiques et historiques classiques pour ce style. L'ambiance était à la veste à patches, au poing levé et aux cris à la Rob Halford. Portés par une brochette de vrais fans au premier rang, les Roussillonnais se montraient convaincants dans un show maîtrisé et authentique, loin des outrances visuelles et du mauvais humour qui polluent trop souvent leur style. On préfère un chanteur qui descend dans la fosse aux décors en carton-pâte.
L'emploi d'une seule guitare laisse de l'espace à la basse et Dieu sait que j'apprécie cela, quel que soit le genre. L'ensemble de la section rythmique était totalement à l'unisson, d'une rigueur de niveau quasi professionnel confirmant le sérieux de la formation dans la lignée du vieux Sortilège, H-Bomb, Malédiction, ADX, etc, les titans et les sorcières étant fournis avec dans le parcours d'une discographie d'une dizaine d'années déjà. Les solos épiques en tapping sur la Flying V étaient tout à fait au niveau d'un ensemble qui pouvait mériter une place plus haute sur l'affiche dans un cadre moins familial que ce soir. Ils ne manquèrent pas d'ailleurs de célébrer le souvenir de Ged entre deux titres. L'un d'entre eux avait au moins son intitulé en catalan. Je ne suis pas très amateur de ce style, mais sans me prendre le chou j'ai passé un bon moment en leur compagnie, terminé sur un morceau direct au refrain simple en hommage à ce Heavy Metal sans lequel rien n'existerait. La vieille école française, qui avait placé notre pays sur la carte du Metal bien avant la scène Black, est toujours là.
1, 2, 3, 4, changement d'univers avec WARRIOR KIDS qui nous amenait sur un terrain bien différent ! Le trio perpétue pour sa part depuis plus de quarante ans – avec des interruptions – un Punk-Oï lui aussi de vieille tradition et pareillement chanté en français avec cette pointe d'accent méridional qui allait avec le disparu qui nous rassemblait. Mais loin d'être un groupe du quartier, les gamins guerriers se sont exportés par plusieurs tournées à l'étranger voire en Amérique au long de leur carrière. Là encore quelques fans avaient pris le premier rang, mais pas du tout les mêmes que pour Tentation, et un semblant de fosse se forma. Choisissant clairement leur camp, les Marseillais introduisaient des passages Ska dans leur Punk, comme cela se faisait dans la première vague, passages plutôt bien amenés soulignant un lien profond avec la scène Oï des origines, à l'époque trop vite disparue elle aussi où tout ce monde se côtoyait sans mal. Cela faisait très longtemps que je n'avais plus écouté ce genre de choses. Le batteur se levait régulièrement à la manière de Lars Ulrich. Quelques paroles en anglais s'intercalèrent, sur des rimes parfois simplettes et ce jeu qui sonne un peu mou pour un Metalleux mais qui est classique dans ce genre. Les trois Marseillais bénéficièrent d'une cinquantaine de minutes de jeu, remontant au plus ancien dans leur répertoire, et nous laissant sur un "allez tous vous faire enc." au galop.
Au-dehors un stand proposait à l'achat une partie de la discothèque et des affaires de Ged, au bénéfice de sa famille. Et il avait de bonnes choses en stock.
Pris par la conversation de l'intermède j'ai regagné en retard la salle où AGGRESSIVE AGRICULTOR avait déjà entamé son set. Ils venaient déjà chez nous il y a trente-cinq ans de leur pays Basque natal… cette fois l'ambiance était salopette et maillot de bain, chemise à carreaux et marcel, espadrilles et bottes caoutchouc. Ce quintet est une institution méconnue qui manie un Punk Thrash campagnard toujours chanté en français, avec humour et une chaleur réelle mais un peu plus distante, celle du sud-ouest et pas celle de la Méditerranée, à l'image de leur accent tout aussi méridional mais un peu différent du nôtre. Un tracteur miniature posé sur les retours résumait tout le programme. Musicalement, c'était donc une base Punk plutôt humoristique (les lunettes noires du chanteur soulignaient l'influence des Toy Dolls) mais ayant plus qu'un pied dans un Thrash basique, rapide, relativement lourd grâce à la présence de deux guitares, qui a emballé le public dans un pogo qui s'était fait attendre jusque-là. Les paroles oscillaient entre la panne de tracteur, une virée en ville, le rugby et la longue vie au Metal, sur un registre beaucoup plus universel que la scène Basque espagnole très revendicative et sans les côtés Folk d'un Boisson Divine. En alliant Punk, Metal et saucisson les cinq d'Hasparren synthétisaient tout l'esprit de la soirée et du disparu, qu'on aurait volontiers imaginé se promenant parmi nous comme ils le dirent… Le tempo accéléré avait fait du bien et uni les Punks, les Metalleux et les paysans dans un pogo aux faux airs de chahut agricole, communion dans un plaisir assez particulier.
Il fallut un long moment à ZOLDIER NOIZ pour caler ses balances. Mais on était content de revoir l'un des groupes les plus extrêmes du Midi, basé entre Montpellier et la Gascogne. Le personnel a beaucoup changé au fil des ans (certains anciens membres étaient d'ailleurs dans l'assistance) mais la formule trio a montré sa souplesse autour d'un patron incontesté qui tient le chant et la guitare. On pourrait sourire du temps perdu sur quelques potards avant le set quand on connaît le son du groupe, mais sonner sale et chaotique est un résultat travaillé en réalité. Zoldier Noiz ne déviera jamais de son Thrash Black des origines dans la pure lignée de Hellhammer, des Voivod et Sodom des débuts, Possessed, Sarcofago, avec des vocaux réverbérés qui se mêlent à une guitare cradingue au poil. Nonobstant, la version actuelle du groupe profite de la présence d'un excellent batteur qui amène l'ensemble vers une rigueur appréciable alors que d'autres incarnations passées maîtrisaient moins leur fureur. De quoi renforcer l'envie de headbanguer ou de se lancer dans un pogo bien violent qui faillit même dégénérer. À mesure que le temps passait une partie du public déserta ce plaisir rétrograde et élitiste. Pourtant on pouvait goûter aux lignes de basse qu'on distinguait aisément avec un léger effort d'attention, renforçant l'urgence du rythme déjà dans le rouge. Mieux encore, sous cette tornade se cachent un grand nombre de bons riffs qui montrent à ceux qui savent l'entendre une musicalité étonnante. Là où tant d'autres dissimulent leur faible talent sous un brouillard sonore prétendument extrême, Zoldier Noiz a de petites pépites à offrir et mériterait plus de reconnaissance si le monde était juste. Là-dessus, pas la peine de s'étendre en palabres et quelques mots suffirent en guise de communication quasi superflue, l'hommage sobre à Ged n'étant pas oublié. Une reprise de Hellhammer vint achever les derniers survivants avec un tempo un peu plus léger (…) sur un son toujours aussi intransigeant.
Alors qu'il n'y avait que quatre groupes le concert s'achevait assez tard. Ce serait une bonne idée de perpétuer ce festival ponctuel, s'il est possible, dans cet esprit de mémoire sans chagrin. En attendant, nous nous retrouvons dans quelques jours au cœur de l'hiver.
Putain ! WARRIOR KIDS existe toujours ?!
Comme quoi, y'a pas que dans le Heavy ou le Hard que l'on peut faire de vieux os... ... ...
Alors, autant j'apprécie beaucoup Wolfheart, et cette news ne va rien y changer, autant, pour moi, l'Arabie Saoudite est l'un des pires pays au monde... Alors, je ne suis pas arabophobe, mais ce pays pue terriblement ! Je plains les Saoudiens (et surtout les Saoudiennes) qui(...)
21/11/2024, 18:01
"...jouer un concert en Arabie Saoudite. Un honneur absolu et un privilège. Les loups du nord apporteront la tempête hivernale à Riyad !"Un véritable honneur absolue de jouer en Arabie Saoudite, la ou les apostas sont condamnés &agra(...)
21/11/2024, 08:46
Quand on se souvient du petit son des années 80... Mais la prod ne fait pas tout, ça reste du pilotage automatique. C'est pas avec un truc pareil que je vais me réconcilier avec eux, et ça fait 20 piges que ça dure.
19/11/2024, 21:57
J'avais pas vu cette chronique. J'étais au soir avec Ulcerate et je n'ai pas du tout regretté...Le lieu : il y a forcément un charme particulier à voir ce genre de concert dans une église, surtout que le bâtimen(...)
15/11/2024, 09:51
Le who's who des tueurs en série. Un plus gros budget pour l'artwork que pour le clip, assurément. (...)
14/11/2024, 09:20